mercredi 2 septembre 2015

AGORRETA ET L'EAU




Bonjour vous tous !


















Quelle agréable sensation de fraîcheur en ce matin de début septembre !

Quel bienfait, quel bien-être, après les rudes chaleurs de ces jours précédents...







Dimanche en fin d'après-midi, mes pauvres bêtes se tenaient à l'ombre, dans la touffeur lourde.

Elles étaient harcelées par les moucherons frénétiques.
Des bancs d'étourneaux innombrables accompagnaient leur marche dans le champ.

Même les vaches étaient incommodées par ces températures excessives !








Lundi, à la même heure, du frais nous venait du ciel, enfin !
Toutes les hirondelles de la ferme s'alignaient sur le fil électrique,  faisant leur toilette dans la pluie pas trop drue.

L'averse forcissant ensuite, elles se mettaient aux abris.
Elles ne devraient pas tarder à lever le camp, maintenant.







Ce matin, mes vaches ont retrouvé des conditions agréables de pâturage.

Les deux petites ont repris l'appétit qu'elles avaient perdu, et vident les pis de leurs mères respectives consciencieusement.

Pas besoin de traire Bigoudi comme j'ai du le faire dimanche.
Madame, contrariée sans doute elle aussi par l'ambiance trop chaude, ne voulait pas se laisser faire, et, pour éviter les coups de sabots qu'elle me destinait, nous avons du, avec Olivier, lui maintenir la patte avec une corde, le temps que je lui vide ses mamelles congestionnées.
C'est un peu trop sportif à mon goût, tenir une posture inconfortable, en sentant les tentatives saccadées de la bête entravée pour se dégager.
Sacré Bigoudi...
Dieu merci, depuis lundi, tout est rentré dans l'ordre, Alléluia !


Ce matin à Agorreta, nous avions une toute autre préoccupation.
Chaque jour amène ici comme ailleurs son lot d'aléas et de surprises...

Agorreta, en basque, veut dire endroit sec, aride. La même racine se retrouve dans Agorilla, le mois d'Août, celui souvent du manque d'eau.

Agorreta et l'eau, c'est toute une aventure. 
La ferme fait sa coquette sur un petit monticule, pas bien haut, quelques trente mètres au dessus du niveau de la mer.
L'approvisionnement en eau potable dans le coin se fait à partir d'un château d'eau, sur une élévation en face, juste sous le soleil levant de ce matin.
Le niveau de cette réserve d'eau est en dessous de celui de la ferme. Pour le coup, l'eau nous arrive, certes, mais toute mollette, sans entrain.

Au fur et à mesure du peuplement de la contrée, cette pression déjà limite, est devenue carrément insuffisante. Les habitants des étages supérieurs devraient attendre que la maison se vide en dessous, pour espérer voir arriver une larme humide en bout de robinet.
En ce temps moderne où tout le monde s'ébroue joyeusement et surtout, très souvent, sous la douche, où l'on ouvre grand les mitigeurs pendant plusieurs minutes pour rincer un verre, où l'eau paraît due et abondante,  évidemment, notre configuration ne convient pas. Et non...

Pour amener un peu de ressort et de fringant dans ce filet d'eau claire, nous avons recours à un système de surpression, ma foi bien appréciable.






Vous connaissez peut-être, ces petits dispositifs électriques, s'appuyant sur un réservoir d'eau,  approvisionné par le circuit normal.
L'appareil puise dans la cuve, et renvoie l'eau aspiré, en lui insufflant suffisamment d'énergie pour qu'elle vous sorte du robinet en un jet vigoureux comme un torrent de montagne au dégel.




A Agorreta, nous ne manquons pas spécialement de place. Nous aurions pu installer ce dispositif indispensable dans un environnement spacieux, commode d'accès et d'entretien.

Oui, nous aurions pu...

Au lieu de ça, ce "surpresseur", la "pompe", comme la nommons respectueusement, se niche ici, dans ce cagibi bas, à l'ouverture étroite.



Voyez vous-mêmes, l'ensemble ne mesure pas plus d'un mètre de hauteur, et ce petit volet permet juste le passage d'un homme pas trop corpulent, s'il arrive à se plier en deux.
Quand on sait la vétusté de l'installation à alimenter, on se doute, sans être spécialement clairvoyant, qu'il faut aller assez régulièrement visiter le coin, pour une ou autre opération de réglage, de vérification, ou d'entretien.

Tous les cinq ou six ans, il faut d'ailleurs prévoir de changer l'ensemble de l'appareil, trop sollicité.
Nous conservons à Agorreta une alimentation générale unique, quand nous sommes plusieurs familles maintenant.
La "pompe" dont la capacité est limitée par la section des tuyaux existants, s'épuise à fournir une prestation qui la dépasse.

Très régulièrement, donc, un plombier se risque ici, et regrette d'avoir accepté le chantier, dès qu'il s'en est approché.
Parce-que ces gens sont dans l'ensemble portés par leur conscience professionnelle, ils s'acquittent de la tâche à exécuter, soufflant et ahanant dans le cagibi exigu.
Mais ne s'y laissent pas prendre deux fois, et déclinent poliment l'invitation, quand ils entendent pour la seconde fois parler de "la pompe" d'Agorreta.
Le métier renouvelle ses effectifs, et, heureusement, en ratissant large, nous arrivons à piéger l'un ou l'autre de ces professionnels, jusqu'ici.

Mon père s'étonne. 

 - Mais, nous dit-il, ce n'est pas compliqué, pour travailler là dedans à son aise, il suffit de soulever le couvercle !

La première fois que j'ai entendu parler de cette histoire de couvercle, je me suis ébahie :

  - Un couvercle, où ça, un couvercle ?

   - Ben, là, tiens, sur le dessus, où veux-tu que ce soit, un couvercle !

C'est vrai, suis-je bête, un couvercle, sur le dessus...
Regardez bien, vous le voyez, le couvercle ? Non ? Mais si ! Si, si !

Cette jolie petite masse bétonnée, d'une bonne dizaine de centimètres d'épaisseur, vous la voyez bien, chapeautant l'ensemble, non ?
Elle fait plus de deux mètres au carré, je vous laisse calculer son poids...

Et, comme moi, votre bouche s'arrondira ! Le couvercle, c'est ça, ah...

   - Il suffit de le soulever, et tu travailles là comme tu veux !

Dit mon père, toujours lui, triomphalement.
Il suffit de...
Evidemment, dans le temps, à Agorreta, il y avait toujours dans les parages une demi-douzaine d'hommes forts et vigoureux. 
J'imagine bien que cette lourde plaque de béton ne résistait pas à leurs poussées conjuguées.

Simplement maintenant, ce n'est plus la même histoire. 
Quand la "pompe" tombe en panne, c'est moi qu'on vient voir. Et moi, quand je transmets au malheureux plombier innocent que j'ai pu dénicher, je vois arriver un artisan certes souvent en pleine force et santé, mais rarement une équipe de tireurs à la corde dédiée à remuer un couvercle de plusieurs centaines de kilos.

Le couvercle est en place, et le reste.

Cette fois-ci d'ailleurs, la "pompe" n'est pas en cause. 
Le tracas vient d'ailleurs, pas bien loin.
Tout près de la maison de mon frère aîné :





Cette petite flaque, apparue fin de semaine dernière, après ces jours si chauds où le soleil vous asséchait tout par son souffle brûlant.

Pas de source souterraine, ici, non, non.

Mais un bon vieux tuyau d'alimentation d'eau, enterré là il y a plus de quarante ans...



Ce fameux tuyau alimente la grande maison, depuis la fameuse cuve-tampon enterrée sous le cagibi, par la force de propulsion du "surpresseur".

Il fait parler de lui très régulièrement, lui aussi.
Mon père, fort de ses quelques connaissances en maçonnerie, aidé de ses fils, a construit la grande maison de ses mains.

Les branchements sanitaires ont été supervisés "maison".
Pour passer un tuyau d'arrivée d'eau, pas sorcier de creuser une tranchée, et de l'y enterrer, n'est-ce pas ?
Le sol est dur, à Agorreta. Et, à l'époque de la construction de cette grande maison, le terrain sans doute encombré.
Pour le coup, la tranchée où repose, presque en paix, notre tuyau vedette du jour, suit des méandres capricieux et totalement imprévisibles.
Consultés par ordre d'aînesse, mon père et mes frères allongent une lippe sceptique, chaque fois qu'il s'agit de localiser un tuyau enfoui, un robinet enterré, ou une trappe de visite depuis longtemps perdue de vue.

   - par là, ou ici, peut-être, pas loin...

Avec à chaque fois, une approximation de plusieurs mètres. 
Embêtant, quand il s'agit comme ici de creuser, à proximité d'une aire bitumée.

Il nous arrive souvent de commencer là, et de nous retrouver ici. Ou le contraire.
De chercher un tuyau d'eau, et de sectionner net un câble électrique, oublié.
Mon Dieu Seigneur, Agorreta, c'est ça !

Ce matin, notre intervention a été un succès.
Rapidement, nous avons mis à jour le tuyau, et le bon. Prestement, nous l'avons réparé. Au passage, une gaine ignorée a été étirée, et quelques dommages collatéraux restent à réparer, encore.

Tout près, les anciens corps de pompe, victimes d'interventions passées, nous contemplent en silence.




Nous les conservons, on ne sait jamais...

Au cas où une des pièces irait sur la nouvelle.

Evidemment, jusqu'ici, ce cas de figure ne s'est pas présenté.

Mais bon, ce qui ne s'est encore jamais fait n'en conserve pas moins de chance d'arriver, non ?

Mais oui, mais oui !

Ainsi croyons-nous, bienheureux habitants d'Agorreta.
Nous nous attendons à une prochaine panne, évidemment, mais, jusque là, l'eau coule, dans les tuyaux. 

Alors...

Vivons sereins et confiants. L'inquiétude ne préserve de rien et aigrit inutilement les tempéraments.

Je vais éclaircir mon navet, tiens. Cette chaleur et cette pluie me l'ont fait très vite avancer.




A bientôt, amis du "bloc" d'Agorreta. Où l'eau pour le moment ne manque pas...

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