Suiveurs des nouvelles d'Agorreta, bonjour !
Les jours pluvieux alternent avec les trouées ensoleillées. La période annonce le printemps, et parle encore de possible mauvais temps :
Ce matin, nous avons de la chance, c'est lumière sur la baie, même si le ciel laiteux avertit que nous sommes toujours en hiver. D'accord.
Je vous ai entretenus tout au long de la sombre saison de mes travaux de peinture.
J'avais entrepris un tour d'horizon de mes intérieurs, pinceau à la main.
J'aime bien réaliser moi même ces petits travaux. Le souci d'économie n'est pas mon seul moteur, même s'il n'est pas négligé dans l'affaire, évidemment !
Je sais pertinemment que mon travail est imparfait, totalement hors des règles de l'art. Si je ne le savais pas, certains se chargent de me le dire, les bougres !
J'accepte cette critique, mais je n'en tiens pas plus de compte que ça. Je fais à ma manière, et le rendu me convient, à moi. Alors...
J'ai souvent des petits projets en tête, sans prétention mais très porteurs d'espoir. Ces petites choses de son quotidien qu'on organise, ces petits changements que l'on se prévoit, parlent d'un avenir agréable à vivre, espéré et apprécié par anticipation.
J'aime imaginer les satisfactions convoitées, les améliorations supputées, les plaisirs promis.
A la ferme, il ne faut pas aller chercher bien loin matière à amélioration ! Où que l'on regarde, il y a moyen de faire mieux. Rien n'est figé, rien n'est prévu pour rester tel quel. La vision d'un avenir inerte, aussi optimisé soit-il, ne nous visite pas trop.
Nous pensons le temps à venir comme une plage de découvertes, d'aventures, presque.
Mes bricolages du dimanche, mes heures creuses occupées ici et là, sont une manière d'avancer gentiment, vers un avenir incertain mais amical.
Mes rénovations dans la vieille ferme ne sont peut-être pas bien pérennes. Les fissures maladroitement rebouchées rouvriront leurs sourires narquois dans les coins et les plafonds.
Et alors ? Je recommencerai, et voilà tout ! Ce sera l'occasion de revisiter mon petit monde, de l'enjoliver au goût du moment.
Je suis capable aussi d'une vision à plus long terme. L'avenir ne se pense pas la veille, je le sais. Pourtant, je reste convaincue de la nécessité d'intégrer l'arbitraire dans les projections les plus élaborées. Et cet arbitraire se vit au jour le jour, lui.
Je ne veux pas sacrifier mon bien-être quotidien, mes modestes mais précieuses satisfactions, à un idéal lointain, aussi attirant soit-il. Non, ça, je ne le veux pas.
Peu en ce monde naissent pharaon avec une pyramide en perspective...
Ma vieille ferme me veillera au jour de mon dernier soupir, sans doute.
Ce qu'il adviendra après, je peux essayer de le figurer, mais je n'en serai pas maîtresse. On me reproche assez de tout vouloir diligenter de mon vivant, sans que je pousse le vice jusqu'à vouloir diriger d'outre-tombe !
Cet avenir-là se décidera sans moi. J'infléchirai une courbe à ma manière, et d'autres poursuivront leurs trajectoires derrière moi.
En attendant, je vis, ici, sans grande ambition peut-être, mais avec plaisir.
Je peins, pas pour les générations futures, juste pour masquer les plus vilaines fissures...
Une vieille cuisine multicolore, enjouée et taquine,
Une chambre pimpante et pleine de gentils démons,
Un fuchsia audacieux et des rideaux à pois,
Une sombre armoire luisante et ventrue,
Une salle d'eau tricolore,
Je peins, mettant de la couleur et de l'allant,
Des pans ensoleillés et des frises vieillottes et nostalgiques,
Des corniches en courbe et des cruches rondes,
Des angles noisette et de la faïence rétro,
Je peins, des meubles de rien et des placards presque vides,
Je peins, comme on chante, pour égayer l'hiver et l'humeur sombre.
D'un bout à l'autre de la ferme, mon pinceau à la main, je peins, contente et amusée.
La belle saison va me tirer maintenant dehors. D'autres tâches vont venir égrener mes heures perdues. Ce temps rempli de peu et pourtant plein de sens. Ce sens discret et essentiel qu'il faut couver comme fragile et vulnérable.
J'ai étalé mes couleurs, rafraîchi les vieux murs.
Mon ouvrage résistera ce qu'il pourra, au temps et à la mauvaise fortune. Je recommencerai, ou d'autres le feront, à leur façon.
Pas besoin de se projeter haut et loin pour vivre bienheureux.
Juste besoin de se voir faire, et avancer.
Nous attaquons bientôt les travaux de printemps à Agorreta. Nous nous préparons à cette nouvelle saison, encore, et toujours...
A bientôt, et sachez vous aussi profiter des petites choses de la vie !
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