mercredi 27 janvier 2016

CHEMIN DES CRÊTES : LE GOUT DU THÉÂTRE



Suiveurs de ce "bloc" bonjour !
Et bienvenu au promeneur de passage...







La matinée est radieuse, aujourd'hui encore. Une période magnifique, impressionnante de beauté. Impressionnante dans le sens de qui se gardera en mémoire, longtemps. 
Le temps des inquiétudes est levé sur Agorreta. Nous n'avons plus peur en vivant un moment parfait de la suite, moins parfaite peut-être. 
Nous acceptons l'augure d'un avenir admis. Et la sérénité fait son nid dans notre apaisement.





J'ai entamé la saison des navets.
Admirez ces têtes énormes !
Ma petite faucille incurvée à côté vous donne à voir leurs gabarits, et son usure, la pauvrette !
Elle me fait très bien l'affaire, telle qu'elle.
Je tranche d'un petit coup sec et précis, tchac ! la racine enterrée, et voilà le dessert de mes vaches assuré.
Non, vraiment, je suis satisfaite de ma récolte de navet de cet hiver.


Satisfaite du sort qui me l'a accordée, et de mon travail qui a su favorablement utiliser ce sort amical. Satisfaite de moi, encore une fois ? Et oui, je l'admets, sans fausse modestie, satisfaite de moi, oui, oui...
Incorrigible bouffie d'orgueil que je suis !!


Retournons Chemin des Crêtes, en cet automne 2003 :









Il faisait beau, aussi, en cette période, me semble-t-il. Certaines journées du moins me sont restées en mémoire, avec leur lumière chaude et profonde.

Ma mère malade me mobilisait, évidemment. Notre affaire du Chemin des Crêtes passait au second plan. 
Tout de même, je ne lâchais pas prise. Je me battais tous azimuts, puisant l'énergie dans ma certitude de faire bien, de faire au mieux de mes possibilités. Je ne ménageais ni mes forces ni ma peine. 
Je ne sais pas trop faire à moitié, me préserver, avancer sans foncer. On me le dit souvent, et je le sais. C'est ma nature et ma force. C'est aussi mon tourment et une faiblesse. Je l'admets, et je l'accepte.

La fameuse épître envoyée à la mairie en septembre avait fait son effet :










































































Elle avait remis le feu à des poudres encore fumantes. Au lieu d'apaiser les choses, j'avais choisi de raviver les braises, aveuglée par mon insolence et mon orgueil de péronnelle.

La réponse du berger à la bergère ne s'était pas fait attendre, avec cet arrêté :















































































Et la convocation chez le maître d'école pour se faire taper sur les doigts, dans la foulée :





Mon humeur belliqueuse, même amoindrie par mes préoccupations sérieuses concernant ma mère, aiguisait mon goût de la bataille.
Cette perspective d'avoir à ferrailler me distrayait même d'une peine profonde à la perspective d'un avenir difficile à côtoyer la maladie et ses misères implacables.

Je me rendis à cette réunion, animée d'une frénésie aiguë. Mes neurones fonctionnaient à pleine vitesse. Mes idées jaillissaient comme les étincelles d'un feu de châtaignier.
Mes frères y étaient aussi, bien-sûr. Je devais aller voir ma mère hospitalisée ensuite, aussi, nous faisions voitures à part.
Sur la place d'Urrugne, nous nous retrouvâmes tous. Les voisins étaient là.  Oronos était là aussi, avec sa mère, Dieu seul sait pourquoi, mais bon. 
Je les saluai tous  urbainement,  et m'engouffrai, escortée de mes robustes frérots, sous les voûtes sombres de l'antique mairie d'Urrugne.

Nous fûmes reçus en délégation par Monsieur le Maire, et une poignée de représentants officiels et solennels, dont le si sympathique Jean-Dominique Boyé.

Ce fût une séance animée, pleine de piques et joutes enflammées. Je me sentais incollable, et mes réparties fusaient spontanément. 
Bien des fois, je connais cette déception de trouver la réponse pertinente bien trop tard. De me dire : tiens, j'aurais du parler de ça, et de ça aussi. Là, je lui aurais cloué le bec avec ça... Toutes illuminations arrivées bien après la bataille, et tombées à plat, au lieu d'à pic...

Lors de cette réunion, mon éloquence et ma rapidité d'esprit me surprirent, moi qui suis pourtant si admirative de moi-même, en général !
Je m'étonnai, je me surpassai. Je me sentis soulevée au dessus de moi-même.
A l'analyse, je compris la raison de cette sensation. 
J'avais un public, des spectateurs de qualité. Je tenais à leur offrir un spectacle à la hauteur de leur considération.
Et c'est ce jeu de rôles, en écartant toute inhibition, en révélant en moi un talent de comédienne, qui mobilisait des ressources enfouies.

J'aimais cette représentation, je m'y amusais follement. Et ce divertissement me rendait plus brillante, assurément.
J'ai retrouvé la même impression sous les voûtes majestueuses du Tribunal de Pau. face à Oronos, portée par la théâtralisation de la scène, je me suis surpris, et j'ai surpris mes proches présents, à parler, parler, avec une aisance que je ne me soupçonnais pas.
Et un plaisir à l'avenant. 
Je me suis découverte cabotine et narcissique. 
Je m'en suis étonnée, un peu, pas tant cependant...

Evidemment, cette réunion en mairie ne donna pas grand chose. Nous continuerions, avec l'aval grinçant des autorités incapables de nous arrêter officiellement. Et sans leur bénédiction, évidemment !

Ces expériences ont révélé ces facettes de ma personnalité. Elles ont réveillé ces potentialités fossilisées.
Je suis reconnaissante aux circonstances, à tous ces acteurs involontaires, de m'avoir livré cette connaissance de moi-même.
Si toute cette aventure n'avait servi qu'à ça, je considérerais qu'elle en valait la peine, pour ce seul bénéfice.

Comme en plus elle m'a apporté bien d'autres choses encore, vous pensez bien que j'en garde un souvenir gratifié.

Je vous laisse ici pour aujourd'hui.
Je vais avec ma mini-meute profiter de l'ombre étoilée de soleil des chemins creux, derrière Agorreta.





A bientôt, et portez-vous bien, là où vous êtes.

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