vendredi 28 août 2015

RETOURS EN ARRIÈRE...




Bonjour à tous les suiveurs de ce "bloc",  et bienvenu au visiteur égaré ici par hasard.

Cette dernière semaine d'Août s'écrase sous la chaleur, allégée tout de même d'une taquine et bienheureuse petite brise d'est.
Aux premières heures de l'après-midi, il fait bon rester dans l'ombre de la vieille ferme, les chiens affalés sur le carreau frais.

J'en reviens à ma réticence à vouloir ces jours-ci me refaire le film de ces années passées, ces années de mon enfance et de ma jeunesse.

L'évocation de mon histoire familiale, l"exhumation" de ces vieux  objets, témoins émouvants de mon passé, resurgis de leur gangue poussiéreuse, m'ont amusée. Parler de ces gens et de ces choses m'a plu.

Pourtant, je n'ai pas envie immédiatement de replonger dans ce quotidien plus récent, et pourtant déjà assez lointain, où mon petit personnage apparaît dans l'histoire.
Évoquer mes parents, mes grands-parents, vous montrer la vieille étable et la marmite d'époque, c'est parler de ce passé-là, bien-sûr, mais sans parler de moi, de cette petite enfant d'alors.

Ces retours en arrière nous mettent le doigt sur le temps écoulé, toute cette durée déroulée derrière nous déjà.
Et tout ce temps passé, se déduit mathématiquement de notre temps à vivre, n'est-ce pas ?

Notre temps de vie est compté. Si l'on croit à une destinée, il le serait dès le départ. Si l'on est adepte du pur hasard, il le sera à son terme.
L'une ou l'autre proposition ne change pas grand chose à l'affaire, sauf à nous soumettre à un tracé dessiné, ou à nous exonérer de toute responsabilité dans ce cheminement.

Nous savons qu'un jour, proche ou lointain, notre temps aura passé.
Cette réalité pure et dure ne s'admet pas tous les matins de la même manière. Une mauvaise nuit, une digestion difficile ou une petite blessure d'amour-propre, fragilise notre faculté à continuer de vivre en connaissant cet éphémère passage entre deux gouffres d'inconnu.

Notre ignorance nous plonge parfois dans un effroi terrible. Les croyances habillent mal les doutes, la foi est difficile à maintenir.
La difficulté à se colleter à cette vérité est grande, et notre fatalisme fragile.

Tout de même, les plages d'insouciance s'étalent sous nos pieds comme du sable tiède à fouler, et la vie semble douce, certains jours.

Nous arrivons à prendre la distance avec notre sort et sa misère.

Nous le savons tous, un jour, nous ne serons plus. Cela est.
Mais aujourd'hui, nous sommes là. Et jusque là, nous avons été.

La possession de ce passé et de ce présent nous console de l'incertitude de l'avenir.
Nous nous accrochons à notre histoire, nous nous y fondons, nous la revendiquons.

Notre ambition est souvent de marquer ce passage, de graver cette trace dans la marche de ce temps qui nous échappe, inexorablement.
Nous faisons des enfants, nous bâtissons des maisons, j'écris des mots.
Nous cherchons à perdurer, à laisser pour le futur quelque chose de nous, pour quand nous n'y serons plus.
A l'échelle du temps universel, nos tentatives sont évidemment pathétiques, pour la plupart. Beaucoup sombrent dans l'oubli de tous, quand si  peu restent dans le souvenir commun. 

Ma modeste existence ne changera sûrement pas la face du monde. Elle s'y inscrira sans creuser de sillon, comme un simple galet roulé dans l'eau vive.

Je suis comme la plupart d'entre vous, sans doute : je cherche à me justifier, de mes actes, et, plus largement, de ma vie.

Pourquoi cette aspiration à trouver un but, une raison, à son existence ? Une explication à cette vie donnée ?
Y dénicher une signification ? Se découvrir un droit à vivre pour nier le néant et l'absurde, insoutenables ?
Ou alors se masquer la culpabilité d'être vivants quand tant ne naissent même pas ?  Quand trop meurent trop tôt ? 
S'autoriser à vivre à la place d'autres ? Et ne pas s'en sentir coupables...
Ne pas s'en vouloir de ne pas faire mieux de cette immense chance à nous offerte, de cette opportunité d'être en vie ? De vivre si peu, si plat, si petit...

Tout cela est confus, et, pourtant, je le sens, tout cela s'agite au fond de chacun de nous. 

Nous sommes là, jetés sur une scène,  sans avoir rien demandé, ni choisi.
A nous demander pourquoi, jusqu'à quand, et comment.

A refuser l'absurdité de cette incontestable réalité : un jour, tout s'arrête, sans raison, et, tout comme nous sommes là, ce jour là, tout simplement, nous n'y serons pas.

Il n'y a pas plus de raison de vivre qu'il n'y a de raison de mourir, dirait-on.
Comme il n'y a pas davantage de mérite.

Nous naissons d'une pulsion. 
Nous devrions mourir d'un abandon.

Vieillir, c'est renoncer, à sa jeunesse, à des idéaux inatteignables. Se préparer à vivre moins vivant, à mourir sans trop de regret.

A quoi bon chercher à comprendre et à durer, à travers un souvenir imparfait ?

Si nous sommes fruits de hasard, ou acteurs aveugles d'une construction que nous ne saisissons pas, nous ne maîtrisons pas notre temps.
Et devrions nous consacrer à le rendre agréable. Au lieu de  chercher à le prolonger au travers d'autres aussi vulnérables que nous.

Voyez, aujourd'hui  encore, l'eau fluide de ce temps passé ne me semble pas devoir être retenue.
D'autres moments encore viendront, où j'y trouverai avec plaisir des reflets chatoyants.

Ne m'en veuillez pas, je n'ai aucune discipline. 
Je suis mortelle, je le sais. 
Mais au moins, vivante, j'ai cette liberté de laisser aller mes pensées. Ou, plus exactement, de ne pas chercher à résister à leur flux aléatoire et sans logique.

Ce "bloc" est une dérive, un parcours sans but ni raison autre que de tracer ces instants comme ils viennent à moi.

Je veux ce parcours léger et gai. Il l'est parfois. Et quand il devient plus grave, j'essaie de ne pas chercher à éviter cette juste ombre.
Elle fait partie de nos vies, et ne se peut pas éviter.

A bientôt les amis, à d'autres étincelles de lumière et de joie. Puisque toujours, à un moment ou un autre, elles arrivent jusqu'à moi, encore.




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