jeudi 12 février 2015

MA VIRÉE CHEZ DARTY




Amis et suiveurs des Nouvelles d'Agorreta, bienvenus et bonjour !

Vous vous demandez ce que vient faire une enseigne d’électroménager dans l'univers rural et campagnard d'Agorreta ?
la modernité est presque partout aujourd'hui, et dans ma vieille ferme aussi.






Même si on peut se le demander...


Hier, je vous l'ai conté dans mon article précédent, en retransmission différée à ce matin, ma "box" m'a lâchée.
Imaginez, moi, accrochée maintenant comme une perdue à ce filin qui me relie au monde extérieur, à ce lien qui nous unit, vous et moi, moi, oui, moi, perdue dans ma nuit d'Agorreta !

Il y a peu, je me souciais d'Internet et de toutes ces panoplies de connections et réseaux comme d'une guigne.
C'était il y a peu, et ça me semble pourtant si loin déjà.
Depuis la création de ce blog, en fait. 

Déjà, quand mon ordinateur avait refusé de donner signe de vie un matin de fin décembre, je crois, (voyez mes articles de cette période...), mon père, Joset, lui aussi pourtant bien loin de toute cette technologie avancée, m'avait immédiatement mandatée pour quérir un nouvel outil.
C'est qu'on se prend vite au jeu de cette communication.

Ecrire, je l'ai toujours fait. Mais beaucoup pour moi, puisque, à part quelques très rares ouvrages édités, essentiellement en basque, je n'ai pas connu la joie de partager aux lecteurs mes fantaisies littéraires.

Là, avec ce blog, l'occasion m'en est donnée. Et je ne vais pas me priver !

Dans un premier temps, je me suis acharnée sur ce pauvre boîtier moribond, à vouloir à toutes forces le ranimer.
Devant le peu de succès de mes tentatives, j'ai failli le jeter jusque chez Conchita. 





Chez Conchita, c'est la maison en bas d'Orio, vous voyez ?

A la jardinerie, pour imager la même tentation d'envoyer loin valdinguer ce qui nous résiste, nous disons, "chez Volvo".

Dans le même esprit, et le tout voulant dire, loin, le plus loin possible.






Plus raisonnablement, je me suis glissée dans la filière réglementaire à suivre dans ces situations.

Hier, mercredi,  après avoir appelé au secours les assistances techniques concernées, j'ai rogné sur mon temps de sieste pour aller chez Darty, à Anglet.

J'aime faire la sieste. Et j'en ai besoin pour compenser quelques nuits interrompues ou écourtées.
Là, un cas de force majeure primait. J'ai choisi mes priorités.

Je n'aime pas laisser mon père seul dans la ferme.
Les jours où je suis de garde, j'y reste. mes absences sont les plus rares et les plus courtes possibles.
Mais bon, il y a toujours des aléas, et il faut en accepter l'augure...

Ainsi donc, encore un peu contrariée, je me lançai au volant de ma petite Modus, sur la route enchantée vers la reconquête de notre précieuse relation.

Le trajet Hendaye-Bayonne, c'est mon trajet professionnel. Je le fais quatre fois par semaine.
Mais, en saison hivernale, je le fais de nuit. 

Hier, j'ai redécouvert la route par une douce lumière grise, empreinte de la nostalgie du soleil vaincu par les nuées.
A cette heure de l'après-midi, la programmation musicale est agréable.
Je me détendais, bercée par des mélodies faciles et un peu lénifiantes.

En ce moment, vous l'aurez vous aussi sans doute noté, il y a plusieurs zones de travaux sur cet axe.
Dès Urrugne et sa nationale, feux clignotants, circulation alternée, ouvriers sur la chaussée et chauffeurs routiers en abondance.

Je remarquai à l'aplomb du cœur de cité, un homme casqué, plus tout jeune, secoué par les soubresauts incontrôlables d'un marteau-compresseur.
J'imaginais la violence des coups répétés,  l'onde de choc extrêmement pénible remontée par les bras, tout le corps malmené par l'effort de maintenir cet engin déchaîné.
Et bien, vous me croirez si vous le voulez, cet homme avait sur le visage la douce expression d'une profonde sérénité.
C'en était incroyable ! Chacun de ses muscles devait vibrer sous les coups saccadés, et, pourtant, l'homme semblait étranger à tout ce bruit et comme détaché de cette agitation trépidante.
Il regardait au loin, les montagnes encore enneigées, les nuages longs étirés. Hors du monde qui le secouait.
D'autres ouvriers l'entouraient. Eux paraissaient percevoir pleinement la pénibilité de la tâche.
Lui seul réussissait à s'élever au delà.

Cette image m'est restée gravée en tête. J'ai trouvé là une belle matière de satisfaction, la démonstration limpide de la capacité de l'homme à s'extraire par l'esprit de toute situation.

Un peu plus loin, aux côtés d'une balayeuse imposante qui ralentissait toute la travée de voitures derrière elle, sans qu'on ait l'impression que cette route ait tant besoin d'être nettoyée à ce moment là, une collision venait d'avoir lieu.
Une jeune femme et un couple de personnes âgées devisaient courtoisement, papiers en main.
Le monsieur regardait la demoiselle avec un plaisir évident. Il devait certainement se montrer on ne peut plus accommodant, puisque la jeunette lui souriait en retour.
La dame, elle, se tenait en retrait, un peu désabusée. Une longue cohabitation avec son époux, sans doute, et tout ce temps là pour aplanir les affres d'une jalousie sans objet maintenant...

Tout semblait se passer entre ceux là pour le mieux dans le meilleur des mondes...

Mon périple devenait formateur et rassérénant.

Passé Saint-Jean-de-Luz, au bord d'un champ pentu, un trio de vieux messieurs œuvraient autour d'un tracteur tout aussi vieux, attelé à une fendeuse de bûches.
Ils paraissaient bien avancés en âge pour s'attaquer à de tels travaux.
Pourtant, là aussi, l'impression était à la sérénité. Dans le même angle de vision, s'offrait dans le ciel une volée de mouettes penchées.
Que de grâces et de beauté en ce monde, me disais-je.

Toute la contrariété de mon départ s'était diluée à ces spectacles charmants.

Je vous l'ai dit, je fais ces trajets de nuit. Je vois bien les abords en chantier, mais pas clairement.
Là, se déroulaient près de moi des bandes de terrains éventrés, des couches d'argiles claires mêlées à des strates de limon brun, des monticules, des fossés, toute une aire en réaménagement d'importance.
Même si je n'ai pas la fibre mécanique de mes frères, je suis sensible à la puissance et à la gloire des grosses machines de chantier.
Là, j'étais servie.

De l'autre côté de la glissière d'autoroute, manœuvraient d'immenses pelles articulées, des tombereaux aux roues géantes,  et un rouleau compresseur énorme. 
En basque, nous appelons ce dernier engin : Martin Bullu. Enfin, chez nous, à la ferme, nous l'appelons ainsi. Je ne suis pas sûre que la puriste académie de langue basque connaisse ce terme technique précis...
Mais, moi, j'en aime bien la sonorité.

Avec tout ça, j'étais rendue à ma destination.
Je topais là un vendeur vif et efficace, d'une énergie presque effrayante. Il voletait d'un comptoir à l'autre, vecteur d'une tension presque douloureuse à regarder.
mais au moins, grâce à son efficacité et à sa diligence, je pus repartir nantie de mon précieux coffret, à peine dix minutes après être arrivée.
L'aubaine pour moi qui déteste passer du temps dans les magasins. (Oui, je sais, je travaille dans une jardinerie, mais là, c'est différent; Vous ne voyez pas en quoi ? je vous expliquerai).

Mes observations du retour furent moins enrichissantes.
Je notai quand même une curiosité, aux abords d'Urrugne encore.

Face au château d'Urtubie, une toile verte tendue sur une clôture grillagée préserve les résidents de la vue du chantier.
A ce seul endroit là. 
Le chantier, vous l'aurez remarqué, court tout le long de l'autoroute. 
Des maisons, des habitants, il y en a d'autres, beaucoup.

Je ne sais pas qui anime ce château maintenant. Si on y vit, à demeure ou pas.
Mais, j'imagine que si le chantier peut déranger ces gens là, il doit en déranger d'autres, tout autant.
Suis-je de parti pris contre un vieux reste d'aristocratie ? Est-ce un vieil atavisme paysan qui me fausse le jugement ?
Peut-être, et je n'en ai pas nourri plus d'amertume que ce que j'en dis ici.
J'ai trouvé ça plus curieux qu'autre chose.

Surtout, quand, de ce même endroit en regardant vers le bourg, on voit une immense grue surplomber le clocher de l'église.
En avançant, on remarque que la grue est en fait décalée. Mais le point de vue est celui d'où l'on regarde, n'est-ce pas ?
Et là, c'est exactement ça. On préserve la sensibilité d'un château plus ou moins habité, et on offense l'élévation spirituelle d'un monument religieux en la flanquant sans ménagement d'une hauteur d'acier trempé.

Voilà, je rentrai chez moi toute habitée de ces fines (et moins fines) remarques.
Et me faisais une joie de vous les donner à commenter.

Comme quoi, une simple virée chez Darty, ça peut devenir une petite aventure en soi !

Pour une vieille fantaisiste comme moi, du moins...

A bientôt, amis et suiveurs d'Agorreta.
laissez-moi vous donner une belle image pour allumer votre journée :













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