vendredi 29 mai 2015

DES FOINS QUI FONT DU FOIN...



Bonjours, amis suiveurs de ce "bloc" !





Pas un temps à faire sécher du foin, n'est-ce pas ?

Ah ! Pas facile en ce mois de mai 2015 de rentrer du bon foin !

L'herbe est bien haute maintenant, mûre, prête à être fanée, presque passée bientôt...
Dès le soleil aperçu, l'envie démange de faire siffler la barre de coupe.

A Agorreta, nous avons peu de foin à faire. Mes six vaches en consomment trois douzaines de balles par an. Elles préfèrent le foin au regain, récolté en seconde coupe, autour de la mi-Août.
Ce dernier fourrage fait par contre les délices des moutons, grands amateurs de cette herbe courte et mollette. Le regain, sa couleur bleutée, son parfum prononcé, c'est de l'herbe vite venue, et sa valeur nutritive est moindre.
Mes vaches n'en faisaient pas profit. Au contraire, la distribution de ce regain de plein été occasionnait des désagréments digestifs chez mes fines demoiselles. Et des caisses de fumier malodorant par conséquence. Rien de bien bon , alors, le regain, hors de la grange à foin !

Ces quelques balles de foin, il les faut tout de même de bonne qualité. De l'herbe encore tendre, fauchée au grand soleil, séchée au vent taquin, et conditionnée à point.
Lundi, mon frère Antton prit le parti de couper un champ. Pour occuper un créneau disponible, et ne pas trop tarder à récolter. Bien.

Lundi, il faisait gris, souvenez-vous. Mardi, il pleuvait une bonne averse, et le soleil se montrait dans l'après-midi. Ah...
Mercredi, grand beau temps, brise fraîche mais bienvenue pour le séchage. Le foin coupé fût travaillé autant qu'il pouvait l'être. Remué, retourné, rassemblé en andains et dispersé encore.
Vraiment, il ne se passait pas une heure sans que l'on intervienne dans ce champ. Les tiges en étaient toutes ébouriffées.
Jeudi, le soleil se montra, mais un peu voilé, avec dans l'air une sale humidité peu alliée. 
Aïe, Aïe, Aïe...
Le temps était annoncé incertain pour le lendemain, aujourd'hui, donc. Merde !

Que faire, que décider ?
Mon frère se tâtait, ne voulait pas faire durer plus longtemps l'affaire.

Moi, j'étais d'avis de laisser passer cette grisaille en ramassant le foin en andains. Et d'espérer un franc soleil pour finir de sécher correctement ce foin.
Au cas, toujours possible, où la pluie  trop abondante ruinerait le fourrage, nous utiliserions ce foin raté en litière. Et irions chercher notre bonheur à une meilleure occasion, et ailleurs.

Ta, ta, ta ! Non, non, non, ça n'allait pas !
Nous n'avions qu'à enrubanner nos balles, comme alentours beaucoup le faisaient en ces circonstances. Vous savez, ces grosses pelotes tassées de plastique, noires ou blanches, au bord des champs.

A Agorreta, nous n'avons jamais pratiqué cette méthode de sauvetage. Nous en avons entendu parler, certes. Nous ne vivons pas complètement retranchés de la modernité.
Mais il me semble qu'il y a un stade à ne pas dépasser dans le séchage, pour "enrubanner" avec succès. Et que ce fameux stade, là, nous l'avions dépassé.
Nous gardons aussi à l'esprit le spectacle désolant d'une ou autre de ces balles ratées, distribuées dans les parages. Du fourrage noirâtre, poussiéreux, présenté dans les râteliers en extérieur, et unanimement boudé par les vaches venues le renifler, et se détournant, dégoûtées.
Cette balle refusée, reprise en bout de fourche motorisée, et abandonnée en fumier, même pas bon à enrichir quoi que ce soit. Une consternation !

Je me souviens encore de l'odeur de putréfaction avancée se dégageant de ces balles enrubannées,  alignées en bordure de la bretelle de sortie d'autoroute, à Urrugne. C'était quelque chose...

Evidemment, nous avons aussi entendu parler de foin plastifié d'excellente qualité, sur lequel les vaches se jettent avec gourmandise, paraît-il.

Tous ces éléments contradictoires ne facilitaient pas la prise d'une décision de telle importance.
Les discussions étaient vives, les commentaires acerbes.

Vous savez maintenant comment mon père adore dévaloriser son fils cadet. C'est devenu un jeu pour lui, et rien ni personne ne le fera changer d'attitude.
Le dit fils, lui, s'obstine et s'enrage. Il y perd ses nerfs, et la journée d'hier fut pour lui un supplice.

Plastifier?  Ne pas plastifier ? Telle était la question !
Coups de fils, avis des uns et des autres, tous différents, prévisions météorologiques.
Les affres de l'indécision le torturaient, le pauvre garçon.

Moi, j'étais à la jardinerie. Le soleil d'après-midi était plutôt franc. Ce foin doit avoir séché, me disais-je. Nous n'aurons pas à expérimenter ces nouvelles techniques inconnues.
En fait, je m'inquiétais de savoir comment se présentait ce foin plastifié au moment de la distribution. S'il était facile à défaire, et à faire passer dans les râteliers par mes ouvertures de grenier. L'installation est vétuste, chez moi, et sûrement mal adaptée aux méthodes utilisées dans des étables modernes.

Quand je rentrais, le soir, l'air de la ferme embaumait le foin. Une petite pointe d'acidité indiquait un séchage imparfait, une verdeur persistante.
Je rentrai mes vaches, allai voir mon père dans sa chambre, vaquai mon petit ordinaire du soir comme à l'accoutumée.

Avant de monter dîner, je fis un tour par le hangar où la remorque encore attelée trônait en majesté, chargée de ces fameuses balles de foin. Un peu vert encore, effectivement, à l'odeur alourdie d'une persistante humidité.
Pas trop mal, pourtant. Je me hissai sur la ridelle avant, tâtai un cœur de balle pour en évaluer la chaleur et la texture. Ca n'était pas craquant sec, mais pas trop mou non plus.

Bah, me dis-je, ça ira comme ça ! Je ferai passer ce foin en premier, et, à condition de ne pas trop le tasser au stockage, ça ne devrait pas moisir en bouillasse immangeable !

Vous avez peut-être vous aussi entendu parler de hangars enflammés par du foin surchauffé d'un mauvais séchage. Les balles de foin mal séché pressées en grande densité montent en température, à tel point qu'elles peuvent occasionner des incendies quand on les amasse en tas.
Nous n'avons pas besoin de ça à Agorreta !

Là quand même, avec une seule remorque de foin ventilée de tous côtés, il n'y avait pas grand risque, Dieu merci...

A ce matin, la décision d'enrubanner était en suspens, d'après mon père. Il était même plutôt partisan d'essayer un brin de nouveauté. Moi, non.
Ces balles plastifiées, c'est plutôt laid. Et ce foin, tel que je le voyais, pas si mal.

Bah ! disait mon père, ça ne vaut rien, ça, ce sera bon à jeter, et même pas au fumier ! 

Une condamnation sans appel.

Il n'a jamais su rien faire de bien, alors, tu penses !

Décidément, il n'en démordrait pas...

Non, non, il faut plastifier !

Ah, la veille, non, et là, oui, tiens donc !

Toutes ces indécisions commençaient à me donner le tournis. J'appliquai ma petite méthode recentrage. Et organisai la chose comme je l'entendais.













Après déchargement, mise en examen et inspection, avec assistance des services homologués présents sur le site.



















Présentation en situation avec  demande d'approbation des principales intéressées.
















Recueil de l'avis favorable de la dégustatrice en chef, à savoir Bigoudi, experte es-foins.



Cet examen décisif passé haut la main, nous pouvions envisager l'avenir sous un jour plus serein.






La remorque fût vidée, et les balles de la discorde dispersées aux quatre coins de la ferme :









Dans le grenier.
Voyez ce coloris, en comparaison de l'autre balle ? Hum...

C'est du tout frais, c'est ça, sans doute, c'est ça...

Et ce poids ? Ben... c'est du poids, quoi ! Ah...








Dans les râteliers, garnis à ras bord.

Ce soir, mes belles seront enivrées de ce riche parfum, à leur rentrée.















Dans le hangar, chaque balle sur une palette, espacée de l'autre.

Presque deux mètres carré par unité.

Imaginez, si nous avions eu cent balles à ranger, il nous aurait fallu la moitié d'Hendaye en couvert...

Mais nous sommes à Agorreta, et l'irrationnel ne nous effraie pas !





Toutes ces opérations sous l’œil goguenard de notre père, encore et toujours sur terre, tout renfrogné de ne pas voir ses avis respectés.




Même pour la photo, lui qui d'habitude pose avec plaisir, il est resté en retrait !

Bah, un bon repas et une saine sieste après, il aura oublié tout ça !















Opération remisage du matériel, à empiler sur la remorque, puisque la place au plancher est un peu diminuée, par le fait.

















Le tout, c'est d'y arriver...




















Histoire de libérer quelques pulsions destructrices, mon frère enfourche Zetor et son fidèle Girobroyor, pour pulvériser les mauvaises herbes dans le coin, à défaut de pouvoir faire taire son maudit père...










Ainsi va la vie à Agorreta. Tout y est observé et commenté largement. 
La moindre péripétie galvanise les énergies et les passions.

Une simple rentrée de foins remonte au jour les bouillons des petits conflits de famille. 
Mon père s'amuse énormément de faire enrager son petit monde. Et je crois que nous exagérons notre agacement, pour lui faire ce  plaisir.

C'est vrai, une famille, c'est alambiqué. Et les relations humaines y sont toutes mélangées de pudeurs et de transpositions subtiles.

Aussi difficile à démêler qu'une balle de foin mal séché.

A bientôt mes amis, et sachez vous aussi lire l'affection qui n'ose pas se dire, dans les petits simulacres de disputes entre gens de même sang.

mercredi 27 mai 2015

BULLOU SUR UN TOIT BRULANT



Bonjour à tous !







Enfin, le voilà, le beau lever du soleil radieux de mai !
Ca fait du bien, n'est-ce pas ?
Je ne sais pas pour vous, mais moi, ça me redonne la lumière.  Je me sentais toute éteinte par cette grisaille froide. Et, à croiser les clients de la jardinerie, je n'étais pas la seule...

Enfin, laissons tout cela derrière, et  happons ce soleil comme une gourmandise longtemps convoitée.






La Rhune est loin à droite du soleil levant, maintenant.

Regardez les rayons obliques sur le petit cabanon.















La baie, elle, s'offre de tout son long.

Là, c'est du beau paysage à regarder, l'eau, la roche, le ciel.

Un régal pour les yeux, un bienfait pour l'humeur.









A Agorreta, ce matin, les hirondelles tournoyaient en un ballet étourdissant.
Il y en a plusieurs nids dans l'étable, je vous les ai montrés.






Je ne suis pas sûre de les avoir saisis au bon moment, ces petits oisillons aux crânes tout ronds, et aux becs oranges triangulaires largement ouverts en appel.
Ils sont sortis de l’œuf cette semaine.

Ils avancent le col par dessus le bord du nid quand les parents viennent les nourrir.
Les sifflements aigus des uns et les chuintements mieux modulés des autres malmènent le calme de la vieille étable vidée de ses vaches rendues au pré.


Evidemment, j'aurais du prendre le cliché au moment de la becquée. Je le sais bien. Mais là, avec toute ma bonne volonté, elles vont trop vite, les lestes hirondelles.
Elles fendent l'air, se posent une seconde, distribuent la pitance, et s'en retournent en chercher encore.

Entre deux tournées, elles se posent, jamais bien longtemps. J'ai essayé de les surprendre. Pas facile...
Tout leur est perchoir. Elles ont investi la ferme totalement.


Ici, sur une pointe, près du rouleau de fil galvanisé accroché à la panne, contre le mur.

En haut, sur la branche de houx desséchée, remède miracle contre les verrues bovines !

Près d' une poutre du grenier,
sur le séchoir à saucisses.

En haut de porte de la cuisine.








Ces effrontées demoiselles sont à Agorreta comme chez elles. 
Regardez ici où l'une a choisi de faire son nid :






Regardez bien, sur le projecteur fixé au mur, ce tas de foin amassé, c'est un nid.
Et la petite tête ronde au dessus, la mère hirondelle couvant ses petits éclos hier.


Vous me direz, un nid, sur un projecteur électrique, dans cet environnement vétuste ?
Si près de ces pannes vénérables et mitées ?
Avec toutes ces toiles d'araignées poussiéreuses ?
Est-ce bien raisonnable, et prudent ?

Non, vous avez raison, ça ne l'est pas !
Comme nous avons la foi, mais tout de même, ne voulons pas trop tenter le sort, j'ai pris des mesures de sécurité, draconiennes.


Ce couple d'hirondelles, dans le grenier, sont de vieux amis à moi.

Le mâle vient tous les soirs dormir sur la lame de cette faux.
Avant de fermer la porte basculante, au moment de me coucher, je vérifie que  monsieur est bien rentré.
la femelle est au nid, j'aperçois sa queue bifide et sa petite tête arrondie.
Lui, il flâne, parfois.
Et moi, j'attends qu'il rentre, pour fermer derrière lui.
Quand les petits voletteront hors du nid, ça va être coton, de s'assurer que tout le monde est bien à la maison.
Comme la saison estivale approche, je laisse souvent ma grande porte ouverte, à cette jeunesse indisciplinée.
En bas, à l'étable, je bloque le volet de la porte en bois en position ouverte, dès que la première hirondelle se montre. Ainsi, tout ce petit monde ailé va et vient à sa guise.

Pour en revenir à mes mesures de sécurité, il n'était évidemment pas question à Agorreta de démonter un nid d'hirondelle en construction.
Un peu hasardeux de combiner ce nid avec le projecteur électrique en marche. La petite chaleur sous les pailles sèches, pas trop prudent, ça, alors, non, non, non !

Pour le coup, j'ai débranché ce dispositif d'éclairage automatique, pourtant si nécessaire et tellement pratique dans le grenier sombre.
Quand je dois traverser cet espace, de nuit ou à la petite aube, je laisse ma porte ouverte, pour bénéficier de l'éclairage intérieur, le temps de traverser le plancher dangereusement ajouré, jusqu'à l'interrupteur de l'ampoule de l'escalier, tout à fait à l'autre bout. Je reviens ensuite éteindre chez moi, et refermer la porte.
Des aller-retours dans une pénombre dangereuse par cet environnement approximatif, par respect de la faune ornithologique locale. 

Les quelques occasionnels visiteurs de la ferme s'aventurent peu dans ce grenier. Ils connaissent le risque de passer au travers du plancher. Aussi, mes manœuvres susceptibles d'être qualifiées de ridicules sont elles ignorées de tous.
Que tout cela reste entre nous...

Mes hirondelles referont une seconde couvée après celle-ci. Et ne repartiront que quand ces derniers petits seront capables de voler suffisamment bien. Nous serons rendus à la fin du mois d'Août.

Les jeunes oisillons sont vulnérables quand ils se lancent hors du nid. Leur vol est maladroit, et leurs atterrissages pas toujours maîtrisés.
Le plus grand danger à Agorreta pour ces jeunes hirondelles, c'est Bullou, la terrible !
Vous savez, ma petite chienne blanche et chocolat.

Je vous ai parlé plus haut de son goût pour la chasse aux oiseaux. Elle passe ces journées à guetter, à traquer, à espérer.



Souvenez-vous, cet hiver, dans l'étable. J'avais peur qu'elle ne se jette entre les vaches pour essayer d’attraper les moineaux perchés sur le râtelier à foin.

Cette petite chienne est intrépide et aventurière. Un petit bulldozer, d'où son nom, Bullou.
Dans sa jeunesse, sa fougue l'a menée sous les roues d'une voiture. Elle en est ressortie un peu fracassée du bassin.
Sa démarche a perdu en fluidité, depuis, mais son goût pour les opérations casse-cou n'en a pas été altéré.

Ces jours derniers, elle a trouvé une nouveauté.
Dans l'espoir de s'approcher de ce ciel où elle voit les oiseaux voler, elle recherche sans cesse l'élévation.
Son idéal la mène au dessus du sol, elle bondit et prend son élan en claquant des dents, mais retombe, déçue.
Elle regarde souvent vers le haut, ma spirituelle Bullette.

Et là, elle a trouvé un moyen d'assouvir ses élans :





Ma Bullou sur le toit pas encore brûlant !
Elle passe par ma terrasse, en bout de la ferme, et se promène sur les tuiles, reniflant là-dessous les oiseaux cachés.
Si l'un de ces satanés moineaux se lance devant elle, elle est capable de se jeter dans le vide à sa poursuite...
Je prie le Seigneur, mais rien ne saurait détourner cette petite chienne de la grande affaire de sa vie.

Pour mes hirondelles, j'essaie de lui enseigner qu'elles sont sacrées. Devant moi, elle les laisse plus ou moins en paix.
Mais je ne suis pas sûre de l'avoir convaincue au delà de ma présence...

Ces trois dernières années,  elle n'en a tué qu'une, devant moi. Quand pour les moineaux, son acharnement lui en fait attraper beaucoup !

Et pourquoi les moineaux, tu ne les préserves pas, eux aussi ? me demanderez-vous. Ou pas.

C'est comme ça. Les moineaux, il y en beaucoup, tout le temps. Un prélèvement par ci par là ne mettra pas l'espèce en danger.
Les hirondelles d'Agorreta, je veux les conserver.
C'est de l'arbitraire pur et dur, sans doute, mais je suis humaine et j'y ai droit, là !





Ce n'est pas Txief en figure de proue sur la murette qui dira le contraire. Lui, ce poste, il l'adore. Mais pas pour chasser les oiseaux. Lui, de là haut, il surveille, le bas !

A chacun son combat, en ce bas monde...

A bientôt les amis, et regardez vous aussi vers le ciel; il est bien joli aujourd'hui !

vendredi 22 mai 2015

RETOUR SUR LE PLANCHER DES VACHES D'AGORRETA



Bonjour à vous, fidèles et occasionnels suiveurs de ce "bloc".


Je fais comme vous, sans doute,  j’espère le soleil et sa chaleur.





Dès qu'il se montre, tout paraît tellement meilleur !
Ces sales nuages ne lâchent pas prise, encore. Quelle plaie...

Je ne suis pas la seule à me lamenter, même si notre concert collectif ne devient pas plus audible pour autant.




Les rangs de maïs n'osent pas se hausser au dessus de la crête de terre, là où le vent les saisit désagréablement.

Ils continuent d'émettre leurs feuilles, mais à bas-bruit, sans fanfaronner.









Une semaine de pousse entre ces deux clichés.

Ca n'est pas très vigoureux, comme avancée.

Remarquez, la mauvaise herbe se tient tranquille, elle aussi.

C'est déjà ça ! Avec ce terrain détrempé, je ne pourrais pas sarcler, comme je le fais des heures durant à cette époque, en saison normale.


Je vais prendre un retard considérable sur mes travaux, c'est sûr. Considérable, considérable ! Quand je peux, en principe, synchroniser la fin du suivi de la betterave et de la pomme-de-terre, avec le début de celui du maïs et du reste, là, tout va venir en même temps. Malédiction...

Enfin, si quelque chose arrive :






La betterave ce matin,















La betterave il y a huit jours !

A ce train d'avancement, je n'aurai pas grand chose à suivre...

Cette seconde levée n'est pas bien meilleure que la première, souvenez-vous.




Seize jours après semis, une plantule aussi peu visible, ça n'est pas bien bon signe pour la suite.

Je ne récolterai pas plus de tour de reins que de betterave, cet automne, semblerait !

Trop tard maintenant pour relancer une troisième série.
A un moment, il faut arrêter de s'acharner, et je déclare forfait.


Restera la ressource d'augmenter la planche en choux-navet, et voilà tout !



La petite patate rustique vit sa vie un peu mieux, elle.

Elle monte en fleurs, pas trop gênée par le froid, et même assainie par les volées ventées lestes à disperser les champignons parasites et autres attaques de mildiou.














La citrouille, il y a une semaine,










Et la même, ce matin.
Comparer ces deux étapes me fait du bien au moral.

Certes, mes courges ne bondissent pas comme elles le devraient !
Mais bon, elles ne dépérissent pas non plus, elles s'accrochent, continuent leur chemin, têtues et tenaces.
Je suis de tout cœur avec elles, dans cette lutte pour la survie, évidemment, sans que ça les aide, malheureusement.








Le champ de foin coupé repart en pousse.












L'oranger aussi. 

Vous vous souvenez de cette averse de grêle de ce samedi après-midi, autour du 20 avril ?

A Agorreta, de lourds grêlons avaient fouetté mon oranger.
Sur les jours suivants, il ne marquait pas ses blessures.
Puis, les feuilles vernissées se sont craquelées, fendillées, et maintenant seulement, les traces des impacts sont bien visibles.

Mon pauvre oranger a encaissé du mieux qu'il l'a pu. Il a essayé de panser ses plaies, sans les montrer. Mais ses souffrances sont finalement remontées au jour.
De crier son mal et d'exhiber ses traumatismes a libéré en lui le souffle de redémarrer, d'y croire encore assez pour ne pas en rester là.
Une défaite bien digérée n'est pas un échec. Mon oranger vous le promet...






En voici un autre, loin d'être en échec. Plusieurs fois, il a capitulé, a failli y rester, et pourtant chaque fois, quelque chose en lui s'est manifesté pour lui donner la force de s'en relever.
Evidemment, un jour, il lâchera la rampe. Tout de même, son rôle, il l'a bien tenu, et semble prêt à le tenir encore, bien, pour le moment.




Lola accompagne le mouvement,  entre son maître et les jeunes vêles.

Vous voyez ma jolie Galzerdi ?

Elle est née brune profonde. Et vire maintenant chamois-chocolat.

Elle s'arrondit, s'aguerrit.









La vie est douce pour ces deux petites, à Agorreta.

Du matin au soir, elles jouent, gambadent, entre de longues siestes couchées dans l'herbe, et de nombreuses pauses-tétées.

Le temps frais ne les gêne pas, elles. Elles ont leur beau pelage et le sang vif.

Et puis, ce buffet bien garni ambulant, le pis rempli de Bigoudi, à disposition.

Non, décidément, ces deux là ne manquent de rien et offrent leur contentement à qui veut le voir.


Je vous laisse ici pour aujourd'hui. 
Ces contretemps météorologiques me donnent l'occasion de venir vers vous plus souvent, pour le moment.

Alors, j'en profite. 
Me lamenter sur l'adversité ne m'avance à rien. Quand écrire me réussit bien mieux au teint.

Alors, comme mon oranger, je me ressource, et je repars !

A bientôt et le bonjour chez vous !

mercredi 20 mai 2015

OPERATION GAMBETTA



Amis des Nouvelles d'Agorreta, bonjour !


Agorreta et Gambetta, on se demande où on va ?

Vous le savez, je n'ai pas le souci de la logique et du suivi en ces pages.
Les grands écarts et les pirouettes ne me dérangent pas, et j'en suis coutumière.

Si je vous parle de Gambetta, aujourd'hui, c'est que j'y étais, lundi.
La belle affaire, me direz-vous ! Madame a été faire les boutiques, sans doute ? Histoire de prendre l'air et de faire sonner le tiroir-caisse en dehors de son monastique Agorreta ?

Remarquez, en soi, ce serait déjà un petit événement pour moi, ça...
Mais non, non, non, pas du tout, vous n'y êtes pas.

Je me suis rendue à Saint-Jean-de-Luz, avenue Gambetta, lundi dernier, en mission. Mission extraordinaire, opération extérieure d'exception, affaire singulière et particulière.

Mon petit quotidien ordinaire demande quelques divertissements de ce genre.
La jardinerie Lafitte me les offre. 

Je vous raconte :

Vous connaissez sans doute l'avenue Gambetta, à Saint-Jean-de-Luz. Si vous ne la connaissez pas, sachez que c'est une avenue piétonne de centre-ville, douillettement lovée entre deux rangées d'immeubles hauts, suffisamment large cependant pour y faire entrer le soleil et la belle lumière de mai. Quand mai ressemble à mai...
De part et d'autre de cette trouée pavée, des commerces se côtoient, petites vitrines colorées serrées les unes contre les autres, avec un petit air d'échoppes médiévales.
Je ne suis pas très amatrice, aussi, je ne me suis pas attardée à étudier l'offre présentée là, comme je l'aurais pu.
Une ambiance agréable, du mouvement, de la couleur, des odeurs de confiserie et des éclats de breloques multicolores.
Une jolie population se déversait là, flânant nonchalamment, des gens ballottés d'une devanture à l'autre,  en un mouvement pendulaire, ou d'autres, arpentant le pavé d'un air décidé,  louvoyant, un peu agacés, entre les méandres  lents des premiers.

Lundi, mai n'était pas trop mal. Un peu vif en température, mais bon, ça allait.

J'étais, avec trois de mes collègues, en mission commandée.
Nous devions livrer de la marchandise chez un client. Jusque-là, rien que de très ordinaire.

Tout de même, la rue Gambetta, déjà, en soi, c'est un petit écueil pour le livreur de gros colis.
La rue est piétonne. Les fourgons, camions et autres véhicules communs de transport n'y sont pas bienvenus.
Nous livrons généralement des plantes, souvent, de belles plantes, grandes et larges, des pots, à l'avenant, et du terreau, conditionné en sacs, plutôt lourds.

Pour le client de ce lundi, une petite difficulté s'ajoutait au contexte : la terrasse à aménager s'étalait sous le large ciel, au quatrième étage. 
L'immeuble rénové ne prévoyait pas  trop ce genre de livraisons. Un ascenseur très coquet, certes, mais bien étroit.
L'escalier, oui, il y avait bien un escalier...
Nous devions acheminer là haut, l'équivalent d'un gros camion de marchandise.
Evidemment, ç'aurait été possible, et faisable, avec de bons bras et beaucoup de bonne volonté.
Malaisé, tout de même.




Notre beau camion Lafitte stationné rue Gambetta, paraissait incongru. Il venait en direct de la belle pépinière à Mendionde, pays champêtre et verdoyant, largement ouvert au plein ciel basque.  Cet environnement urbain nous le rendait tout penaud.
Il tâchait de se faire  petit, mais y arrivait mal. Sobre et digne comme un animal des savanes encagé, il ramassait au plus près ses autours.
Notre fourgon de livraison stationné derrière est plus accoutumé de ces parages.

- T'en fais pas, murmurait-il à son grand frère empêtré, ça va aller ! Regarde ces gens, ils te saluent, ils sont gentils...

A la Jardinerie, nous ne manquons pas d'ambition. Les sollicitations clientèle nous paraissent de petits et grands défis. L'occasion de nous surpasser.
Là, pourtant, malgré notre détermination à mener les ventes les plus audacieuses à bien, nous avions du organiser des renforts. Et des renforts de qualité, s'il vous plaît ! Jugez par vous-mêmes :





Bel engin, n'est-ce pas ?

Oui, je sais, vous me direz, une grue, ça n'est pas bien extraordinaire.
C'est  vrai. Dans ces quartiers de Saint-Jean-De -Luz, il y en a d'ailleurs à tous les coins de rue.
Des grandes, des longues, des plus ou moins hautes, lourdes ou légères. Un vrai ballet d'acier entrelacé en plein ciel.

C'était la première opération de ce genre pour l'équipe de la jardinerie.
Alors, nous ne boudions pas notre plaisir d'être de ce petit événement.
L'équipe municipale avait délivré les autorisations nécessaires, notre opération était on ne peut plus encadrée.

Une petite crispation nous pinçait tout de même les entrailles, une petite fébrilité, devant cette puissante machine au service de notre modeste entreprise.

La filiale de chez Lafitte spécialisée dans les grands ouvrages est évidemment habituée à cette logistique.
Nous, non. Cette opération était exceptionnelle, je vous l'ai dit, une première.




La présence de cette grosse machine au plein milieu de l'avenue piétonne, faisait sensation.
Les passants curieux s'approchaient, se demandant ce qui se passait.
Ils tordaient le cou, en direction de la flèche, et nous avions du mal à les contenir hors du périmètre de sécurité.

Une attraction, autour de nous, une atmosphère de spectacle de cirque.


La bête déployait ses membres pour assurer sa position. Les vérins puissants démultipliaient l'envergure de la machine, dinosaure des temps moderne.

Le grutier, lui aussi plus aguerri aux environnements de chantiers en dehors des cœurs de ville habités, s'amusait un peu de cette nouveauté.

Concentré à la manœuvre dans sa cabine-bulle, yeux levés aux cieux, il exécuta magistralement sa partie.

J'eus une pensée émue pour ses cervicales tellement mises à contribution. Moi, le simple fait de suivre les palettes en l'air durant leur ascension, me donnait déjà presque le tournis. Sans doute les oreilles de cet homme sont-elles en meilleur état que les miennes...







Histoire de varier les plaisirs, j'essayai un autre poste de travail, en me transportant sur les hauteurs.

De là haut, c'était carrément vertigineux.
Pas bien meilleur que le tournis du vu d'en bas, finalement...

Nos badauds, sereinement attablés en terrasse, ne paraissaient nullement inquiétés par la manœuvre pourtant périlleuse.

Pourquoi le serions-nous, nous ?



Sanglée en "berceau", la marchandise s'élevait lentement, balançant à peine, dûment arrimée au crochet en bout des chaînes.

Le mouvement était lent, régulier, solennel.

Je retenais un peu ma respiration, imaginant le poids sur les sangles d'à peine vingt centimètres de large.

Le grutier m'avait parlé de quelques accidents, palettes défoncées et autres.

Au fur et à mesure de l'élévation, le risque paraissait moindre, alors qu'en réalité le danger s'accroissait d'autant.

La machine œuvrait,  impassible.








La palette arrivait au sommet, près de vingt mètres plus haut.

Le grutier ajustait l'inclinaison, et déposait délicatement sa charge, à bon port.

Nous intervenions seulement pour dessangler en haut, et remettre les sangles à la palette sur le départ.

Destination lune, ou presque...




















Un chêne vert, cultivé dans les bonnes terres de Mendionde, suspendu au dessus des toits de Saint-Jean-de Luz.




















Un olivier dans les nuages...


























Toutes ces montées-descentes évitées !

Grâces soient rendues au modernisme, à la puissance et à la gloire de la machinerie bien utilisée par l'homme  !


Les palettes montaient, les unes après les autres, tout se passait au mieux.

Nous étions pris par le temps, nous ne pouvions pas perturber plus longtemps la marche ordinaire de l'activité commerciale de la rue Gambetta.

Notre petite attraction sympathique devait rester limitée sous peine de le devenir beaucoup moins.






Ca ressemblait à un joli fatras, là-haut...

Le client contemplait un peu perplexe cet amoncellement désordonné sur sa belle terrasse.

Nous lui avions promis un petit paradis entre terre et ciel, il avait devant lui un joli bazar !










Bah, une pleine journée de rempotage plus tard, et nous nous faisions forts de transformer la citrouille en carrosse.

Vous voyez tous ces petits sacs de terreaux joliment empilés ?

Imaginez la peine pour les monter un par un au quatrième, sans ascenseur digne de ce nom !

Figurez-vous que, bêtement, j'ai un peu surévalué la quantité de sacs nécessaires.

Mes deux jeunes collègues ont réalisé prestement les rempotages, hier.
Le résultat est magnifique, paraît-il. Je n'y suis pas retournée encore. Mais il reste, oh, pas grand chose... une soixantaine de ces sacs à redescendre, à la main, maintenant !

Quel ennui ! Quand cette opération, la première en son genre, pour nous, se déroulait magnifiquement...

Que voulez-vous,  nous ne pouvons pas non plus nous éviter toutes les peines, en ce bas monde !
Du moins, c'est ce que je vais essayer de faire entendre ces prochains jours, histoire d'atténuer ma bévue.

Je vous laisse ici, et, si j'en ai l'occasion, je vous montrerai bientôt cette belle terrasse bien finie.






Les voici, en différé...


Que notre client en profite et soit remercié de nous avoir donné cette chance de sortir un peu de nos ordinaires.

Nous nous émerveillons de peu, à la jardinerie, un peu comme ici, à Agorreta.

C'est bien pour ça que je suis si bien, à mon travail, comme à la maison !

A bientôt, et prenez l'air, vous aussi, où que vous soyez.