mercredi 4 mai 2016

AGORRETA : LE RETOUR !




Amis du jour, bonjour !









Me voici de retour, après ces trois semaines de retraite silencieuse.
Je devais avoir besoin de ce temps, sans doute.
Je ne saurais pas trop vous expliquer pourquoi, et comment reprendre nos conversations ce matin me paraît mieux venu qu'hier, par exemple.
Une idée à moi...







L'aube idéale semble annoncer une belle journée, pour la reprise.
Le poirier en fleur ombre la pointe exacte du triangle de mère-Rhune.
Les perspectives paraissent printanières, vraiment, enfin !


Je vous ai laissés abruptement.
Une chape pâteux-vaseuse m'est tombée dessus, ces dernières semaines. Et ce poids lourd et inconfortable ne s'est allégé que tout dernièrement.
Une dépression printanière, comme il en est plus classiquement d'automnale, paraît-il... Et pourquoi pas, après tout : c'est bien aussi, un printemps gris et froid, pour se laisser couler gentiment vers le fond, non ?
Enfin, je n'ai pas choisi, ça s'est trouvé comme ça.

J'ai eu pendant cette triste période le ressort d'une serpillière usée abandonnée au fond d'un seau sale. Sans exagérer ! J'étais lamentable, un spectre, l'ombre de moi-même, m'accrochant mécaniquement au quotidien morne, comme à une bouée.
Je vous assure, un sale moment ! 

Je ne suis pas trop coutumière de ces vagues à l'âme où l'on se giflerait d'être aussi mou, sans plus de raison de l'être. Dieu merci ! 
Je n'ai jamais montré trop de compassion pour ceux-là qui se plaignent vite et facilement. Je ne pouvais pas m'en manifester davantage à moi-même, évidemment ! Pourtant, on devrait moins vite hausser les épaules quand des gens sans histoire particulière vous dévoilent leur détresse. La détresse sans justification apparente existe, je l'ai expérimenté. Elle en est d'autant plus insidieuse.

Toujours est-il que je pense en être sortie. Je l'espère, du moins.
Et tout ça, grâce à qui ? Grâce à Bigoudi, et oui !
Toujours, la vache a été pour moi essentielle.

Vous ai-je dit que j'ai été nourrie au lait de vache ? Ma mère s'étant tarie à ma venue, il fallût me trouver nourrisse. On n'alla pas chercher trop loin, puisqu'il y avait tout ce qu'il fallait sous la main, à Agorreta.
Une brave vache me prît à son pis. Ou tout comme...
On comprend mieux mon attachement à ladite bête, n'est-ce pas ?

Mon malaise lourd et épais s'est manifesté après le vêlage malheureux de Fauvette, souvenez-vous.
Ah oui, je ne vous ai pas tout raconté :

Fauvette vêle d'un mort-né. Je prends en pension Petit Breton pour le remplacer :


Ca peut marcher. Mais là, ça ne l'a pas fait, du tout !
Fauvette n'a pas voulu allaiter Petit Breton. Elle l'a rejeté loin d'elle à grands coups de sabots. Pour finir par retenir son lait, au point de se tarir pour moitié, à même pas un mois de son vêlage...
Je vous ai raconté les désagréments induits pour tout le monde, durant cet essai infructueux d'adoption. Je ne m'en sortais pas !

Ce rejet tacite, ce tarissement incongru, m'ont-ils replongée dans ce traumatisme de ma toute première enfance ?
Ai-je ressenti par procuration de nouveau cette souffrance d'alors ?

Ma pauvre mère, paix à son âme, a-t-elle malgré elle semé en moi ce germe réveillé un demi-siècle plus tard, telle la graine indestructible de la grande oseille sauvage ?
Je ne sais, et pourtant, ma réaction outrée résonnait bien d'une douleur profonde et antérieure à l'événement par lui même. Des veaux morts, j'en ai déjà sortis. Des petits adoptés mal reçus, c'est déjà arrivé aussi, à nourrir au biberon, à défaut d'être admis au pis.
Mais un refus de donner son lait quand on est une vache, qui plus est, une vache à lait, là, ça a été trop fort de café, pour moi !

Je n'en veux pas à ma belle Fauvette, paix à son âme à elle aussi. Sa réaction lui venait sûrement de loin, comme la mienne. On ne pouvait décemment pas lui en comptabiliser le débit.

La psychanalyse pour vaches n'en étant qu'à des prémisses floues, j'ai renoncé à faire comprendre à Fauvette son tourment intérieur. Elle devenait aigrie, bagarreuse, elle la si placide jusque là. J'ai du m'en séparer, et la faire abattre. Cela fait partie des tristesses de l'élevage. A l'heure qu'il est, sa chair nourrit d'autres chairs...

Il est trop tard aussi pour aller demander des comptes à ma mère. Elle même sûrement bien incapable de maîtriser ces mécanismes alambiqués. Les choses se sont ainsi déroulées, à moi de m'en arranger !

Petit Breton est retourné à son destin de veau en batterie. Il aura fugitivement entraperçu la lueur séduisante d'une autre vie, promise, puis refusée.

La vie est injuste, tout le monde le sait. Et peu y peuvent quelque chose. Alors...

J'ai vécu cet échec amèrement. J'ai entretenu une angoisse exagérée, à l'approche du vêlage de ma Bigoudi. Je vous l'ai dit, ce moment est toujours mêlé d'une inquiétude raisonnable. Là, ma peur prenait des proportions anormales, et paralysait toute envie et ressort en moi.
Un échec parmi d'autres, mais un coup accusé comme jamais. Tout me paraissait teinté de noirceur, voué par avance à une issue mauvaise. La fatalité finale ramenée à tout et partout ! Rien ne paraissait mériter de se remettre à sourire. Quelle horreur ! Quelle désolation ! 
Je ne me reconnaissais plus. Je me décevais. Je ne m'aimais plus, moi pourtant si bonne amie de moi-même...


Dieu merci, Bigoudi, ma vache, m'a tirée de ce mauvais pas. Comme elle a tiré de ses entrailles cette petite vêle mignonne.





Avec aisance et fluidité, elle a ouvert une voie optimiste de sortie de crise.

La petite sœur de Galzerdi a les mêmes chaussettes blanches que son aînée.







Sa robe est fauve, comme celle de ma grande malheureuse.














Pollita accepte ce petit dans le troupeau sans histoires, naturellement.

Tout devient simple, sans qu'on sache ce qui facilite ici le si compliqué de là...












Mon père ne se demande pas. Mon père observe et se contente.

Moi, je sors de ce marasme visqueux où je m'engluais sans trop savoir pourquoi.
Je ne suis pas sûre encore de ma résurrection. J'en prends le pari, histoire d'impulser un mouvement positif, et d'aider à cette sorte de "renaissance" de moi.
Je me saurai pour la suite vulnérable. J'en ai fait l'expérience, à mon regret et aux dépens des miens, repoussés à la périphérie de cette sphère sombre où je ne voulais plus personne.

Si mon analyse de bazar ne vous convainc pas, sachez que je n'en suis pas plus vexée que ça.
L'essentiel pour moi est de retrouver le goût et l'envie de vivre chaque jour, simple et sain.

De sortir de ces semaines mornes et grises. 

Nos rendez-vous seront peut-être moins fréquents, à partir de maintenant.
Le beau temps nous tire tous dehors. Et mes investigations ne me persuadent pas au delà de ce bien-être retrouvé. Je le sens fragile encore, et veux le préserver comme le bien précieux qu'il est.

A bientôt, et portez-vous bien vous aussi de ce beau soleil revenu !

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