lundi 27 juillet 2015

EN AVANT LE RUTABAGA ! PHASE 1



Bonjour fidèles et occasionnels visiteurs de ce "bloc" !

Quel bienfait, cette douce pluie de mercredi dernier !
Nous nous désespérions, non sans raison, de l'aridité de la saison. Et, enfin, ce mercredi, une saine et bienfaisante pluie nous est arrivée.

Une véritable merveille, tombée en grâces du ciel.
Toutes  mes modestes cultures en ont fait profit, évidemment.
Et j'ai pu, avec un léger retard d'une dizaine de jours, semer mon choux-navet fourrager.

Ce matin encore, l'humidité nous est gracieusement offerte, en une silencieuse bruine ouatée.




On ne peut demander mieux pour mon semis de rutabaga, autre appellation un peu exotique de ce fameux choux-navet.

Vous connaissez la maison  Agorreta maintenant.  Pour ce modeste travail, même pas un are à préparer, tout et tous ont été mis à contribution : hominidés présents sur le site, ingénierie mécanique de la grande époque.  
Il y avait forces interventions et intervenants, vendredi après-midi, sur les hauts d'Agorreta !
Nous aimons bien, donner le spectacle d'une activité d'importance. Et puis, ça dépoussière un peu nos vieilleries du hangar : charrue, "rotavator", herse, tout y passe !





Et chacun sa partie dans la manœuvre, évidemment.















Mes frères se chargent de la séquence mécanisée.
Ils aiment bien, ce genre de petits travaux ruraux.
Et moi, adroite comme je le suis à la conduite des machines, je ferais un joli ravage en peu de temps, si je m'y mettais !
Alors, je préfère, et de loin, les laisser faire.







Résultat de toute cette agitation, un coquet carré, maintenant ensemencé, et idéalement arrosé.

Si tout va bien, dans quelques jours seulement, je pourrai déjà vous montrer les petites plantules de ces crucifères protéagineuses, pour le dire plus simplement, les choux, quoi !
Ce petit "crucifère protéagineuse", je vous en ai parlé plus haut, j'adore me le rouler en bouche, comme ça, pour le plaisir du son.



A part ce petit rattrapage du décalage saisonnier, le secteur est calme, ce matin.
Ma rousse Fauvette ne manifeste aucun signe de fébrilité hormonale, pour le moment. Ne nous réjouissons pas avant l'heure, et souvenons-nous du pied-de-nez de Bigoudi, dernièrement.




Observons la bête à la pâture, observons-la, à l'étable, à la rentrée, à la sortie. 
Laissons-nous quelques jours, avant de déclarer quoi que ce soit !










Notre maquignon maison, Marcel de son petit nom, est venu nous rendre visite, vendredi.
Il a considéré mes vaches d'un œil expert, et les a trouvées "prêtes". A être vendues en boucherie...
C'est un peu rude évidemment, pour ces belles que je couve tendrement. Mais je connais la réalité de ces choses et je m'y plie.
Je dois vendre une ou autre bête, pour nourrir les autres d'abord, et faire la place aux petites dernières-nées :




C'est la règle, dure mais incontournable...

Pour Fauvette, son sort se décide là. Soit elle sera mère, et vivra de longues et belles années encore à Agorreta, soit, elle partira, et finira dans une ou autre assiette.
Pas plus de sentimentalisme que l'on ne peut s'en permettre.

Une autre qui a failli voir sa vie écourtée ce matin, c'est ma follette Bullette :

Vous la voyez ici en situation de choc post-traumatique aigu.
Je lui permets à des fins de réconfort " récupératif " certaines privautés de comportement.

En milieu de matinée, je l'entendais aboyer dans le champ où Zaldi a ses appartements de jour.





La chienne a cette mauvaise habitude, d'aller importuner la jument, en lui tournant trop près des sabots.
Elle l'énerve de ses aboiements agaçants.

La bête n'est pas méchante, mais sa patience a des limites.
Le plus souvent, elle s'éloigne d'un galop élégant en soulevant haut sa queue blanche.
Mais, parfois, elle fait front, et tourne sur elle-même en agitant bas la tête, et en allongeant quelques ruades.
Jusqu'ici, ma Bullou a toujours évité un mauvais coup. Une fois, je l'ai quand même ramassée les quatre pattes en l'air, figée. J'étais sûre qu'elle était morte, et je m'apprêtais à devoir l'enterrer. Quand je la pris dans mes bras, toute raide, je la sentis vivante, et, à ma grande surprise, et ma très grande joie, surtout, elle se remit sur pattes quand je la posai au sol.

Ce matin encore, quand je l'ai entendue couiner un Kaïe de très mauvaise augure, je me suis précipitée, craignant de la trouver morte.
Elle avait été touchée, au cou, mais revenait en rampant sous la clôture, encore une fois sauve.
Elle n'a pas demandé son reste pour aller se terrer dans la chambre, et n'en plus bouger d'un bon moment !

Ah, cette Bullou, si intrépide et peu prudente...

La vie tient à si peu, souvent. Un millimètre, une bonne averse de pluie, deux cellules microscopiques qui se trouvent ou se manquent...
Une jeune hirondelle est tombée du nid, cette nuit. je l'ai retrouvée morte à l'aube. Là encore, une poussée, une glissade, une fraction de seconde, et tout a basculé, dans le vide, et le néant.

Mes semis, mes bêtes, mon père, tout et tous, nous vivons d'une trame complexe et fragile, de hasards et de caprices.
L'arbitraire nous laisse impuissants. Et nos croyances nous divertissent mal de cet effroi. 
Les rythmes récurrents et les rites que nous y attachons nous rassurent.

Et nous vivons, confiants tout de même. Parce-que c'est la seule issue pour rester vivants, justement.

A bientôt, suiveurs des nouvelles d'Agorreta, puisque tant que nous sommes là, nous continuons de nous intéresser à ce qui nous arrive... petites choses semées comme les petits cailloux pour marquer un chemin.

Que la route nous soit encore longue et agréable à parcourir !

mercredi 22 juillet 2015

AU FEU ROUGE, ATTENDEZ QU'IL SOIT VERT, ET TOURNEZ A DROITE...




Amis suiveurs du "bloc" d'Agorreta, bonjour !

En titre aujourd'hui, je reprends les directives d'une cliente truculente d'hier.
Une petite bonne femme, vive et alerte. Consumée d'anxiété.
Il lui a fallu un moment pour intégrer que nos devis étaient estimatifs, que nous devions tenir compte d'éléments fortuits et impossibles à cadrer d'avance.
Ce genre d'approximation ne lui plaisait pas, mais alors là, pas du tout !
La petite dame était resserrée sur elle,  strictement contenue dans un calendrier et des horaires qui lui tenaient lieu de corset. L'improvisation et les contre-temps, c'étaient ses bêtes noires...

Nous avons enfin convenu d'un protocole d'intervention qui sembla, à défaut de la contenter, s'approcher du moins assez de ses créneaux pour qu'elle l'admette.
Et c'est au moment de me donner dans le détail, vous pensez bien, les indications géographiques pour me rendre chez elle, "sans perdre de temps", !, qu'elle me précisa donc qu'au feu, il fallait "attendre qu'il soit vert, pour tourner à droite".
C'est peut-être une tournure très courante. Pour ma part, c'est la première fois que je l'entends. Et elle m'a semblé si savoureuse que je vous la partage ce matin, comme un gâteau tout chaud sorti du four.
C'est tout à fait sensé, mais ça dénote du vertigineux besoin de sécurisation de la petite dame,  au point que cela me fit éclater de rire.  Elle aurait pu s'en offusquer,  même avec les précautions que je pris pour lui expliquer ma réaction.
Ma cliente étriquée ne l'était tout de même pas au point de ne pas percevoir ma bonne foi. Sans partager mon rire, ça l'aurait menée un peu loin de son aire, elle me sourit gentiment, et je perçus dans cette relaxation de son visage un espoir de rémission pour elle.

C'est un vrai théâtre, notre jardinerie, et les clients en sont des acteurs plus inattendus que sur les meilleures scènes...


Revenons à Agorreta, en ce matin gris, mais toujours sans pluie !





Quelques averses ont rafraîchi l'atmosphère, c'est vrai. Même, hier, en milieu de journée,  une bonne pluie nous a rappelé que ça pouvait arriver, encore...





Mes rangs de betteraves thésaurisent au maximum les gouttes, en les faisant rouler sur les feuilles capitonnées,  jusqu'au cœur.
La betterave aime le sec, paraît-il. Cette année, elle est servie !
Au moins, ces grosses chaleurs découragent les pucerons, c'est déjà ça...

Il y en a pas mal, de ces jeunes betteraves au feuillage tendre et charnu,  seulement les têtes ne grossissent pas comme elles le pourraient.  Les plus claires sont les plus jeunes, issues de mon dernier semis de début juin, souvenez-vous.  Finalement, ce semis de la dernière chance aura été un succès, même si les conditions climatiques me sont  contraires. Une consolation...









Ma grosse citrouille serait au rendez-vous, elle aussi.
Arrosée, elle ferait déjà le double !

La végétation va la nourrir pour qu'elle grossisse encore, sans doute.

Je la suis comme le lait sur le feu, vous pensez bien !










Au passage dans les parages, je vous montre ce fameux fourgon extirpé d'un mauvais pas la semaine dernière.

Remarquez, nos petits jeunes ne sont pas encore tirés d'affaire : une panne les bloque encore.
Un peu sérieuse même, du genre pièce maîtresse, une histoire de boîte de vitesses, ou quelque chose comme ça.

Cette petite équipée n'est pas comme ma cliente d'hier. La vie ne se programme pas des semaines à l'avance, avec eux. Ils en sont plutôt à régler des problèmes un peu laissés de côté trop longtemps, je crois.
A choisir, ils ne sont pas moins sympathiques, d'ailleurs. Entre les coincés étroits, et les laisser-aller noyés... Un juste milieu, peut-être, s'il s'en trouvait ?

Dans l'étable de la ferme, une autre collusion espace-temps :





Dans plusieurs nids, la seconde couvée d'hirondelles est sur le point de prendre son envol.

Les jeunes oisillons hésitent encore, trop gros pour contenir dans leur habitat, un peu timorés pourtant pour le quitter déjà.










Juste à côté,  les jeunes, issues de la première nichée, se mettent à bâtir furieusement.

Ils prélèvent de la terre, de la bouse de vache, ils ont tout ça sous l'aile sans aller bien loin.

Avec des brindilles de foin, là encore très à portée, ils confectionnent l'amorce d'un nouveau nid.

A Agorreta, des nids d'hirondelles, il y en a déjà une vingtaine.
Chaque printemps, les nouveaux arrivants rafraîchissent les logements des années précédentes.
Là, cette cuvée 2015 doit être particulièrement bâtisseuse. Une jeunesse en recherche de concrétisation, de construction, de matérialisme pur et dur.

Je ne sais pas si dans leurs petites cervelles d'oiseaux, ils se projettent dans le futur, et œuvrent pour l'année prochaine. 
Ou s'ils se lancent comme ça, pour occuper le creux, en attendant le départ dans un mois environ.
Ils n'auront jamais le temps de faire des œufs, de les couver, et d'élever leurs petits.
Ils m'intriguent, ceux-là, et je vais suivre ça aussi de près...

Mon père n'a pas d'idée sur la question.
Pour l'heure, il est occupé à chasser le bourdon. Pas la neurasthénie de l'humeur, non, non, le gros bourdon vibreur.
La vigne vierge en est remplie, et les hordes vrombissent sourdement quand on s'en approche.






Tiens, de la vigne vierge à mon volubilis, il n'y a qu'un pas.
Et, pour cette pauvre liane, de vie à trépas, vendredi dernier, il s'en est fallu d'un cheveu !

Une débroussailleuse trop zélée me l'a décapitée derechef !

Têtue et tenace, elle est repartie à l'assaut, la pauvrette.





Ainsi vont les choses. Un idéal les tire vers un avant que nous ne comprenons pas toujours.
Regardons-les faire, nous verrons bien où elles se mènent, à défaut de savoir où nous allons nous- mêmes...


vendredi 17 juillet 2015

LA CONFRÉRIE DES MESNIERES




Me revoici pour vous raconter mes petits déboires d'oreilles.

J'ai essayé le terme "oriculaires", mais ça n'a pas l'air d'aller. Auriculaire, c'est en rapport avec le petit doigt, ce n'est pas ça du tout.
Il me semblait bien, pourtant, qu'on disait "oriculaire"...  Je me trompais, alors !

Qu'à cela ne tienne : je vous parle quelquefois de mes oreilles, et de leurs défaillances.
Vous connaissez peut-être, ce syndrome de Mesnières. Et, si vous ne le connaissez pas,  sachez que vous ne perdez rien, loin de là !

Ce Mesnières, pas Meunière, comme la sole, était docteur, en son temps.

Il s’intéressait en particulier aux affections de l'oreille, (faute de le dire mieux),  en lien avec l'acoustique et l'équilibre. Ca n'a l'air de rien, comme ça, une oreille humaine : un lobe sympathiquement charnu, un pavillon plus ou moins élégant, et, très vite, un labyrinthe assez alambiqué de vésicules, de canaux et de cristaux en suspension dans des liquides, se promenant là dedans.
Un mécanisme d'horlogerie fine et délicate.
Je me suis fait expliquer grossièrement tout ça, et je vous livre ce que j'en ai retenu, pour ma commodité, sans prétendre à l'expertise, vous me connaissez, maintenant.

Sous ce terme de Syndrome de Mesnières,  les spécialistes regroupent tout un tas de phénomènes plus ou moins parents. 
Et la plateforme commune de tous ces phénomènes on ne peut plus désagréables, rallie des sensations de vertiges, avec pertes d'équilibre allant jusqu'à la chute, des nausées, des tintements persistants dans l'oreille, indépendants de tout bruit extérieur, une impression de poids sur le côté, une compression gênante dans la tête.

Vous le voyez,  tout un ensemble de sensations dont on se passerait. Imaginez une gueule de bois carabinée, qui dure parfois plus de douze heures, sans que vous ayez touché à la moindre goutte d'alcool.
Evidemment, tous ces petits plaisirs surviennent de façon intempestive, et, si les premiers signes sont une alerte, on ne peut pas savoir  s'ils vont se résorber sans aller au delà, ou si le tourbillon est lancé vers la crise finale...

Cette affection ne se guérit pas. On traite au mieux les symptômes, mais pas toujours efficacement, je peux vous le certifier, à mon grand regret.
Depuis dimanche, ma joue droite pesait, mon oreille vrombissait sourdement, et quelques légers vertiges m'obligeaient à m'asseoir au plus vite, si je ne voulais pas me retrouver avec les deux genoux écorchés comme ces enfants turbulents, dont je n'ai depuis bien longtemps plus l'âge.

J'avais repris consciencieusement ma panoplie médicamenteuse censée pallier ce mécanisme d'oreille en bataille.
Rien à faire, ma tête entière s'embrumait, j'entendais de plus en plus mal, et me sentais évidemment de moins en moins bien !
Je vaquais cahin-caha,  tâchant de faire contre mauvaise fortune, bonne figure. Sans trop y arriver pourtant.

Mercredi soir, le pompon !

Mon quotidien allégé pour cause de semi-crise bouclé, je rentre ici, peu après 20 heures.

Et là, branle-bas de combat dans ma pauvre tête brouillassée : tout se met à tanguer,  le sol se dérobe sous mes pieds, comme disait feu mon oncle de Béhobie : à moi les murs, la terre m'abandonne !

Je me laisse tomber en m'accrochant au rebord de la baignoire.  Une nausée en vagues âcres me déverse la tête dans la cuvette des toilettes toutes proches, Dieu merci...
Accrochée à la faïence, je reste là, plus de trois heures, à vomir, cracher, tousser, baver, et larmoyer. Une pauvre misérable, recroquevillée, frissonnante et suante tour à tour.

Je ne peux pas bouger, quand je tente de me relever, le tournis s'emballe et me ramène à terre.
C'est une farandole démoniaque dans ma tête, une danse diabolique, où je m'essouffle à ne pas lâcher prise.
Entre deux nausées harassantes,  j'ai froid, puis très chaud. Je m'engourdis, assise inconfortablement enroulée autour du bloc dur.

Dans ma tête le tourbillon étourdissant emporte tout espoir de voir un apaisement possible. Je me verrais presque finir là, lamentable et pitoyable.

J'ai tout Wagner et ses cymbales dans le cerveau, avec les trompettes de Dvorák et les orgues de Staline,  les Walkyries et les Wisigoths déchaînés, les vagues fluent et refluent comme aux pires tempêtes d'équinoxe, la violence d'un volcan en éruption m'engloutit, les coulées de lave épaisse et incandescente me noient, c'est le Tsunami japonais entre mes pauvres oreilles, l'éruption de la bombe atomique à Iroshima, l'enfer sur terre.

Ce n'est pas ma première crise, mais ce n'est pas la plus légère non plus, nom d'un chien !

Sur les coups de minuit, je trouve la force de me traîner jusque dans mon lit, sans me déshabiller ni me laver. Je prends juste une cuvette et une serviette.
Enroulée sur mon malheur, je m'endors.
Pour me réveiller en sursaut, secouée de nouveau de nausées de plus en plus acides et douloureuses.
Recroquevillée au bord du lit, je hoquette comme une perdue, plus frissonnante et lamentable que jamais. J'ai froid, et pourtant, je ruisselle d'une sueur mauvaise. Moi qui me fait fort de ne pas exhaler d'humeurs corporelles, je me dégoûte de poisse et de misère.

Voyez, je ne vous tais rien. 
Pour ceux qui par malheur connaissent ce tourment, ils sauront compatir. Et pour les autres, qu'ils se réjouissent sainement d'en être épargnés par la grâce.

Tour ça finit par se calmer, au tout petit matin. Je retrouve assez d'intégrité pour pouvoir soigner les bêtes, aller voir mon père. Chancelante encore, je m'accroche à mon rôle, et parviens à donner suffisamment le change.
Ma journée de travail sera elle écourtée. Je ne suis pas du tout opérationnelle et je gêne plus que je n'aide.

La tempête dans ma tête s'est quand-même éloignée.
Je retrouve la sensation d'un monde immobile et rassurant autour de moi. Comme c'est agréable, d'être couchée dans son lit, les yeux au plafond, et de voir juste trembloter au vent cette petite toile d'araignée oubliée là.
Comme cet immobilisme répond bien à la quiétude de mes sens assagis après ce terrible déchaînement.
L'après-crise a ceci d'irremplaçable : elle vous fait toucher du doigt la chance de vivre une situation ordinaire.
Je m'endors, en paix, un vague murmure dans mon oreille décompressée.
En harmonie totale entre mes sensations intérieures, et la tranquillité de mon environnement familier.

Cette congruence retrouvée, cette cohérence entre mes perceptions et le monde, je les savoure, je vous l'assure, comme une denrée précieuse, à cette heure.

Hauts les cœurs à tous mes semblables de la confrérie des Mesnières. Nous connaissons la guerre, mais nous connaissons aussi la paix, dans les excès de l'une, et la gratitude de retrouver l'autre, ensuite.

Qu'il ne nous vienne pas plus grande raison de nous plaindre, et, s'il en venait, que nous conservions longtemps l'espoir de surmonter ces malheurs, comme nous surmontons nos crises mauvaises.

Amen, et paix sur la terre...à tous les Mesnières, et aux autres !




ET BIGOUDI FAIT DES SIENNES !




Suiveurs des nouvelles d'Agorreta, bonjour !

Mon petit épître du jour arrive en décalé.

Je ne tenais pas la grande forme ces jours derniers, en rapport avec mon oreille défaillante. Je vous conte, après, si ça me tient toujours.

Pour l'heure, juste une petite entorse à mon histoire idyllique de projection positive de la dernière fois, avec la perspective de deux naissances aux printemps prochain à Agorreta, en rappel parfait de celles de cette année :




Et non, cela aurait pu être... mais ne sera pas ! Du moins, pas avec Bigoudi et Pollita.

Pollita n'a pas failli, elle reste souveraine et sereine en sa suprématie.
C'est cette petite Bigoudi, qui nous joue des tours :



Je me réjouissais, un peu vite, de la voir tranquille et paisible, lundi dernier.
Elle est "pleine", ai-je annoncé.

Quelle précipitation présomptueuse !

Mercredi midi, ma Bigoudi faisait des siennes, et me rappelait que ses hormones et mes calculs mathématiques, ça fait deux...
21 jours, tu dis ? Et bien, avec moi, ce sera 23, et là !



Bon, d'accord !  On remet ça, et on verra, en se donnant un peu plus de marge,  dans trois semaines, ou quatre...

Ainsi vont les élevages, au gré des espérances humaines, soumises aux humeurs animales.


En cette période de 14 juillet, traditionnellement, à Agorreta, nous semons le rutabaga.
Et bien, cette année, tradition ou pas, il va falloir attendre. Attendre cette maudite pluie, qui ne vient pas.
Hier soir, mon père, ayant suivi la retransmission du tour de France cycliste à la télévision, m'annonçait la pluie pour la nuit. 
"Elle est là, à côté, elle va arriver". A côté, peut-être, mais ici, pas du tout ! Une jolie rosée, faute de mieux, et rien de plus !

Là encore, l'espérance titille et voudrait provoquer, mais la nature règne en déesse inflexible.
Mince alors, adieu mon semis de navet !
Il sera encore temps jusqu'à mi-Août, aussi, ne nous désespérons pas avant l'heure, en place de nous réjouir prématurément.

A défaut de semer, j'ai récolté, ma petite patate, dont je doutais, à la voir si hâtive :





Elle avait fleuri très tôt.

La semence m'avait été donnée par Olivier.
J'ignore quelle variété c'était.
Comme on dit, à cheval donné, on ne regarde pas les dents !

Cette patate ne paraissait pas devoir faire des miracles.
Pour contrebalancer les espérances déçues, elle aurait pu m'étonner favorablement, sait-on jamais...


Et bien non, elle a tenu son manque de promesses :




En taille, elle ne serait pas trop mal, si on va par là.
En rendement par contre, elle ne s'est pas défoncée, la petite !

Et, d'après les toutes premières observations, en conservation, elle ne fera pas non plus de prouesses...
Misère, misère !
Un hiver avec pénurie de patates : l'effroi de nos grands-mères !
Ces démons du manque de nourriture nous taraudent moins vigoureusement, maintenant.
Mais, tout de même, il en reste quelque chose, n'est-ce pas ?

Et cet été de sécheresse nous parle de disette et de pénurie. Les bêtes n'ont plus rien à pâturer, l'herbe ne pousse plus.
Je ne vous parle même plus de mes courges et de mes betteraves...

Tiens, si par contre, ma fameuse courge de l'année passée dont je me demandais si elle n'avait pas trouvé le moyen d'arrêter le temps :





Elle semblait momifiée.

















Mercredi, en plus de la déconvenue avec Bigoudi, j'ai du déchanter, pour celle-ci aussi.

Le temps en son travail de sape a rattrapé insidieusement ma courgette pétrifiée.

Une petite auréole brune et molle s'est arrondie à même la peau.

Aïe ! Fini le déni au temps qui passe !

La courgette immobile se laissait oublier. Elle se faisait inerte et quasi-minérale, pour distraire d'elle la marche d'un temps à l'issue fatale.

Peine perdue. Ici comme partout, le temps l'a débusquée, et l'a mordillée, un peu, presque amicalement. Pour mieux la détruire et la pourrir, cruel temps, ogre insatiable depuis toujours et à jamais.



J'ai ouvert la courge toute légère, pour la faire manger à mes vaches avant qu'elle ne pourrisse en entier.
Il n'y avait plus de chair à l'intérieur. Toute la substance avait migré dans les graines tissées comme dans un linceul.
Ma courgette vaillante voulait préserver une forme de survie, défier les lois naturelles en protégeant au mieux ses graines dans une coque sèche.

Elle se croyait devenue noix ou amande, sans doute...

Mes vaches l'ont croquée distraitement, sans plaisir. Les graines avaient perdu toutes leurs ressources, plates et desséchées.
La folle espérance de ma courge l'a juste hissée au rang de curiosité. Elle n'en a fait nul profit, ni pour elle, ni pour les autres.

Ainsi vont nos espérances : elles nous élèvent quand elles gardent une juste mesure. Et nous vident de substance quand elles nous brûlent plus qu'elles ne  nous nourrissent.

Sachons les maintenir dans un périmètre raisonnable, et ne pas nous laisser emporter au delà des bienfaits qu'elles nous dispensent.
Soyons des bergers intelligents, qui donnent la liberté d'un espace large, mais les limites d'un champ mesuré.

Comme dirait un que j'estime, ne nous emballons pas...


A bientôt, suiveurs d'Agorreta ! Restez maîtres de vos espoirs et bons gardiens de troupeau !



lundi 13 juillet 2015

BIGOUDI EST PAISIBLE.





Bonjour à vous tous !









Première préoccupation de ce petit jour, veille de 14 juillet, l'attitude de Bigoudi.
Il nous faut savoir si son insémination, il y a trois semaines, a porté son fruit.
La bête paraît calme, pas du tout agitée de pulsions hormonales. Les jours précédents ont été de la même veine.
Raisonnablement, on peut déduire que Bigoudi est "pleine".
Si rien ne vient contrer la marche naturelle d'ici là, elle nous fera son deuxième veau au printemps prochain,  en décalage d'une dizaine de jours avec Pollita.
En perspective, une paire comme celle que forme Galzerdi et Rubita aujourd'hui :







Jolie projection, n'est-ce pas ?

Positive et réjouissante à souhait...

Nous n'y sommes pas tout à fait, c'est sûr, mais le départ est lancé en ce sens.
Il sera toujours temps de perdre nos illusions durant le fil de l'histoire, pas avant !










La potentialité maternelle de Fauvette reste en suspens.

Une autre vigilance de quelques jours sur la fin du mois, pour être fixés, en principe.

Trois sur trois, ce serait parfait !
A voir...










Encore et toujours ces cieux clairs.
Toujours pas de pluie à l'horizon.


La végétation espère et attend.
Selon l'adage, un binage vaut deux arrosages.
Alors, je bine, frénétiquement !










Remarquez, les mauvaises herbes sont à la même enseigne que tout le monde : elles souffrent de la pénurie hydrique :






L'amarante se ploie sous une panicule poussiéreuse et en berne.




Le datura conquérant culmine à cinquante centimètres quand il en fait plus du double en saison normale.





Le chénopode au cœur argenté, pourtant un coriace, celui-ci, n'est pas plus arrogant.


Même notre petite morelle exhibe une minuscule floraison misérable :






C'est une consolation de voir la frustration universellement partagée.
Ca n'amène rien de mieux aux cultures, mais ça évite d'ajouter l'envie stérile au dépit légitime, n'est-ce pas ?






D'ores et déjà, la mise en oeuvre du plan B pour mes fourrages hivernaux est activée.
Sur la parcelle destinée au repos régénérant cette année, je vais devoir ensemencer en navets, pour en avoir une quantité suffisante à pallier le manque maintenant prévisible de betteraves et de courges.

Mon frère a passé son redoutable Girobroyor là dessus. A la première bonne pluie, nous allons envoyer la charrue, pour labourer tout ça, et remettre en culture.
Pour le moment, la terre est trop dure pour pouvoir être travaillée. 

Ma mini-meute adore fouiller la couche de résidus végétaux broyés :








Lola Txief et Pittibul s'en donnent à cœur joie.

Ils arpentent la plaine, (hum, petite plaine, quand même !), hument et fouillent.

Le premier qui a trouvé rameute les deux autres, ils soufflent dans les galeries mises à jour, et sautent sur les campagnols affolés qui en surgissent.

Ca les tient, plusieurs jours, le temps de la repousse, qui remet les petits rongeurs mieux à l'abri.





Ils ramènent fièrement leurs prises au maître de maison.

La cour devant la ferme devient une exposition des trophées de chasse.

Il nous faut attendre pour nous débarrasser des petits cadavres que la mini-meute soit repartie.

Ils seraient très vexés, ces chiens, de voir leurs précieuses offrandes jetées sans plus de considération !



Il faut tenir compte des susceptibilités de chacun, si possible.
Et, à Agorreta, celles des bêtes sont presque davantage épargnées que celle des gens...

Quel monde curieux, n'est-ce pas ?



Je dois aujourd'hui, entre deux, tâcher de trouver un moyen de décoincer un fourgon mal engagé dans un chemin creux.
Hier soir, à la presque nuit tombée, une équipe de jeunes est venue à la ferme demander assistance.
Quand ils ont vu mon habileté toute relative à manœuvrer  avec le tracteur,  ils ont très vite décrété que, finalement, sans douter du tout de mes compétences, et en me remerciant chaudement de m'être ainsi impliquée, ils préféraient attendre mes frères et leur meilleure maîtrise technique, quitte à différer l'opération au lendemain.
Certes, ils y ont mis les formes, mais j'ai bien senti ma susceptibilité, à moi, un peu froissée...

Que voulez-vous,  il faut les comprendre, ces petits jeunes, ils n'ont pas envie de voir leur fourgon plié en accordéon au bout de ma fourche !

Bah, ma bonne volonté a été reconnue. Et mon adresse mécanique est depuis si longtemps controversée ! 
Je ferais mieux de renoncer à essayer. Mais, vous me connaissez...

Pardonnez-moi, comme je leur ai pardonné, et passez une belle fête de 14 juillet !


vendredi 10 juillet 2015

CHEMIN DES CRETES




Amis suiveurs de ce "bloc" d'Agorreta, bonjour !


Encore une matinée parfaite d'été, si nous ne commencions pas à désespérer de la pluie...
Trois pleines semaines maintenant, sans une bonne averse digne de ce nom !





La petite ondée de mercredi matin, même si elle n'a pas fait de mal, n'a évidemment pas suffi à étancher les besoins en eau de toute cette végétation en période de pleine croissance.




A cette période de l'année, je ne devrais plus pouvoir vous montrer la baie de Fontarrabie depuis mon balcon.
Le maïs derrière la prairie devrait la masquer.
Au 14 juillet, en principe, ce maïs fleurit, et les panicules blanchissent à plus de deux mètres de hauteur.

Nous en sommes loin.
La plante attend, espère, en retenant l'émission de la fleur.
Si elle y est obligée, elle l'enverra, et nourrira de sa petite masse de feuilles la formation d'un épi minuscule.
C'est une année sèche, une année de misère, si les masses atmosphériques ne se décident pas à délivrer de l'eau.




Les citrouilles se forment.
Elles aussi devraient être beaucoup plus grosses.

















Les courges  allongées s'en tirent à peine mieux.

Les nervures blanches des larges feuilles limitent la transpiration par évaporation de l'humidité retenue.
Mais ce petit bouclier ne tiendra pas longtemps...









Les premiers signes de manque d'eau sont là.
Les feuilles de la base flétrissent.
Certaines fleurs sèchent sans former de fruits.

La plante préserve au maximum sa ressource pour tenter de mener à bien la formation des graines dans les fruits rescapés.

Un instinct de conservation et de survie, face à une adversité toujours envisagée.


Mes vaches mangeront moins de citrouilles et de betteraves, cette année, c'est maintenant joué.
Reste à voir ce que donnera le navet ! Vous savez, le fameux plan B...




Vous n'avez pas oublié le calendrier de Fauvette, j'en suis sûre...
Si par hasard, vous ne vous en souveniez pas, je ne vous en veux pas, allez !

Elle s'est montrée nerveuse mercredi soir.
Je n'ai pas pu déterminer avec certitude si c'étaient ses hormones à elle, qui la mettaient dans cet état, ou alors, si c'était la chaleur, bien manifeste celle-ci, de Pintta-Mona.

Comme je travaillais jeudi, mes observations n'ont pas pu aller au delà de la sortie matinale, ou là encore, les deux génisses s'agitaient un peu confusément.
Je ne sais donc pas si Fauvette a accepté l'insémination, ou pas !

Je ne peux quand même décemment pas demander à mon patron Jean-Michel, d'intégrer les humeurs de mes vaches dans l'organisation du travail de la jardinerie...
Et m'absenter de mon poste, pour pouvoir mieux suivre mes dames !

L'homme est compréhensif,  et m'autorise déjà des conditions tout à fait appréciables. Qu'il en soit remercié, et pas davantage sollicité !

Je verrai dans trois semaines comment se comporte ma prétendante à la maternité. En espérant que cette fois là, je serai à la ferme.

Bigoudi approche de ce fameux 21ème jour, elle aussi.  Autour de dimanche, à surveiller, donc !





Le maître d'Agorreta se promène, avec sa fidèle Bullette.

Il déplore, lui aussi, l'absence de pluie.

Nos cultures et nos vaches ne sont plus notre gagne-pain à la ferme.
Quelques grincheux vous diront même que ce sont nos danseuses...








Laissons dire, et promenons, gracieusement, comme on danse, justement.

Les médisants et les mauvais penseurs ne se décourageront pas.

Mais nous non, plus, pas encore.

Nous savons et connaissons les aléas et l'adversité.

Nous n'arrivons pas toujours à éviter les mauvais coups.

Mais nous reste l'envie de nous relever, et de continuer, avec plaisir et confiance.


Ces derniers jours à Agorreta, une énigme nous chiffonne.
Une étrangeté, une bizarrerie, une absurdité.

Nous nous interrogeons, bien-sûr, et nous désolons, là encore.
Mais sans plus d'éléments de compréhension, nous ne pouvons aller plus loin.

Je vous explique :

Nous cultivons sur le chemin des Crêtes, à Urrugne, un peu de maïs pour nos bêtes.
Celui-ci comme les autres,  il demande de la pluie. 
Et la paix. 
Qu'il n'a pas.

Ces derniers jours, à notre grande consternation, et plus grande encore incompréhension, un individu sillonne ce champ en voiture. En long, en large, et en travers.
Un champ de maïs, ce n'est pas un circuit automobile, n'est-ce pas ? Ce n'est pas, et ça n'a jamais été fait pour ça, non !

Evidemment, les pieds de maïs écrasés, saccagés, à terre, se relèvent difficilement.
Mais bon, des récoltes avortées, par la faute du temps, des éléments, nous en avons déjà connus. Et nous y avons survécu.
Même si ce champ de maïs est réduit à néant, nous trouverons un moyen de nourrir nos bêtes.
Nous aimons réussir, quand nous entreprenons, évidemment. Mais nous savons que tout ne dépend pas de nous. Et nous intégrons cette fatalité comme incontournable.

Ici, faute de mieux, nous ne pouvons qu'ajouter la bêtise humaine, à la liste de ces aléas impondérables.
Que ce soit un acte stupide et gratuit, ou alors un message retors d'une personnalité à la bravoure aussi aplatie que les pieds de maïs écrasés derrière lui, nous n'y pouvons pas grand chose...

Si message il y a, à priori, nous ne le comprenons pas. C'est dommage, de se donner du mal pour un si piètre résultat.

C'est intrigant, et nous sommes intrigués.

Sur ce chemin des Crêtes, l'histoire a déjà cristallisé les passions.
Du temps de la révolution, ce coin était une redoute, un repaire de résistants au régime. 
Sa situation élevée, face à la mer, en faisait un point d'observation privilégié.  Des combats y ont été menés, et certains cherchent encore les traces de cette histoire agitée entre les cailloux de ces terres pourtant paisibles, à l'aspect.

Plus près de nous, des conflits plus modernes mais tout aussi acharnés nous ont tenus en haleine, déjà.
C'était il y a plus de dix ans, maintenant.
Il y a prescription ! 
Tiens, à l'occasion, je pourrais raconter, ça aussi, nos échanges d'alors, avec les voisins, la mairie. Tout ce bouillonnement de passions, toutes ces histoires de pouvoir, ces ressentiments, ces craintes, et ces manœuvres.
Sur le coup, c'était terriblement prenant, et je vous prie de croire, que nous nous y prenions, tous, à fond !
Vu de maintenant, c'est amusant , encore.

Et ces événements des jours derniers,  nous ramènent à cette époque tourmentée.

Cet hiver, tiens, je vous retracerai cette mini saga du Chemin des Crêtes, dans mes nouvelles d'Agorreta.

En attendant, mettons cette piètre historiette de saccage rural dans le lot de ces choses dont on se passerait, mais qu'il faut, paraît-il, apprendre, dans une vie, à croiser.

La pluie qui ne veut pas tomber, la génisse qui ne veut pas se faire féconder, et l’imbécillité humaine, qu'il ne faut pas considérer pour plus que la tristesse qu'elle n'est.

Allez mes amis, ne nous laissons pas abattre. 
La pluie reviendra, un jour, et si Fauvette ne devient pas mère, elle nourrira quelques familles.

Faisons comme nos citrouilles, et économisons notre énergie pour ce qui en vaut la peine.

A bientôt, et gardez confiance, tout n'est pas mauvais, en ce bas monde !







lundi 6 juillet 2015

LOIN DE PAMPELUNE



Bonjour à tous !





La petite aube pointe ses roseurs pastels.



















Et l'or arrive dans la foulée du petit matin de bel été.
















Bel astre revient sensiblement sur ses pas, se rapproche jour après jour de la mère Rhune.

Elle, solide et immobile, ne s'impatiente pas.

Ca lui fait des réveils en douceur...








Les fêtes de Pampelune sont l'actualité de la jeunesse (et de la moins jeunesse !).
San Firmin ouvre ce matin, je crois.

Du temps de ma défunte mère, il fallait impérativement la préparer avant la retransmission télévisée du lâcher des taureaux dans la ville.
Elle adorait ce spectacle, et jubilait de voir un ou autre fêtard audacieux se faire bousculer rudement par les bêtes musculeuses en pleine course.
Je me demande même si elle n'espérait pas voir le sang couler !  Les corridas la passionnaient, quand mon père, lui, les avait en horreur.
Curieuse frénésie de la violence sanguinaire chez cette petite femme en fin de vie...

A Agorreta, nous sommes loin de Pampelune, et de son agitation du moment.





Mon père, tranquillement, revient de promenade.
Lui,  il aime regarder les vaches au pré, paisibles et bien nourries :




Le spectacle de ce matin calme ne le déçoit pas.

Ces dames, après leur virée dans l'étable où elles ont consciencieusement vidé les mangeoires garnies à leur intention, flânent, et se reposent.

Oswitx, après ses désagréments de la semaine dernière, a retrouvé la grande forme.
Elle s'étire d'aise, et fait plaisir à voir.

Souvenez-vous de surveiller Fauvette, entre mercredi et vendredi. Il faut savoir si  son insémination, il y a trois semaines, a été fertile, si elle porte en elle la promesse d'un futur petit veau.







Rubita et Galzerdi, nos deux petites nées du printemps, ruminent avec application, côte à côte, sous le vieux pommier rempli de fruits en maturation.

Elles ne se quittent pas, la brune et la rousse, demie-sœurs et  compagnes de jeux.
Une très jolie paire, et là encore, un régal à regarder.



Oui, nous sommes loin de Pampelune,  à Agorreta !

Je ne suis pas du tout amatrice de ces fêtes bruyantes et colorées. Je ne l'ai jamais été, et je ne pense pas le devenir dorénavant.

J'apprécie un bon repas en bonne compagnie, j'aime rire et écouter les autres plaisanter.
Pourtant, l'assemblée trop nombreuse me devient vite inaudible, à cause de mes oreilles défaillantes, et je me sens pour le coup "à la ramasse".
Et ça, je n'aime pas, vous vous en doutez bien !

Je sors peu d'Agorreta, très peu.
Mes distractions principales, ce sont mes vaches, les promenades avec les chiens, par les petits chemins creux alentours, quelques bons livres, et... ce "bloc", évidemment !

Un programme comme un autre, celui qui me va bien et que j'ai choisi de conserver au mieux.

Hier, puisque la jardinerie ferme les dimanches en été, j'étais ici.
J'ai été me  balader,  avec ma mini-meute.

J'ai fait deux trois constatations botaniques.

La végétation ne marque pas encore le manque d'eau. Si, comme annoncé, la pluie nous revient mercredi, cet épisode chaud et sec aura été assimilé sans dommages.






Le poirier croule sous les fruits.
Il les éclaircira naturellement au fur et à mesure de leur avancement.
Mes vaches se régaleront de ces petites gourmandises fraîches et craquantes.












Les ronciers fleurissent dans les haies sauvages.

Il y a profusion  de grosses mûres grumeleuses en perspective, là encore, si un peu de pluie vient abreuver tout ça.













A l'aplomb des châtaigniers, les panicules de fleurs en lianes duveteuses forment des tapis.

Elles sont longues et épaisses.
Les bogues devraient être bien rondes et bien garnies.

Nous suivrons ça cet automne..











Les arbres à papillons embaument.
Tous ces cônes souples et légers s'offrent à qui mieux-mieux, rivalisant de séduction pour attirer les insectes.

Ils assureront par le biais de ces fameux papillons la pollinisation des pistils et la dispersion des fertiles productions des étamines.
Une danse hautement sensuelle se joue devant nous, en toute impudeur.

La force de vie éclate partout. Son cheminement marque la nature, partout là où on lui laisse l'occasion de se montrer.

Je suis attentive à ces signes. Ils me rassurent et me confortent.

Quand la société des hommes semble parfois perdue et sans but, les fleurs redessinent pour nous cette route immuable.

La recherche du plaisir est une pulsion bien naturelle, elle aussi, et universelle.
Les fêtards de Pampelune et d'ailleurs le sentent bien. Ils se jettent dans ce bain de jouvence pour y puiser l'énergie de vie autant qu'il la disperse.

Amusez-vous sainement. Goûtez la chaleur, les musiques et les danses.
Enivrez-vous de cette fébrilité primaire et profonde.

Je ne vous accompagnerai pas dans la fête. Mais je partage votre exhalation, à ma manière sobre et solitaire.

A bientôt, les amis, à quand vous vous serez suffisamment reposés des ardeurs festives de l'été !