mercredi 14 octobre 2015

TU T'ATTENDS A QUOI ?




Bonjour !

Petit matin frais sur les hauteurs d'Agorreta.




On commence à penser à allumer le poêle, quand les vitres s'embuent.




Il fait bon admirer les flamboiements incendiaires des feuillages, au chaud, dans le calme et le silence de la vieille ferme.
Tant d'hivers déjà passés bien à l'abri de ces vieux murs épais.
Tout ce temps, gage de sécurité.
La ferme a résisté à bien des tempêtes et des frimas, elle tiendra encore, longtemps, sans doute.
C'est en tout cas ma perspective et mon espoir !







La vigne vierge sur le mur du hangar résiste, elle aussi.
Elle a perdu une bonne moitié de sa végétation.
Pourtant, elle aussi se pare de couleurs pourpres irradiant une force de vie encore bien présente.
Je l'avais condamnée un peu vite.
Tout de même, une telle amputation, pour une aussi vieille liane, ce doit être un traumatisme difficile à surmonter. Mais bon, pour le moment, ma vigne est encore vivace, et fait son chemin.


Le maître des lieux continue lui aussi sa route. Entêté et tenace. Il y a trois ans lui aussi à cette période de l'année se voyait bien mal parti.
On le pensait fini, pour dire vrai.
Et il est toujours là...

Ce sentiment d'imminence de sa mort annoncée alors, cette fatalité omniprésente depuis, même si le temps passant et l'homme avançant vaillamment les font reculer du paysage quotidien, me sont entrés dans la moelle.
Je n'arrive pas à m'en défaire. L'évidence de l'âge est incontournable. Mais mon père paraît en très bonne santé, meilleure même qu'avant cet épisode critique.
Rien à part sa vieillesse n'augure sa mort, pour tout dire. Pas plus que la mienne ou celle de l'un de mes frères par exemple.

Le coup de fil de ce médecin urgentiste en pleine nuit m'est resté dans l'oreille. Je ne vais pas vous refaire le coup du : cherchez plus haut, vous trouverez ! Moi-même, je ne sais plus où exactement j'ai rangé mes affaires et histoires, alors...
Le spécialiste en question me demandait de rapatrier immédiatement mon père à la clinique, parce-qu'il était en danger de mort. 
Finalement, oui, il vous faudra chercher un peu, parce-que je ne vais pas raconter de nouveau cette nuit si étrange. Un article autour de "il ne mourût pas", je crois.

Ce que j'essaie de comprendre aujourd'hui, c'est en quoi cette épée de Damoclès suspendue il y a trois ans au dessus de ma tête, ne s'écarte pas.
Tous ceux dont les parents vieillissent ont-ils la même sensation que moi ? Je ne le crois pas.

J'ai en tête depuis ces derniers mois que quelque chose va arriver. Et je ne sais pas au juste quoi.
Cette année de "bloc" partagée se termine. J'ai l'impression qu'une époque de ma vie se termine avec elle. Sans pouvoir expliquer davantage.

Il arrive dans une vie des moments, comme ça, où une période se termine et une autre s'enclenche. La fluidité des jours s'étrangle d'un cahot, plus ou moins violent ou prononcé.
L'inflexion n'est pas toujours à angle droit, la courbure peut être plus douce, moins abrupte.
Pourtant, on a le sentiment d'un moment différent, d'une étape bouclée, et d'une nouvelle à commencer.
Une transition dans la continuité modulée, ou une cassure, c'est selon.

Ce cap de mes 50 ans annoncés depuis que j'en ai quarante, y est-il pour quelque chose ?
J'ai eu cette coquetterie de me dire plus vieille que mon âge, toute cette dernière décennie. 

Coquetterie avortée, puisque personne, jamais, n'a relevé, en me disant : 50 ans ?! Non, ça n'est pas possible !! 
Non, non, tout le monde trouvait très plausibles mes 50 ans, quand je n'en avais pas encore 45. Tiens ! prends ça dans les dents !
J'ai toujours eu l'air plus vieille que mon âge, semblerait. Quand j'avais 15 ans, ça faisait bien mon affaire. Aujourd'hui, je me passerais évidemment de ces années ajoutées à mon pedigree...

Mes introspections ne datent pas d'hier. Mon goût pour les recherches vagues quoique attentives, des histoires, familiales ou autres, je l'ai toujours connu.
Je vois bien la finalité de ces explorations : je cherche un enchaînement, un sens, caché ou tu, une justification à la trame de l'existence, et de la mienne en particulier.
Une façon de nier le hasard pur, l'inconnu, le néant et le rien  inexplicables, par essence.

C'est désagréable de se sentir impuissant et voué à n'être qu'un fétu de paille ballotté au gré de vents capricieux et sans but.
L'idée pourrait m'alléger de toute responsabilité. Je me dirais : quoi que je fasse, quoi que j'entreprenne ou élabore, tout est voué à se perdre dans un aléatoire complet. Alors, ma foi, plus besoin de me casser la tête ! Je fais comme je le sens, et je ne cherche pas plus loin.

Oui, je pourrais... Tout le monde le pourrait. Et pourtant, peu le font, n'est-ce pas ?
Nous sommes pour la plupart corsetés dans cette illusion que nos actions, nos pensées, nos vies, ont un sens, une utilité.
Et nous nous accrochons ferme à ce garde-fou. Nos sociétés s'organisent autour de cette ligne, et, peut-être, ne tiennent que par elle.

Je suis comme ça, moi. Je crois sentir dans la marche du temps une arabesque diffuse.
Et, en ce moment, je pense être dans un tournant, engagée dans une spirale dont l'issue me conduira vers une autre perspective.

Je ne m'attends à rien de particulier, rien de définissable. Je suis prête, sans savoir à quoi.

Limpide, tout ça, n'est-ce pas ? Les eaux troubles ne sont pas ma contrée de prédilection, pourtant. Quand, dans le même temps, une vie sans remous paraît morne et plate.

Le temps parlera, comme disent les sages...






Les chemins les plus ombragés mènent aussi à la douce lumière.

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