mercredi 2 mars 2016

TEMPS D'ATTENTE




Bonjour !




L'inter-saison est agitée, cette année.
D'une agitation morose, et désagréable.
Pas vraiment froid, pas beau non plus, tourmenté sans grande colère. 
Une période où l'on attend, la venue du printemps, des temps meilleurs :







Primevères chafouines d'avoir été détrempées,
bourgeons du figuier gonflés mais en attente, là encore, de soleil et de meilleure lumière, pour éclater.










Nous attendons, donc, puisqu'il faut attendre, comme disait l'autre...

Le temps de l'attente n'est pas ce que je vis de mieux. Je manque de sérénité, encore maintenant, pour savoir attendre, sans contrariété.
Je suis de nature un peu impatiente, impulsive, mieux tournée vers l'action immédiate. Les délais, les atermoiements, me sont petites souffrances mesquines. 
L'objectif pointé en ligne de mire, j'aime y avancer droit et sans retard. Je me distrais difficilement d'une tâche en prévision. L'ajournement ne m'est pas posture familière. Laisser pour plus tard ne me séduit pas. La plage du temps blanc de l'attente m'est un horizon morne et sans attrait.

Pourtant, souvent, je dois me contraindre à ce dépit. Je ne maîtrise pas tous les éléments des avancées de mon périmètre. 
Les circonstances, les conditions, les aléas, événements et fortuités s'amusent avec taquine récurrence à titiller mes impatiences. Tels la mouche têtue revenant se poser sur le dos d'une main qui la chasse avec tous les signes du plus vif agacement, les sorts contraires m'infligent leurs tourments.

Mes attentives observations des cycles naturels apaisent  les hystéries de mon tempérament.
Les saisons et leurs danses répondent par leur désinvolture à mes élans contrariés.

Cette année, comme souvent, le printemps s'annonce, puis s'éclipse en des journées maussades, ou tempétueuses.
Le paysan s'apprête à préparer sa terre, mais doit attendre. Que les pluies drues cessent assez longtemps pour que les sols se ressuient. Que le soleil de plus en plus haut réchauffe les croûtes battues et les rendent friables.

Les bêtes à l'étable attendent aussi le temps de la sortie au pré.








Fauvette est maintenant lourde de son petit. Son flanc long s'arrondit en courbes luisantes.
Elle m'a parue un peu engourdie, ces dernières semaines, puis, une petite cure d'aspirine me l'a soulagée de ses inconforts.
Elle sera à terme à la fin du mois. Son pis commence à peine à se renfler.

Les deux petites croissent et embellissent sans souci. La brune et la rousse restent joueuses, mais la placidité de leur race les assagit.

Notre Bigoudi, elle, persiste, taquine et malicieuse. Toujours curieuse et à l'affût des mouvements dans l'étable, elle s'agite vite, mais sans nervosité. Elle vêlera, elle, autour de la mi-avril, si tout va bien.
La toujours tranquille Pollita est la plus près de la délivrance, en principe. Deux trois semaines encore de gestation, et nous devrions voir son deuxième veau, après Rubita l'année dernière.
Sa silhouette ne s'est pas trop modifiée. Son petit loge en elle sans paraître. Elle n'est ni gênée, ni inquiète. Une vraie grande reine, ma Pollita bigarrée.

Là aussi, j'attends des jours meilleurs pour les sortir au pré. 
L'herbe n'est pas encore en pleine pousse. Elle ne risque pas d'engorger les délicats systèmes digestifs de mes vaches par un trop brusque apport de nutriments gorgés de sève montante.
Je ne veux pas non plus risquer un mauvais mouvement dans la fébrilité de la première sortie. Mes trois grandes, rondes et pleines, pourraient prendre mal en se mettant à courir brusquement après plusieurs mois d'inactivité.

Si le temps ne s'améliore pas dans les deux prochaines semaines, je vais devoir attendre deux semaines après les vêlages pour la mise à l'herbe. J'ai de la betterave, du navet frais et du foin en suffisance pour les nourrir à l'étable jusque là. Par contre, à ce moment là, l'herbe sera devenue haute, et il va falloir veiller à rationner la pâture, pour éviter les accidents de digestion, à un moment où les jeunes mères sont plus vulnérables.
C'est tout un calcul, ce petit élevage, sans qu'il n'y paraisse, n'est-ce pas ?

Ce temps d'attente est incontournable. La nature se moque de mes trépignements. Je vais devoir composer, avec elle, et avec moi. Me plier à ses caprices, et raisonner les miens.

Je suis comme beaucoup, persuadée de la légitimité de mes bonnes volontés. Et vite désappointée de leurs limites trop étroites à mon goût.

Bah ! Je vais faire comme mes vaches me l'enseignent. Ruminer placidement les sucs de mes espérances ajournées, et regarder le vent pousser les nuages dans le ciel agité.

Attendre, patienter, et méditer...

A une prochaine fois, et portez-vous sereinement, vous aussi, d'ici là !







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