lundi 3 juin 2019

30 mai au 3 juin



Jeudi 30 mai 2019 6h40

Jour de l'ascension. Enfin, quelque chose qui ressemble à une véritable journée de printemps !










Les vaches du cousinou attendent au portail. C'est l'heure de la ration matinale.



7H00 
Le soleil arrive, à gauche de la pinède, loin de Mère-Rhune au repos.



7h50

A Agorreta, les vaches ont mangé. Elles se reposent, avant d'aller au pré.
J'ai fait un tour au cimetière, retaillé les eucalyptus et nettoyé les pétales des fleurs. Des flocons brumeux se soulèvent entre les flancs ronds des montagnes espagnoles.

Le frérot maintenant à la ferme lâchera Bigoudi et les Neskak tout à l'heure, quand le soleil haut aura lapé la rosée de la nuit.
Les cadences ici sont maintenant formatées à la carte, pour les bêtes et les gens.

La jardinerie ouvre plus tard en ce jeudi de l'ascension.
Je vais y aller tranquillement. Saluer d'abord Doudou, puis la laisser avec mon père pour la journée.
Tiens, justement, en parlant du loup, je l'entends en bas se lever, ébouriffer  Bullou dans notre langage chien.

La journée commence en beauté.


Lundi 3 juin 2019 14h38

Les tracteurs vrombissent alentour. 
Les foins sont rentrés, pourtant. Plus que séchés, ils ont été saisis, par la brutale et trop forte chaleur. Février et mars secs, puis mai froid, ont paillé les herbes hautes de l'hiver, sans laisser le temps à la fraîche repousse d'apporter son complément nutritif.  
Ce foin a manqué d'eau, de chaleur, de temps, pour se gorger, s'enrichir de nutriments et maturer à la bonne température. Coupé et couché sur un sol froid et mouillé, il a subitement était vidé de son eau par un soleil écrasant et excessif. Ces écarts dans le rythme lent d'une nature bousculée se répercuteront sur  la qualité de fourrage, sur sa digestibilité et ses apports nutritionnels.
Les vaches mâcheront sans plaisir un foin sans saveur et sans odeur.
Il faudra se souvenir longtemps du parfum de foin coupé dans le champ…

Ici, nous attendons sans précipitation l'herbe rasée en fin d'hiver par les brebis de Joseph-Louis. Nous attendons qu'elle pousse drue, épaisse, et riche. Nous attendons que le sol ressuie en profondeur. Nous attendons une période propice, des journées sans pluie, un soleil bien présent mais pas tyrannique, une brise légère et amicale.
Nous attendons, ces conditions optimales, et peut-être jamais réunies !

Evidemment, notre attente se titille d'une impatience chatouilleuse, de ce petit suspense crispant du foin "à rentrer", de ce doute de ce qui doit être, et ne se pourra peut-être pas...  Notre sagesse de surface se lézardera sûrement à la prochaine éclaircie annoncée. Nous nous précipiterons, alors, invoquant à quelques jours près la saison qui avance, l'épi qui se vide, et les tiges qui cassent.
 Nos théories se couleront dans le pragmatisme des attitudes volages dont nous sommes les jouets soumis, oui, mais lucides, allez !

Mes vaches mangeront ce que nous pourrons leur offrir, avec notre meilleure volonté, certes, mais surtout celle d'une nature capricieuse.
Mes vaches au pré, les Neskak couchées tranquilles autour de la royale Bigoudi, observent sans inquiétude l'avancée de l'attelage de mon frère.







 Il broie les quartiers menacés d'invasion par les "cornes rouges", comme les appelait Mizel, ces rumex aux lances dardées de graines agglutinées, prêtes à se laisser essaimer au premier vent venu.
Elles grapilleront les brins déchiquetés. La repousse sera gorgée de sucs. La prairie toute régulière, sans ces refus disgracieux, disséminés comme de vilaines verrues sombres.

Je prépare mon semis de citrouille. Je suis en plein progrès, capable d'attendre la chaleur infusée sous la croûte, capable de ne pas me précipiter, ou pas trop. Juste assez pour m'en féliciter, du moins.

Je reste corrigible, en chemin, mais loin d'un but qui ne me tente d'ailleurs guère.
Mon tempérament, ma fantaisie dépolluée de ses excès fermement contenus par la molécule, me satisfait pleinement, pour le moment. Je sais la fragilité de ces équilibres vite malmenés, et je tâche de ne pas me réjouir trop vite. Je sais aussi la stérilité des craintes anticipées, la vanité des tentatives d'un raisonnement étriqué.
Je vis mes jours de plénitude et de sérénité, sans arrogance, en presque confiance, en pleine conscience, du moins dans la latitude que nous laisse cette conscience brouillée par l'autre, l'"in", roublarde et manipulatrice, cachée derrière.

On ne refait pas sa nature. On ne la commande pas plus que l'autre, la souveraine.
On s'y plie et on s'y fait une place, la plus confortable possible...

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