lundi 8 juillet 2019

lundi 8 juillet



Lundi 8 juillet 2019 8h30




Toute dépaysée d'être à Rivière ce lundi matin, je vais piocher les images d'Hendaye.
Incorrigible moule accrochée à son rocher !

Les coupures dans les rythmes, les temps de vacances où on oublie les cadences du restant de l'année, ce n'est vraiment pas pour moi.
Pour faire plaisir à mon grand mari, et à l'occasion de certaines circonstances exceptionnelles, je prends sur moi, un peu crispée, mais bon, allez, on y va !


Sortie de ma ferme, je pense à la ferme.
Je pense à mes vaches.
Antton s'en occupe tout à fait bien, je le sais.
Mais j'y pense. Comme on se met devant les yeux une image qui vous fait du bien.
Pour ça aussi, Gueguel est bien pratique. De partout, il vous transporte et vous dépose juste là où vous vouliez revenir. Comme c'est commode !









Mes belles au pré :





Bigoudi, égale à elle même, attentive sans être inquiète. Elle regarde l'avancée de sa troupe de petites :







Et les petites s'assurent qu'elle n'est pas trop loin. Entre deux bouchées.







Graziosa, la gourmande un peu godiche,






Katto pelatto, intuitive et sereine,









Neska Motz, la plus petite, courtaude et coulée dans l'ombre portée de Bigoudi,







Buru Haundi, concentrée sur la pitance, l'aînée de la fratrie des Neskak, noire tachetée de blanc, avec sa bonne grosse tête, elle mérite bien son nom.




C'était il y a un mois.
Ma petite troupe est maintenant bien synchronisée dans sa chorégraphie.
Par ces journées chaudes, mes belles se remisent au frais, dans le fond de l'étable.
Elles sortent la nuit.
Elles reviennent à l'attache au moment de la distribution de leurs rations gourmandes.
Histoire de digérer dans les meilleures conditions, elles se couchent ensuite, une heure ou deux, ruminant paisiblement dans cet environnement sécurisant.
Elles sont bien placides, comme doivent l'être des vaches. Elles ne s'impatientent pas, tournent la tête quand elles voient passer du monde, se tiennent au courant de l'actualité locale, sans s'en émouvoir.
Elles connaissent maintenant parfaitement leurs places respectives.
En début d'étable, Bigoudi, bien-sûr.
Ensuite, Neska motz, et Katto pelato. Pour finir la série, Buru haundi, et Graziosa.
La grande est seule dans sa stalle. Les petites couplées par deux.
A leur arrivée, je pensais les apparier différemment : Graziosa et Katto pelato ensemble, les deux noires à côté. Les deux premières m'avaient immédiatement séduite, ça avait été le coup de foudre. Les deux noires, avec leurs cuisses exagérément soufflées, m'attiraient moins. Leur conformation est pareille. D'ailleurs, sur mes images, si on n'y regarde pas d'assez près, on les confond facilement. Neska Motz est tout de même plus courte de pattes que Buru Haundi, d'où son nom, fille trapue. Elle a aussi une tête curieusement fine, en rapport du reste. Ces deux là sont massives, quand les deux autres aux courbes généreuses aussi me paraissent plus élégantes...
C'est Antton qui avait insisté pour les prendre, mes deux noiraudes. Antton et le maquignon, bien décidé à me fourguer le lot. Il avait mis le paquet, y allant d'une sensibilité de circonstances, arguant qu'il ne fallait pas séparer ce que le Bon Dieu avait uni, ou presque. Cet homme ne recule devant aucun mélodrame, pour arriver à ses fins. Et avec moi, il faut dire, il y arrive très bien. J'ai beau repérer ses manœuvres, en flairer sans mal les ficelles, je m'y laisse toujours prendre !
Le plus souvent, pour ne pas dire toujours, je ne le regrette pas.
Là, avec mes Neskak, je m'en félicite chaudement. Elles me rendent au centuple ce que je leur donne !

Une petite hiérarchie, je le disais, se met doucement en place dans le groupe.
Comme dans tout groupe, dans mon modeste troupeau de vaches, il y a la meneuse, et les autres. Dans les autres, il y a encore des sous-hiérarchies. Tout ça fluctue dans une grande subtilité, à bas-bruit, mais sûrement. Comme le mouvement des plaques tectoniques. Des alliances se lient et se délient, des suprématies tombent, des stratégies s'enclenchent.









Bigoudi, par son ancienneté à la ferme, son âge et, pour le moment, son gabarit, garde la tête.
En bonne mère qu'elle est, elle reste bienveillante avec les autres, les guide et les conduit dans les parcours sortie et rentrée. Elles les mène à l'ombre, dans les endroits les mieux rafraîchis par des courants d'air ténus, quand il fait chaud.  Elle leur montre les bons coins, suivant les heures de la journée, où les herbes sont les plus tendres. A flanc de coteau le matin, près de la clôture en bas le midi, et sous les arbres le soir.
C'est elle encore qui donne le top départ des flux et des mouvements de la troupe.
Pas d'agressivité ni d'autorité brutale chez elle; Juste une suprématie installée, et admise, pour le moment...
Elle dirige, sans écraser. Le lâcher se fait toujours dans le même ordre. De la gauche vers la droite, au plus près de la grande porte de sortie. Graziosa d'abord, Buru Haundi, souvent tournée sur le côté, Katto pelatto dont la tête avance sur le bord de la murette de séparation, puis Neska Motz, un peu impatiente. J'arrive enfin à Bigoudi, elle me présente le col tendu.
Du temps de ses filles, Bigoudi faisait le tour des mangeoires de tout le monde, les écartant les unes après les autres. Beltza cédait la place, sans se presser, Rubita toujours craintive fuyait. Cette grande rousse, de loin la plus lourde et la plus forte, se laissait intimider par les autres, fortes de leurs liens de sang, sûrement, quand elle n'était qu'apparentée par le père...

Maintenant, quand je lâche Bigoudi, les petites en sont encore à grappiller un brin de foin ou autre. La grande les longe, sans essayer de les déloger de leur place. Elle s'avance vers le fond, frôlant ou bousculant les cuisses rebondies. Quand elle arrive à la balle de litière, elle s'y frotte voluptueusement, se déhanche et s'agenouille, même, pour se triturer l'entre cornes.
Les petites se reculent, tournent et virent dans l'étable, jamais pressées. Je remets les chaînes en place, nettoie les auges et rince les abreuvoirs. Elles me viennent, appuient leurs fronts sur ma hanche, lapent mon avant-bras de leurs mufles souples  et chauds.
Elles attendent que Bigoudi libère le passage étroit, entre la balle de litière et le Karrarro.
Si on laisse faire, ça peut prendre du temps...
Quand j'ai fini de rafraîchir le paillage, je pousse Bigoudi aux fesses, et détourne les Neskaks  vers la sortie. Tout le petit monde passe au fond, je tire la barrière. Elles déambulent un moment dans la stabulation, grappillant là encore un peu de foin au râtelier, s'abreuvent.
Elles sortent ensuite, toujours tranquilles, comme des reines à la parade.
Pas de précipitation, pas de sauts, pas de bousculade.
Toujours Bigoudi devant.

Vite derrière elle, et, sans doute, très bientôt, devant, vient Buru Haundi.








C'est la plus âgée des quatre petites. Elle va sur sa première année. C'est aussi la plus lourde, la plus massive. Elle le sent. Bigoudi le sent aussi, qui parfois lui fait sentir ses cornes, sans méchanceté, mais avec une pointe de défiance.
Les Neskak ont de leur race ces cornes atrophiées. De petits moignons arrondis pointent à peine de chaque côté de leurs têtes longues.
Bigoudi tient de sa Normandie des appendices bien incurvés, aux pointes dissuasives. De son chanfrein bref, elle leur fait prendre une courbe optimale, pour en chatouiller le flanc de Buru Haundi, à l'occasion. 
Elle voit venir cette concurrence sérieuse. Evalue sans doute le poids de cette suivante, et suppute dans un avenir proche une montée en puissance. Buru Haundi n'est pas une concurrente acharnée à prendre la première place. Elle sent simplement sa force en devenir, et ne s'y trompe pas. Elle sera très vite la tête légitime de la fratrie. 
La passation se fera sûrement naturellement, à l'occasion de la sortie du printemps prochain, au plus tard à celle de l'année suivante. Buru Haundi aura grandi, Bigoudi vieilli, et le rapport de force s'inversera. Ces deux là sont l'une et l'autre lucides et sages. Il n'y aura pas de rivalité déclarée. Un passage de relais serein, et admis. Buru Haundi fera une meneuse de bonne facture, tranquille et juste.
Sa bonne grosse tête velue dit la bête paisible et sans histoires. Ses fortes cuisses bigarrées bien plantées, Buru Haundi avance sans douter.









Plus rarement, Bigoudi  écarte Katto Pelato, dont elle perçoit l'impertinence. Notre petite ambrée, malicieuse, sait faire allégeance, sans plus. Elle est de bonne compagnie, ne se mêle de rien, et reste avenante à tous. Elle lutine ses sœurettes, taquine sans méchanceté aucune. Des quatre, c'est la mieux découplée, avec ses muscles saillants en volumes parfaitement équilibrés. Une beauté !












Graziosa, la grise, est une grande gourmande. Elle m'a beaucoup inquiétée, vite après son arrivée, en restant à terre, toute engourdie par une fourbure sévère. Je m'y suis attachée, dans cette épreuve traversée à ses côtés. Graziosa est la plus haute des quatre. Son appétit vorace lui arrondit le flanc et les cuisses. Ses attaches restent graciles. Son mouvement est hésitant, elle marche avec précaution. Vite distraite, elle se laisse facilement distancer, dans le pré. Elle lève sa tête fine au dessus des herbes hautes, et cherche son petit monde. Elle est très câline, présente volontiers son front à la caresse, et en redemande. Ma grise pommelée est tête en l'air, elle vit sa vie de vache et s'arrondit de jour en jour.








 Neska Motz, est la favorite de Bigoudi. Un air de Beltza petite ? Sa position à ses côtés dans l'étable ? Toujours est-il que, parfois, Bigoudi lape Neska Motz voluptueusement, en cadence, et la petite, bien contente, se frotte à cette mère adoptive.
Finaude, elle n'essaie pas de tirer parti de sa qualité de favorite, sans penser plus loin. Elle a parfaitement repéré la future prédominance de Buru Haundi. Ou alors, est-ce une fraternité de couleur qui les unit ? Elle suit Bigoudi, et se rapproche de Buru haundi. Des deux autres, elle tient compte aussi, mais on la sent moins accrochée.

Tout mon petit monde va et vient dans ce périmètre où chacune cherche encore sa place.
Les affinités se confirment : Graziosa et Katto pelato se suivent de près. Buru Haundi et Neska Motz copinent.
Bigoudi couve et veille.
Les prochaines saisons détermineront la trame encore incertaine
Je suivrai tout ça, observerai, et accompagnerai, comme il se doit.





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