lundi 16 janvier 2017

AGORRETA AGOTEAK



Bonjour !

Je reviens ce matin sur ce livre découvert la semaine dernière :


"Cagot secret dévoilé" de Kepa Arburua Olaizola.

J'avais une connaissance vague de ce mot : cagot. Comme d'autres, entendus ici ou là, dont la définition se profile en ombre incertaine au périmètre extérieur du cercle de nos connaissances avérées. Pour peu qu'il y en ait...

Je l'avais, je vous l'ai dit, choisi par hasard sur une tablette de la bibliothèque.
Ouvert sans grande conviction. Et découvert avec surprise une photo de ma vieille ferme, dans les premières pages.
Je ne connais pas l'auteur de l'ouvrage.
En y repensant, j'ai vaguement, là encore, décidément, le souvenir d'un visiteur arrivé dans la cour de la ferme, en 2008, me semble-t-il, au moment où je plumais une demi-douzaine de poulets.
Je vous parlais hier de mes poules, voyez, tout ce tient !
Je ne reconnaîtrais pas l'homme, si je l'avais en face de moi. Sa photo sur la jaquette du livre ne me parle pas.
J'ai par contre en tête notre conversation.
Il ne m'avait pas alors exposé les thèses énoncées dans cet ouvrage.
Il m'avait dit écrire, et nous avions parlé de cette activité partagée.
Il m'expliqua qu'il éditait lui même ses livres, et se chargeait aussi de leur diffusion.
J'avais à l'époque admiré cette ténacité à faire valoir son travail.
De mon côté, était édité ce qui trouvait éditeur, bien peu de chose, et tout le reste dormait gentiment dans les tiroirs.
Je reconnaissais à cet homme tombé dans notre cour, pas du ciel mais tout comme, une volonté et un courage que je n'ai jamais eus.
Ou alors, un besoin que je n'ai pas ressenti avec la même presse.
J'ai toujours été très gratifiée de voir mes écrits diffusés. Une grande fierté m'habitait de voir mon nom sur un livre, ou de l'entendre commenter en termes élogieux. Les non élogieux, et il y en a eu, bien-sûr, je les ai oubliés...
Mon tout modeste succès m'a fait plaisir, et son étroitesse n'a jamais risqué de me tourner la tête !
J'ai conservé de l'écriture le plaisir, l'envie et le bienfait.

Pour ce Kepa, cela paraît être différent.
De ces écrits, je ne connais que ce livre-ci.
J'y vois davantage une quête historique attachée à nos origines. Ce n'est pas une littérature d'agrément, où les mots s'assemblent en phrases mélodiques. Ce n'est pas une fiction distrayante, où les passions et sentiments universels dansent au travers de personnages imaginaires. 
Ce livre est davantage un documentaire, une argumentation, une thèse.

Le titre à l'accroche facile et puérile me laissait à priori un ressenti défavorable.
Secret dévoilé, ça parle d'énigme, oui, et ça intrigue. Mais en même temps, ça évoque une littérature mercantile et tapageuse.
Cette affaire de cagots nourrit la controverse depuis des siècles. Elle est comme l'origine de la langue basque et de notre peuple, sujette à hypothèses diverses et variées. Chacun y va de sa version, et tout le monde reconnaît la difficulté à dévoiler, justement, des certitudes.
De ces certitudes que nous cherchons tous, toujours apeurés de l'inconnu.

J'imagine bien la frustration du chercheur, cherchant longtemps, assidûment et laborieusement, confronté à un résultat qui lui glisse ainsi entre les doigts.
On ne sait pas...
C'est d'ailleurs ce constat navrant qui révolte notre Kepa.
Un livre, dit-il, doit distraire ou enseigner. Le sien n'a pas vocation à distraire. Mais bien à enseigner, c'est-à-dire délivrer un savoir. Et savoir, ce n'est pas supputer, douter ou devoir se faire sa propre idée sur des bases mouvantes. Non, pour Kepa, savoir, c'est savoir : chercher, trouver, démontrer, et asséner !
Son travail est sérieux, ses recherches poussées. Il a compté le nombre de pages compulsées. C'est en effet impressionnant, et je tire chapeau bas à cet homme. Jamais je n'aurais la ténacité et le courage d'aller enquêter aussi profondément.

J'émets toutefois une réserve :
Son "kitto" ponctuant ses argumentaires régulièrement, ne me convainc pas.
Je suis bien son cheminement, et partage l'idée que ses enchaînements sont pertinents. 
Pour autant, la vérité dévoilée me semble pouvoir être discutée. Et cette forme d'autorité imposée me dérange au point de mettre en doute ce à quoi j'aurais pu mieux adhérer, si on m'avait laissée latitude de conclure par moi-même.

Loin de moi l'idée de minimiser le travail de Kepa. Je le répète, il est considérable, impressionnant et mérite le plus grand respect.
Seulement, ses conclusions, ses certitudes, resserrent trop abruptement des possibles et des autrement.
Et moi, maintenant, à toute assertion, aussi argumentée soit-elle, je préfère le champ plus vaste et confortable d'une liberté laissée à chacun de se faire sa propre opinion.

Je reviens plus tard sur le rapprochement avec la ferme Agorreta de ces Agoteak, cagots en basque.

Pour ce matin, mille mercis à Kepa Arburua Olaizola, en espérant qu'il comprenne et me pardonne mes réserves.



Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire