samedi 31 décembre 2016

NON CONFORME



Bonjour !

J'ai reçu dernièrement un courrier administratif.
Il y était question d'installation sanitaire, de réseau d'écoulements d'eaux, pluviales, usées, et je ne sais quoi encore. De vérifications à mener pour s'assurer de la bonne règle de notre façon de faire.

Agorreta est à l'écart de la ville.
Nous ne sommes pas reliés à ce circuit souterrain où se déversent les épanchements liquides de nos modes de vie.
Ce fameux "tout-à-l’égout" dont le nom  seul fait frissonner.
Tout à l'égout, tout à jeter, et rien à voir...

Nous vivons, tout de même, à Agorreta, la pluie y tombe comme ailleurs, et se déverse.
Nous utilisons l'eau, nous la souillons, et la rejetons.
Un système de recyclage a été mis en place, il y a une bonne vingtaine d'années.
Plusieurs fosses, des "épandages" dans le champ en dessous, collectent, recueillent et redistribuent les effluents de nos vies d'hommes et de bêtes.
Vivant au plus près de la nature, nous en connaissons les fragilités et les fonctionnements.
Nous savons que l'organique devient nourriture. La souillure, les odeurs nauséabondes, font partie de notre quotidien. Sans avoir le nez et les pieds constamment dedans,  nous côtoyons de près le fumier.

Nous avons remarqué, et partageons d'ailleurs, aussi, l'aversion des narines pincées par un assaut musclé de relents de putréfaction.
Nous avons enterré nos fosses, et l'épandage subséquent.
Nous apprécions même à l'occasion l'odeur agréable et fraîche des détergents et autres savonnettes.

Pourtant, j'essaie pour ma part d'éviter de m'éloigner de l'authentique fumet de vie.
Je véhicule d'ailleurs partout un relent d'étable, cette fragrance chaude et lourde un peu dérangeante dans les endroits clos.
Je travaille en extérieur, la plupart du temps, aussi, mes émanations se diluent-elles sans désagréments pour les autres dans le grand air.

Forte de ma philosophie nouvelle, je n'impose plus avec agressivité mes particularités.
J'utilise même ces artifices honnis pour masquer les effluents de mon mode vie à l'authenticité trop marquée !

Ce fameux courrier est resté lettre-morte, évidemment.
Notre installation est résolument non-conforme. Inutile de déranger un agent et de vérifier pour le constater.
Oui, nous vivons de façon non-conforme, à Agorreta.

Nous nous astreignons à respecter l'environnement, parce-que nous savons en dépendre.
Les normes des hommes ne nous paraissent pas toujours compréhensibles et judicieuses.
L'homme, cet animal capable de dérégler le climat, tout-de-même...

Oui, notre installation d'Agorreta est non conforme.

Notre façon de vivre doit l'être aussi. Et pourtant, tels quels, cette installation et ce mode de vie, ils me vont, parfaitement, à moi !

Bien-sûr un jour la réglementation nous rattrapera, et nous devrons rentrer dans ce moule étroit.
Jusque-là, pointés du doigts mais laissés libres encore, nous vivons, non conformément...








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