dimanche 21 août 2016

HISTOIRES FAMILIALES



Bonjour tout le monde !






De joufflus nuages moutonneux caressent gentiment le cou de Mère-Rhune imperturbable.









La bienfaisante pluie d'hier a magnifiquement régénéré les paysages. Tout est frais, propre, comme lavé. Purifié. 

Les mêmes choses deviennent toutes autres, à cette nouvelle lumière.
Mon choux navet a doublé en l'espace de deux jours !








Dans la vieille étable d'Agorreta, les dernières couvées d'hirondelles s'apprêtent à prendre leur envol. 
Il y a eu beaucoup d'hirondelles, cette année. Chaque matin, elles s'alignent sur les longueurs de tuyaux de la machine à traire, en chapelets vifs et mouvants. Quand j'allume la lumière, elles s'agitent en nuées gracieuses et pépiantes. 
Elles partiront bientôt, emportant avec elles les chaleurs estivales et leurs ardeurs écrasantes.

Je préfère l'automne à toute autre saison. Ce temps plein et lent, où la maturation décante les sucs et promet l'essentiel.

Je vous ai livré tout au long de ce "bloc" nos beaux paysages, nos modestes activités, et des bribes de notre histoire familiale.
A Agorreta, il y a eu comme ailleurs des drames, des noirceurs, et de beaux éclats de lumière.
Mes investigations n'ont pas ramené au jour de ces drames tus et lourds qui marquent au fer rouge des blessures profondes dans les chairs et les âmes.
Nous avons eu cette chance d'être épargnés. Pour ce que j'en sais, nos tourments ne sont pas de ceux qui empoisonnent.
Quelques drames, évidemment. Nos vies d'hommes ne peuvent pas en faire l'économie. On ne peut pas être préservés de tout. L'inéluctable s'est invité chez nous comme ailleurs.

Pourtant, en regardant cette histoire depuis bientôt presque un siècle, plus de clarté saine et vive que d'ombres mauvaises.
Une chance, une grande chance.

Je m'apprête à revisiter cette simple histoire familiale, à la lumière de cet enseignement que mes investigations m'ont livré. Je vais reprendre nos péripéties à ce nouvel éclairage. Et voir où ça me mène. J'ai confiance.

Nous ne sommes pas des taiseux, à Agorreta. Nous ne ressemblons pas à ces paysans taciturnes à la parole rare et aux souffrances enfouies.
Nous n'avons pas pour autant l'usage de porter nos sensibleries en étendard. Il y a peu d'effusion dans nos rapprochements. Peu de plaintes aussi, sur nos douleurs intimes.

A Agorreta, on crie, fort, on parle, souvent mal. On se libère. On évacue. On insulte plus facilement que l'on ne complimente...
Les transpositions et les décalages, les ironies et les sous-entendus, nous adorons !

Ce "bloc" en est une illustration.
On peut en faire une lecture littérale et innocente. Comme on peut regarder un paysage et s'en contenter.
Pour ceux d'ici, évidemment, pour moi qui l'ai écrit, un sens transparaît dans ces allégories maladroites. Enfin, je dis maladroites, pour m'essayer à la modestie. Dont je manque totalement, je le reconnais sans humilité !

Ces paroles biaisées peuvent être interprétées comme une sorte de sournoiserie. Un masque derrière lequel je me protégerais. C'est vrai.

Mais elles peuvent aussi révéler la pudeur, le besoin de distancer les vérités.
Je vous ai, je crois, parlé déjà, de ces tragédies grecques, où, sur des scènes de théâtre, se jouent des drames reflets d'une réalité déminée par ce jeu de transposition.

C'est le sentiment que j'ai. Celui de "dépolluer", de "déminer", exactement. Pour pouvoir m'approcher des choses suffisamment, les comprendre et en tirer l'enseignement, sans m'y blesser trop.
Ma tentative est peut-être vaine. Peut-être faut-il tomber les masques et avancer à mains nues pour plonger dans la fange et enlever la boue qui brouille l'eau des mares immobiles.

Je ne manque pas de courage, et, quand il l'a fallu, j'ai su avancer, et affronter.
Je trouve simplement plus... confortable, de mettre une distance pour mieux considérer les choses. Pour me préserver, et préserver aussi les autres, en leur donnant une réalité édulcorée à flairer.
C'est une tentative de subtilité peut-être complètement avortée. Je prends le risque !

Dernièrement, toujours concernant ces affaires de terrorismes, ces agissements qui interpellent forcément en nous notre idée de l'humain et de son comportement, un ministre je crois, disait :

 - "essayer de comprendre un tel acte, c'est déjà l'excuser".

Ou quelque chose d'approchant, d'après ce que j'en ai retenu.

Je ne suis pas d'accord avec ça.
Je pense que l'acte et sa motivation doivent se considérer séparément. Essayer de comprendre, ce n'est pas justifier. Le crime, dans un registre plus quotidien, la bassesse, la vilenie, la mesquinerie, seront toujours condamnables. Et condamnés.

Mais il y a un enseignement à tirer de l'observation bienveillante du comportement de ceux là que nous côtoyons. De ceux-là qui nous agressent, et nous blessent.
Bienveillante ne signifiant pas béate. Mais bien, veillant de la bonne manière. Vigilante, sans à priori de méfiance. Cette méfiance, cette peur de l'autre qui nous brouille la vue.
Nous devrions, je le crois, être particulièrement attentif à ces peurs que réveillent en nous les autres. 
Vous l'avez sûrement déjà remarqué, on soupçonne volontiers l'autre de ce qu'on peut se reprocher à soi-même, sans se l'avouer clairement.
Un menteur chevronné aura du mal à croire en la sincérité de celui qui lui parle. Un manipulateur se croira vite victime de cette même manipulation.
Nous sommes tous faillibles, et capables de bassesses. Ces résonances en nous de nos failles doivent nous alerter, et nous amener à nous en débarrasser.

Comme cela semble facile, dit comme ça !

Pourtant, le cheminement est long et confus. Voyez ce "bloc" désordonné et alambiqué...
J'ai cherché depuis ces bientôt deux dernières années à extirper de mon esprit ces petits démons habiles. Ceux-là qui nous mentent si bien et nous embrouillent. 
J'ai puisé dans notre histoire familiale, dans la terre d'ici et auprès de mes quelques bêtes, des indices ténus et fragiles.

J'ai cherché à libérer les petits chevaux sauvages qui ne demandent qu'à galoper gaiement.
A les désentraver,  leur laisser libre cours et espace dégagé.


Je sais la présomption d'une telle démarche. J'en connais les écueils et les limites.

Pourtant, j'y crois. Parce-que je le sens comme ça, tout simplement.





Mon liseron bleu ouvre encore une fleur, ce matin. 
Et je suis juste contente de le savoir là, fragile et vulnérable, tenace et vivace.


Très bon dimanche à vous. 
Le chemin est encore long, sans doute. Mais je vois au bout la lumière qui m'appelle, et attire ma marche vers elle. Amen...



















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