vendredi 15 novembre 2019

mi novembre



Mercredi 13 novembre 2019 19h40

Ces jours pluvieux d'un novembre trempé appellent aux soirées longues dans les intérieurs qui ronronnent.
Après les mises à l'épreuve des tempêtes, les entrées en hivernage un peu hoquetantes d'un matériel devenu vétuste, tout rentre dans l'ordre. La vieille ferme tourne rond. Il y fait bon.

Je suis allée marcher dans les fougeraies aux frondes sombres écrasées sous le poids de la pluie.
J'ai parcouru mes sentiers favoris. 
Le soleil ruisselle en miel clair sur les noisetiers aux bois sombres.
Il enlumine plus loin d'un or profond les ramures encore feuillées des chênes aux formes rondes.

Tout goutte et glougloute encore sous les herbes froissées. Le long des talus, entre deux fossés, le ruisseau court, bondissant sur les pierres polies.
J'ai happé un soleil bienfaisant, entre deux averses chagrines.
Un ou autre claquement de fusil inquiétaient les chiens et en gâchaient leur promenade.
Encore une affaire de peur vite levée, et jamais tout à fait écartée.

Je marche et je respire mes paysages familiers aux couleurs chatoyantes. J'en fais provision comme de bois. Je les remise au sec, pour m'en réchauffer plus tard.

La beauté vraie se donne et ne se doit pas.
Je l'accueille dans la ferveur d'une gratitude simple et authentique.

J'ai fermé tous les volets. Les vaches à l'étable ruminent les yeux fermés. Les chiens roulés en boule soupirent de bien-être.
Tout s'apprête à la nuit.
Tout est tranquille.
Comme je le suis, là.


Vendredi 15 novembre 2019 15h14

J'étais donc bien tranquille mercredi soir, assurée d'être à l'abri dans mes vieux murs.
Pendant que je soupirais mon bien-être, une petite cascade s'organisait dans le boisseau de la cheminée ouest.
Une petite négligence d'entretien a du favoriser là une ou autre nichée de petits oiseaux des campagnes.
Ma nouvelle installation, quelques séquences chaud-froid, la persistance des précipitations fouettées d'un vent tempêtueux, toute cette conjonction d'insubordination a fait le lit d'un dégât des eaux caractérisé.
La suie gentiment endormie dans les cornières, brutalement liquéfiée par une montée en température un peu brutale, lorsque j'ai allumé mon poêle et l'ai fait carburer, un de ces jours derniers, a du vouloir protester.
L'eau, toujours taquine et prête à un mauvais coup, s'est trouvée là une bonne alliée.
Les brindilles séchées, les fientes durcies, toutes ces petites traces de la vie ailée, se sont mis de la partie, allez !

Résultat des courses : un boisseau sûrement engorgé, juste au dessous de l'ouverture du tuyau de poële.
Celui-ci, à qui les premiers frondeurs ont demandé :

  - Comment vas-tu...yau de poële ?

a jugé plus opportun  de ne pas s'opposer à ce mouvement de masse autour de lui. Il a embrayé, se laissant doucement coloniser par les brindilles enchevêtrées, poisseuses de suie, et mouillées de pluie.

Re-résultat des courses : un début d'inondation dans la maison. Le suintement, le long de la paroi intérieure, aggravé au sol en flaque, d'une eau grasse, noire, épaisse et mauvaise.

Ces jours derniers, je pensais avoir paré à un simple désagrément de très mauvais temps, au niveau de ce chevêtre légèrement suintant, déjà, en effet.
"Rejointoyage" artisanal, lessivage des premières traces de dégât, toutes légères, et bien discrètes, en comparaison de la catastrophe d'hier matin.

Je me croyais tranquille. Je n'aurais pas du !
Le mal était là, toujours en veille, et prêt à l'attaque au moindre signe de démobilisation des troupes du bien.
Ssssaleté !!

Qu'à cela ne tienne !
Jeudi matin, constatant l'infamie lors de ma petite ronde matinale, vite fait, avant d'aller travailler, toujours sous la pluie, à la jardinerie, j'ai contre-attaqué.
Petit un, circoncision des dégâts, essuiyage et lessivage.
Ensuite, les effets jugulés, traiter la cause.
Puisque le problème venait manifestement de ce boisseau en révolte souterraine,  j'allais lui couper son effet, à l'insolent, lui fermer le clapet, à cet impudent.

Sitôt dit, sitôt fait : je suis montée sur les toits, au jour pas bien levé, munie d'un grand sac poubelle plastique, et d'une bonne longueur de ficelle à ballots. La pluie s'était momentanément arrêtée, les lumières de la baie m'éclairaient assez.
Prudemment, pas du tout tranquille, là, pour le coup, je me suis approchée de ce satané boisseau. Une première inspection sommaire corroborrait ma thèse. Autour du petit édifice érigé, tout était en ordre, zincs et tuiles. Le préjudice était bien intérieur.

J'avais en tête la présence de l'antenne dans les parages, fixée à ma fameuse cheminée.
Elle risquait celle-là aussi, de m'être contraire, empêchant l'encapuchonnement aisé que j'avais programmé. Emmailloter le bébé autour de ces membres désarticulés compliquerait de beaucoup la situation de départ, assez simple. Un boisseau à chapeauter, ce n'est pas la grande affaire. Plusieurs râteaux métalliques à insérer dans le dispositif, c'est toute autre chose.

Au premier coup d'œil, je vis le sort contraire s'éloigner. L'antenne m'était même un prompt renfort, puisqu'elle me tendait ses bras où m'arrimer, et se fixait obligeamment au bas de la structure, laissant son sommet bien dégagé.
Bien appuyée contre le boisseau de la cheminée, gardiennée par les râteaux devant moi, hop ! j'enfilais mon sac poubelle béant sur le conduit maçonné. Pour plus de sécurité, j'en enfilais un second, histoire de doubler la mise. Deux trois bons tours de ficelle, et le tour était joué, ma cheminée dûment bâillonnée, et la révolte étouffée dans l'œuf.

Pendant la journée à la jardinerie, me revenait le petit démon grimaçant de la flaque de suie lapant mon carreau jusque sous le grand tapis de laine. Il s'amusait, le petit diable, tout ragaillardi par les averses drues de ce jeudi. J'essayais de le tenir à distance, de me remettre bien au centre l'image de mon chapeau plastique imperméable.
Les volées venteuses malmenaient la capuche de mon ciré, et la certitude du succès de ma parade sur la cheminée.

Au soir, un petit suspense désagréable me mena immédiatement au chevet de la convalescente.
Pas besoin cette fois de monter sur le toit. Le verdict serait tout à fait parlant, depuis l'intérieur.
Je poussai la porte, allumai, m'avançai.
Au sol, rien. Sur le mur, une légère trace, encore. Aïe... Mais non, mais non, me rassurai-je, tu as chapeauté le boisseau, tu n'as quand-même pas asséché la cheminée. L'eau, la suie, et les brindilles sont toujours là. Tu as coupé l'arrivée de l'eau. Très bien. Les survoltés affaiblis d'autant ne tiendront pas longtemps l'assaut. Sans le renfort de la pluie, le tas gluant s'affaissera, le tuyau se retrouvera au dessus du niveau, et l'ensemble ne fera plus suffisamment pression contre le joint du chevêtre pour s'immiscer dessous.
Mes arguments tenaient la route. Olivier au téléphone plus tard dans la soirée m'assura de leur justesse.
Aahh !! Je me sentais mieux. Pas tout à fait tranquille encore, mais en bon chemin.

Ce matin, le verdict s'est confirmé : plus de fuite.

J'ai fait un petit tour des alentours, et constaté :







De l'eau, ici aussi, beaucoup et partout, comme à Rivière lundi.
De l'eau, de l'eau qui court en filet mignonnet, 
de l'eau, de l'eau qui stagne et cerne ces pauvres piquets lacustres,
de l'eau, toujours, alentie en lac au bout d'un ruisseau au long cours,

de l'eau, tombée du ciel sur les hommes et leurs terres,
là où la main de l'homme n'est pas toujours heureuse...

J'ai consolidé tout à l'heure entre deux averses orageuses mon encapuchonnement improvisé. Les sacs de la jardinerie sont autrement plus solides que les miens. Un bon vieux tendeur oublié sur la grille de la descente d'escalier le cerne au plus près de la cheminée.

Un mien cousin viendra prochainement, travailler l'ouvrage en profondeur et le remettre en état de marche.

Tout sera pour le mieux dans le meilleur des mondes, jusqu'à la prochaine avanie.

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