mercredi 8 juillet 2020

8 juillet




Mercredi 8 juillet 2020 16h19

Ce petit moment d'écriture s'agrémente aujourd'hui de la compagnie de ma petite Loulou.

Je pensais ce matin avoir perdu ma mécanique numérique. Plus de clic, pas de clac.
Je m'apprêtais, la mort dans l'âme, à pousser jusqu'au prochain centre commercial, pour y quérir un nouvel utilitaire. 
Premier désagrément, aller dans ces centres de consommation surpeuplés en ce moment. La menace coronavirus n'empêche  plus les regroupements. 
Second crève-cœur, acheter, dépenser !

L'envie de titiller le clavier me tenait suffisamment pour surmonter ces deux écueils de taille.
Je me projetais même à effleurer les touches suaves d'un nouveau clavier, plus sensuel que celui-ci. Qui, jusque là, était : "bien bonn avant !".
Comme quoi, d'un chien qu'on veut noyer, on dit qu'il a la rage.

Juste après le repas, la perspective de cette après-midi gâchée ombrait celle de ma sieste.
Une idée me vînt : cette panne mécanique, ne serait-elle pas moins profonde qu'il n'y paraît ?
Beñat, penché sur l'affaire un peu plus tôt, en tenait pour un simple problème d'alimentation énergétique. L'ordinateur, dûment branché sur le courant électrique, toujours aussi récalcitrant et inerte, écarta immédiatement la possibilité de la seule défaillance possible de la batterie.
Il y avait là "zerbait gehio" quelque chose de plus...

Mes conclusions catégoriques n'étonnent plus que moi. Ne voulant pas jeter derechef le bébé avec l'eau du bain, j'examinai raisonnablement le tableau clinique : un ordinateur figé, imperméable à la moindre sollicitation, une alimentation correctement éprouvée, une souris... comme morte, pas du tout verte, et qui ne courait vraiment pas dans l'herbe.


Cette petite souris de bakélite, ou autre composite au nom moins joliment sonnant, anodine et neutre, me tira le neurone vers elle.
Après tout, elle était là, celle-ci aussi, et, mine de rien, elle pouvait à elle seule expliquer le tout.
Tant il est vrai qu'il faut parfois bien peu de chose pour emmerder le monde !

Je la pris en main, la soupesai, la flairai.
Je la considérai comme une possible ennemie, une intrigante potentielle.
Mon regard se fit hostile, ma considération pas distinguée.
C'était elle, je la tenais, la rouée !

Loulou dans les parages vint à ma rescousse. Elle héla une vieille souris avec son bon vieux câble. Nous fourrageâmes la fiche dans son logement. 
Essais. Petit suspense...  Et bim !! l'écran redevint mobile et docile, sagement guidé par la fléchette enfin coopérante.
Je tenais ma coupable, et levai ma peine.
Je n'avais plus besoin de m'expatrier. Le monde et mon blog revenaient à ma portée. Sans un euro à débourser. Alléluia !!

La sieste d'après toutes ces émotions fut longue, profonde, et parfaitement réparatrice.
A mon lever, Loulou m'attendait pour le thé.
Un bien joli moment, à siroter au soleil en bavardant gaiment.

Un autre joli moment, ce fût, dimanche après-midi, notre virée à Sare avec Olivier.
Nous avons suivi des chemins de traverse au long du sentier des contrebandiers.
Ces paysages de sous-bois m'envoûtent de leur ambiance silencieuse et verdoyante. Je m'y apaise et m'y ressource, comme de retour dans une antre ancestrale.
Nous avons marché dans les tâches mouvantes de soleil au travers de la canopée haute plaquée sur le ciel bleu pur.
Nous avons écouté l'eau qui chuchurre et regardé les galets qui chatoient.
Entendu les arbres qui murmurent et frôlé les fougères qui ondoient.

Eprouvé les écorchures des vieux chênes mutilés aux moignons boursouflés d'une souffrance poignante. 
Ici, la taille têtard traditionnelle, cette décapitation pure et simple d'un fût à deux mètres de hauteur, pour récolter les bois, a muté en une forme plus cruelle encore. On tranche dans le vif une branche maîtresse latérale, laissant l'arbre amputé de moitié, complètement déséquilibré avec les départs sur un seul côté.
Toutes ces silhouettes de chênes vénérables, tronqués, déformés, fracassés et mutilés, hurlent de part et d'autres du sentier bucolique.
J'ai eu l'impression de parcourir les allées sous-terraines de cette arène que nous avions visitée en Tunisie. J'avais la sensation d'entendre les cris des malheureux encagés là, attendant d'être livrés aux lions et à la liesse sanglante de spectateurs monstrueux.
Ou alors, je commençais juste à éprouver les joyeusetés de mon Ménière alors débutant !

La barbarie n'est pas que cris. Elle hurle aussi dans le silence de ces bois anciens torturés de main d'homme...


Les jours à la ferme coulent paisibles.
J'ai ramassé vendredi une grosse ratte morte dans la cour, pattes griffues raidies devant elle.
Son long corps mou s'est coulé dans les dents de la fourche. Elle était un peu répugnante. 
J'ai maintenant de ces sensibilités un peu citadines.

Je garde le plaisir paysan de contempler mon monde en ces jours longs.
Et d'y trouver manière de consolation et d'espoir :





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