dimanche 9 août 2015

LA BÊTE HUMAINE, OU L'HUMAINE TROP BÊTE ?



Suiveurs fidèles ou occasionnels visiteurs de ce "bloc", bonjour et bienvenus à tous !




En ce jour de Fête Basque Hendayaise,  le temps n'est pas vraiment de la partie...

De sombres nuages roulent leur menace, éclipsant les percées d'un soleil bien pâle.















La baie veut y croire.
Les tambours retentissent.
Après tout, la fête, c'est d'abord un état d'esprit, n'est-ce pas ?

Et ce ne sont pas quelques averses qui vont doucher les enthousiasmes.
Les enthousiastes, oui, douchés, ils le seront, mais garderont sûrement suffisamment d'ardeur pour se réchauffer autrement les cœurs !


Je n'en serai pas, à mon ordinaire. Je verrai partir de la ferme les tracteurs nettoyés pour l'occasion, mobilisés pour tirer les chars décorés du défilé traditionnel.
Le coin se videra de tous les jeunes, et moins jeunes, habillés en costumes traditionnels pour la plupart.
Je suis contente de leur joie, et la partage, sobrement, de loin.


De mon côté, je vaquerai entre mes rangs de betterave. Je les éclaircis au fur et à mesure de leur pousse. Les vaches mangent avec plaisir ces jeunes têtes tendres aux feuilles craquantes.





Le bon espacement, c'est celui-ci, une quarantaine de centimètres entre chaque pied.

Les feuilles couvrent le terrain, et les têtes peuvent se développer à leur aise, en dessous.










En partant de mon semis beaucoup trop dru de début juin, où j'avais jeté dans les rangs clairsemés toutes mes graines de la dernière chance, il a fallu intervenir souvent, pour parvenir à ce résultat idéal.
Ces jours-ci, je prélève les surnuméraires, pour en faire profiter mes belles...








Ma citrouille "carrabosse"  est plus cabossée que jamais.

Une grosse bête est passée dernièrement dans mon carré de courges.
Certaines lianes ont été malmenées.
Dieu merci, les gros fruits n'ont pas été touchés.
Mais nous ne sommes pas à l'abri, encore, loin de là !
Mes citrouilles restent au champ jusqu'en novembre. Elles se montreront à mesure du dessèchement de la végétation.
Pour le moment, seules les grosses sont repérables. Et repérées, vous pensez bien !
La bête visiteuse avait bien quatre pattes. Je l'ai facilement vérifié sur la terre mouillée. Je me méfie davantage de celles à deux pieds... Et il s'en trouve, aussi !


L’événement marquant de la semaine, a été le départ pour l'abattoir de mes trois génisses.
Il me faut faire de la place pour les petites, et pour les trois autres, à venir encore, si tout va bien :





Galzerdi et Rubita sont maintenant trop grosses et turbulentes pour pouvoir se faufiler dans l'étable entre les grandes.

Il leur faut une place attitrée.
Au passage, remarquez l'évolution de la robe de Galzerdi.
Elle était née, brune, puis avait viré chocolat roussi.






Les deux petites tournaient à la châtaigne.
Avec, pour Galzerdi, son cœur blanc au milieu du front, et ses chaussettes immaculées.

Maintenant, Galzerdi a foncé. Elle a repris  son velouté sombre de naissance, et les deux petites vêles sont bien différenciées.
J'aime bien, avoir un troupeau à coloris variés. Cette évolution me plaît.






Voici la stalle préparée pour elles.
Une place suffisante, elles sont tout à fait à leur aise là dedans.
Un abreuvoir pour deux, une mangeoire chacune, fixée assez bas.
Elles sont trop petites encore pour arriver à l'auge.
J'ai disposé deux cales en bois à l'avant, pour les surélever, et elles savent déjà s'y hisser pour atteindre le foin.






Les trois futures mères, un peu bousculées par ces chamboulements,  vont très vite reprendre leurs habitudes.

Les deux grandes, Pollita et Bigoudi, sentent leurs petits près d'elles.
Et Fauvette, ma foi, n'est pas mécontente de disposer d'une meilleure aisance en son logement, la bougresse !

Passé le premier jour de la séparation, le destin des trois autres ne les chagrine pas davantage.
J'essaie de cultiver leur détachement, sans y arriver, cependant.

Je ne suis pas spécialement sentimentale, en la matière. Mais un éleveur, même endurci, ne fait pas tuer une bête qu'il a élevée, justement, sans un petit pincement.

Et moi, je ne suis pas une éleveuse endurcie. Je soigne mes bêtes attentivement, et je partage avec elles mon quotidien. A la ferme Agorreta, vous le savez, bêtes et gens vivent ensemble.

L'étable est la pièce principale de la maison, celle où je passe le plus de temps. Les visiteurs passent par là pour entrer, et, pour peu qu'ils se montrent un peu intéressés, la plupart du temps pour nous faire plaisir plus qu'autre chose d'ailleurs,  nous nous y attardons volontiers.

J'ai toujours vécu au milieu des animaux. Mes préférés étant les chiens, et les vaches.
Evidemment, leur durée de vie est plus courte que la nôtre, et, en principe, on voit mourir quelques générations de vaches et de chiens, durant une vie d'homme.

Je garde le souvenir confus ou plus précis de certaines de ces bêtes, et l'ensemble de ces images m'accompagne amicalement.
Des naissances, des éducations, difficiles ou non, des caractères, des particularités. Tout un ensemble de choses, transformées et déformées par mon regard orienté d'humaine.
Ma relation aux animaux a toujours été affective, émotionnellement un peu outrée sans doute.

Je nourris et je soigne des bêtes, et j'ai l'impression d'en recevoir une gratification en retour. La gratification de voir croître et embellir une jeune génisse, de l'accompagner quand elle donne naissance, de la soulager quand elle souffre et de lui assurer une bonne vie.
La gratification de mériter sa confiance, d'obtenir d'elle qu'elle me tolère à ses côtés au-delà de son atavisme sauvage plus ou moins refoulé.

L'équation est simple et franche : je m'acquitte bien de mon rôle, en respect et conscience, et je suis récompensée en retour.
Je dois tenir compte des exigences économiques, et la performance se mesure aussi en argent. Une génisse vendue pour sa viande se paie au poids. Et ce poids est la sanction d'une bonne conduite d'élevage.
Je ne recherche pas le profit à tout prix. J'ai besoin de rentrer dans mes frais, et je me contente d'arriver à équilibrer cette balance.

Cet aspect économique, cette facette rude et froide, c'est le côté sombre de cette activité, pour moi. Je m'y astreins, par nécessité.
Sans faire de sensiblerie, parce-que c'est dans l'ordre des choses bien menées.

Il m'arrive de penser, et de m'entendre dire, aussi, que ma relation aux bêtes est une compensation de ma frustration de mon manque de relations sociales.
Je rechercherais auprès des animaux les satisfactions que je ne trouve pas dans la société humaine.
Le fait est que j'apprécie infiniment la simplicité et l'absence de sophistication chez la bête.
Autant que je déplore la complexité et les nuances alambiquées et diffuses chez l'humain. Tout en admettant mon intérêt pour cet humain et ses complications.
Je ne comparerais évidemment pas les satisfactions procurées par mes échanges avec mes semblables avec les plaisirs de la compagnie des animaux.

Je dis seulement que je me méfie moins d'un animal que d'un hominidé. Sans perdre de vue la possibilité d'une réaction négative d'une bête domestique mais néanmoins issue du monde sauvage, j'ai l'impression de mieux comprendre les mécanismes animaux.

L'humain me déconcerte. Il m'intrigue et m'inquiète.

Je me fie mieux à l'instinct animal. Trop peut-être, au point de surveiller le comportement  de mes bêtes en présence de quelqu'un, et de le jauger à l'aune de cette approche mutuelle. Honte à moi ! Et pourtant, je tiens toujours compte de cet enseignement, aussi aléatoire puisse-t-il être...

Aurais-je perdu la notion de rationalité humaine, à trop côtoyer la bête ?

Peut-être...

A travers ce "bloc", je reviens vers les miens. Par l'intermédiaire de ce "Veb" impudique et voilé.
Tout de même, je n'ai pas oublié quelle est mon essence !

A une prochaine fois, amis des Nouvelles d'Agorreta. 
Ne vous y trompez pas, je vous recherche plus que je ne cherche à  me préserver de vous. J'ai davantage besoin de vous que je ne vous crains.  Je suis bête, un peu, sans doute, mais pas bien sauvage...


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