vendredi 8 avril 2016

DÉSORDRES ET PERTURBATIONS



Bonjour aux suiveurs des nouvelles d'Agorreta !








Nous nous retrouvons comme souvent autour des actualités de l'étable, à Agorreta.

La période n'est pas des plus calmes, dans les parages...
Le veau mort-né de Fauvette a créé des perturbations, cousines de celles qui agitent le ciel ces jours-ci.
Le désordre est partout, sur la terre comme au ciel !

Dans un monde idéal, n'est-ce pas,  tout se déroulerait parfaitement, coulerait gentiment en un fil continu et sans nœuds.
Dans la vraie vie, la mienne et la vôtre, aussi, sans doute, les choses se compliquent parfois.
L'imprévu n'est pas toujours une bonne surprise.  Et des écueils dont on se passerait bien se présentent effrontément, les petits diables !

Le monde n'est donc pas parfait...
Ce n'est pas une découverte, je ne l'apprends pas aujourd'hui. Pourtant, en grande  naïve, je continue de prendre les déconvenues avec étonnement, m'attendant toujours à ce que tout aille bien, jusqu'à ce que j' aie  eu la preuve du contraire. L'optimisme s'entretient, et je m'y attache, entêtée et tenace. 
Il se travaille, aussi. Et les épreuves contraires, petites et grandes, font partie des exercices de maintien. C'est ce que j'essaie de garder en tête.

Nous vivons cette semaine à l'étable d'Agorreta une période mouvementée d'adaptation d'après crise. 
Une de ces périodes nécessaires, incontournables et justes, pour passer d'une situation établie à une configuration nouvelle, quand le sort malin s'est mêlé d'embrouiller votre construction patiemment assemblée en chaos.

La nouveauté s'accueille et se digère. Plus vite on l'admet et on se met en position de l'intégrer, mieux on s'en porte, à mon humble avis. Se lamenter sur les pertes irrattrapables est stérile et inutile.

Je tâche de mettre en pratique mes adages, en élève disciplinée et confiante. 
Jusqu'ici, tout a fini par rentrer dans un ordre nouveau, différent de l'ancien, évidemment. Cette évolution a même eu l'avantage d'élargir mon horizon de connaissances. J'ai soigneusement recueilli et engrangé les enseignements tirés de ces expériences. Et je m'en porte bien.

Appliquons donc à notre cas pratique du moment cette petite philosophie :








Petit Breton fait partie de cette nouveauté induite d'un imprévu négatif. Il vient prendre la place laissée vide par le veau mort-né de Fauvette.
Sa première sortie au pré dimanche a failli mal tourner. Une charge offensive de Pollita en colère, une fuite à travers des barbelés blessants, et pour finir une chute dans le ruisseau au bas de la prairie.
Toutes ces péripéties mauvaises remisées dans la vilaine lampe où dormait un mauvais génie qui n'aurait jamais du en sortir.
Dieu merci, plus de peur que de mal pour le petit veau nouvel arrivé : depuis, Petit Breton vit une vie tranquille dans la vieille étable. Il tète le pis de Fauvette matin et soir, se remplit la panse à vue d’œil, et se repose en longues siestes entre deux courtes séances de petits sauts pour se dérouiller les pattes.
Evidemment, Petit Breton aurait été tout aussi bien dehors avec sa mère d'adoption, à batifoler avec les génisses et le premier veau de Pollita. Bien-sûr... mais bon, cela n'a pas été, et ne sera peut-être pas. 
Nous verrons ça dans quelques jours. Quand Petit Breton aura pris des force, j'essaierai encore de le sortir, et je verrai comment ça se passe.

Pour le moment, nous en sommes encore à apprivoiser sa mère adoptive, la grande et belle Fauvette.




Elle est parfaitement remise de ses couches difficiles. Un premier point tout à fait satisfaisant ! Avoir Petit Breton au pis ne lui est pas encore familier, et reste pour elle désagréable. Elle consent à peine maintenant à prendre place auprès de ce petit étranger, en rentrant du pré. 
Les premiers jours, elle faisait volte-face, et ressortait sans se laisser attacher. Les autres suivaient le mouvement, et tout le monde repartait, en grand désordre. Je devais contourner la ferme, les ramener doucement dans l'étable, en essayant au mieux de les rassurer, sans m'énerver et distribuer des coups de bâtons inutiles et complètement contre-productifs dans ces cas là !
Une affaire de presque une heure, quand d'ordinaire, tout le monde est à sa place en quelques minutes...
Les vaches parquées à leur place, les réjouissances n'en sont pas terminées pour autant ! Non, non, non...
Il faut faire téter Petit Breton. Lui, ne fait pas d'histoires. Il est tout prêt à se jeter sur les mamelles gonflées, qu'il a parfaitement repérées.
Fauvette ne l'entend pas de cette oreille. Elle se recule autant que sa longueur de chaîne le lui permet, cherche à repousser le petit intrus en lui lançant des coups de sabot. Je reste à leur côté, flattant la mère et rassurant le petit, essayant de me tenir hors de portée des coups moi-même.  L'ambiance est loin d'être paisible !

Entre deux jetés de postérieurs, Petit Breton happe le téton. Je frictionne vigoureusement le flanc et la croupe de Fauvette, pour lui rendre la chose agréable.
Petit à petit, elle finit pas se calmer, bouge moins, et se met même à manger, en oubliant de repousser Petit Breton. Il profite de ce répit, yeux fermés et queue relevée, la mousse de lait ourlant son petit mufle en cadence.
Là, c'est presque gagné ! Il faut encore tenter de faire visiter les quatre mamelles au petit veau concentré, histoire de vider le pis en totalité.
Pour ne pas lasser Fauvette, quand le ventre de Petit Breton s'ovalise joliment, quand sa succion se fait moins pressante, je l'écarte et le rattache dans son coin. Assagi, il hume sa nourricière, reconnaissant, et elle se laisse toucher, plus tranquille.
Il reste encore à terminer l'ouvrage, en vidant complètement les quatre mamelles. Petit Breton est petit encore, il n'a pas besoin de tout le lait de Fauvette.
Dieu merci, à ce stade, ma belle rousse est apaisée, et elle se laisse traire sans rechigner. Elle en devient même songeuse de bien-être, la tête posée sur le muret et les yeux rétrécis sur un confort apprécié.

Pour finir, une longue séance de caresses, une psalmodie de mots doux et bas. 
Les deux bêtes, la grande et la petite, sont prêtes pour une bonne nuit de repos.
A l'autre bout de l'étable, il faut encore visiter le pis de Pollita, lui aussi incomplètement vidé par le petit rassasié.
Le lendemain matin, c'est la même chose, avec les hésitations de la rentrée en moins, puisque les vaches dorment dedans. L'excitation de la sortie empêche la séance de traite à la main et nous prive de celle des caresses. 
Le temps nous manquerait de toute façon, puisque, avec tout ça,  une bonne heure se passe...

Je suis tout de même satisfaite de nos progrès à tous les trois. Je garde confiance en un avenir plus serein, où Petit Breton tétera en paix, où Fauvette l'adoptera enfin, et où il pourra rejoindre sa fratrie d'adoption au pré.
Les semaines à venir nous diront si ma confiance est raisonnable...ou pas !




Du côté de Pollita et de son petit, tout va bien dans le meilleur des mondes. De ce monde idéal dont nous avons parfois la vision...
Ma seule préoccupation concernant ma grande reine est cette réaction trop protectrice quand elle sent un mouvement autour de son dernier-né.
Une vache peut devenir très agressive en ces circonstances. 

Mon élevage est mon loisir et mon plaisir.
Je suis prête à me donner un peu de peine pour mériter ce plaisir et cette satisfaction. Passer du temps, veiller une ou autre nuit, éviter un sabot leste de temps à autres, pour la bonne cause, d'accord.
Je n'ai pas pour autant le goût du rodéo. Je n'ai pas toujours été capable de dominer suffisamment les instincts de mes bêtes. Pour la mère de Polllita par exemple, j'ai du la sacrifier, faute de pouvoir l'apprivoiser.
Il est trop tôt pour dire comment se comportera Pollita à l'avenir. Ce petit signal d'alerte ne doit pas être dramatisé. 

Bigoudi doit vêler à la fin de ce mois-ci. Nous verrons comment les choses se déroulent pour elle. Et nous verrons aussi comment Pollita accepte ce nouveau petit, près du sien.

Il sera temps alors de prendre des options pour l'avenir. La vie nous laisse cette impression, cette illusion ?, de pouvoir choisir, tout de même. De croire tenir les rennes, quand parfois nous nous demandons si ce ne sont pas elles qui nous tiennent...

Il y a ainsi des inconnus, des surprises, bonnes ou mauvaises, dans toute entreprise.

Nos vies sont des chemins creux aux croisées mystérieuses et incertaines...





J'essaie de ne pas perdre de vue la lumière au delà des ramures sombres et emmêlées.
C'est bien plus facile comme ça, non ?

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire