dimanche 31 décembre 2023

SEPTEMBRE A DECEMBRE

 

Dimanche 4 septembre 2023  18h


Je remonte de l'étable. TtonytaPetra viennent de ressortir. Les dernières hirondelles au nid se sont envolées. Si, comme l'année dernière, elles partent vers la mi-septembre, il va falloir qu'elles se dégourdissent vite les ailes !

L'après-midi a amené une soudaine poussée de chaleur. La journée d'hier, à à peine 18°, a engorgé la terre en eau. J'avais repiqué des plants de choux vendredi, ils ont déjà relevé la tête. Des trombes d'eau se sont abattues, sans dommage heureusement. 

Je suis restée gentiment au sec, à la jardinerie, à compulser un ou autre listings. Après les analyses chiffrées, nous en serions à revisiter la nomenclature. Là, c'est un chantier de longue haleine. Les codes, au fil de leur création, ont été distribués dans les sous-familles au gré des uns et des autres : la même espèce devient persistante, caduque, méditerranéenne, suivant le goût du moment. 

Beaucoup de vivaces ont été intronisées graminées, aussi. Certaines vieilles rubriques subsistent du temps où les ventes se portaient dessus. Les thuyas, cupressocyparis et autres conifères de haie, vecteurs de chiffre d'affaire il y a trois décennies, tombent maintenant en désuétude complète. Ils ne méritent plus d'être isolés. 

C'est une refonte ambitieuse, que j'ai initiée là. Je verrai pas plus tard que mardi si nous nous bornons à redémarrer sur de bonnes bases, ou si nous nous attaquons une rétrospective bien plus chronophage. A vue de nez, comme ça, je pense que le retour-arrière tournera court. Si la projection sur l'avenir est assainie, ce sera déjà pas mal.

Je vais aussi me consacrer à la préparation de l'inventaire. Nos jauges sont nettoyées comme jamais, les végétaux à peu près rangés. Je vais revisiter tout ça, espacer les planches, vérifier l'étiquetage. J'ai mon petit plan, où je surligne chaque soir l'avancée du travail.

Ici, le secteur est calme. Je suis allée ce matin ramasser un de mes châtaigniers séchés. J'en ai un autre, je crois, péri lui aussi. Il me tarde la chute des feuilles, pour pouvoir reprendre mon bosquet en difficulté. La terre trop lourde empêche les plants  juvéniles de raciner. Les six "première génération", tirés d'affaire, en principe,  commencent à élargir un houppier bien dru. Pour les autres, je vais les sortir de là, les pauvrets. Ils redémarreront dans des conditions plus faciles, dans du terreau léger, ici, à l'abri et à l'arrosage, si besoin. Je pensais replanter trois tiges hautes. Je vais me contenter d'une. Un bosquet de sept châtaigniers, c'est bien suffisant sur deux ares. Je placerai le restant de ma production, ici ou là, chez Hélène, chez Yvette, pour commencer. Ici, j'aurai à la vue mes arbres, depuis ma fenêtre et la cour de l'étable. 

Le premier châtaignier planté il y a une bonne demi-douzaine d'années n'a réellement démarré qu'il y a peu. Maintenant, il s'élargit beaucoup plus vite, bien raciné. Je le regarde souvent, pour extrapoler sur l'évolution des autres, en bas.

Ma balade du jour me ramène toute griffée. Les sentes se referment à vue d'œil. Le bosquet près de l'anglais-espagnol, est pratiquement fermé dans son entrée Est. La progression là dedans est difficile, l'ambiance est plus caverne que jamais, à l'ombrage dense des châtaigniers larges.

Plus loin, le maïs blanchit. Il est prêt à être ensilé. Toutes les pluies de l'été l'ont fait haut. Les têtes sont belles. Certaines spathes se relèvent autour de l'épi, comme pour reprendre une pousse végétative. 

Par moments, une coulée fraîche s'insinue dans la masse chaude. Les atmosphères glissent en foucades incontrôlables. Pire que dans ma pauvre cervelle !


Lundi 5 septembre 2023    17H


Je surveille d'ici l'arrivée de TtonytaPetra dans l'étable. A cette heure, elles remontent dans le pré. J'ai eu de la visite, cette après-midi, autour de l'arrivée des Junes. Les jeunes cavalières font des projets. C'est plaisant à entendre, et à imaginer.

Je suis harcelée de mouches survoltées. Je leur ai laissé en pâture l'une des leurs, écrasée sur mon bras. Je me suis rendue compte au bout de plusieurs minutes qu'elle n'était pas tout à fait morte, à gigoter sous les assaillantes féroces qui commençaient à la dévorer. J'ai abrégé ses souffrances atroces d'une tape sèche. Les autres ne se sont pas détournées longtemps. Pendant qu'elles sont à leur carnage, elles me laissent tranquille.

Le souffre de sable saharien doit les énerver. Au lever, le paysage ocré m'a évoqué ces éclipses où la lumière baisse subitement. Là, il reste comme un flou, la blondeur en moins.

Je descends. J'irai tout à l'heure au potager, écraser là quelques chenilles dissimulées sous les épaisses feuilles de choux. L'insecte attaque, partout, toujours.



Mercredi 7 septembre 2023  16h20


La chaleur me maintient dedans, tous volets tirés sur les fenêtres fermées. Dans la pénombre, j'ai moins l'impression d'incarcération.

Hier et demain, à la jardinerie, je vais devoir travailler dans la touffeur. J'essaie de séquencer soleil et ombre. L'avancée de ma préparation d'inventaire arrangerait mon affaire.  Si ne venaient pas s'inviter quelques livraisons de plantes à installer. Septembre et la rentrée nous amènent à réapprovisionner, même si les ventes ne suivent pas. Encore une réminiscence tenace.

Ma refonte nomenclature s'avère automatiquement rétrospective. Le système s'en tient aux codes, et va les rechercher, où qu'on les délocalise. Les sous-familles vivent leurs vies autour, et restituent avec constance des statistiques exploitables sur plusieurs exercices passés. Que du bonheur ! Nathalie me  fait une alliée  efficace.

Je pense assainir la base trop touffue d'un historique pléthorique en créations de codes. A la moindre recherche, nous sommes noyés dans une multitude de lignes dont la plupart n'ont pas mouvementé depuis des années. Une référence qui a existé un jour existe pour toujours, dans ce logiciel, même si elle n'a été utilisée qu'une fois. 

Les modifications "en blocs", découvertes hier, vont nous arranger le coup. Ces parasites pourront être isolés dans une sous-famille rebut. Pour les recherches sur le seul intitulé, je pense adjoindre une astérisque ou autre signalement à la première lettre. Comme ça, les indésirables finiront leur carrière en toute fin de liste, là où elles ne nous feront pas perdre de temps.

J'aime, j'ai toujours aimé, apprendre. Les mécanismes informatiques me plaisent dans l'implacabilité de leur logique. J'aime découvrir des possibilités nouvelles, des fonctionnalités ignorées. Je m'y aventure comme en expédition dans un pays étranger, qu'on saurait ami. La machine restitue toutes les données, en configurations compliquées, et nous livre sur un plateau une combinaison prometteuse. 

Je ne suis pas experte en la matière. Juste profane vite séduite. Mon corps de métier n'est pas là, devant l'écran à la lumière agressive. J'y fais des haltes, penchée sur la personne mieux dédiée. Ma contribution reste périphérique. L'avantage est une vision plus large, libérée des blocages autour d'une mécanique parfois rebutante. Quand la machine ne veut pas, inutile d'insister : elle régurgite le plat. Il faut lui présenter les choses autrement, d'une manière convenable pour elle. Alors, elle suit, et précède, si l'enchaînement lui va. Je laisse les rebuffades aux collègues. Moi, j'initie une demande, et j'attends gentiment qu'on trouve le bon filon pour la transmettre à l'intelligence artificielle.

J'attends le soir pour sortir. La nuit est annoncée respirable. Loin des 32° oppressants de la dernière pointe de chaleur. Les organismes vont pouvoir récupérer.

Pour ma fin d'après-midi, quelques grilles de Sudoku vont m'aspirer là aussi dans une logique des nombres et de leur agencement. La saga littéraire du moment, autour du vallon des loups et d'une histoire par dessus le temps, me tient gentiment. La trame est prenante. Une coulée de mignardise l'affadirait.

TtonytaPetra donnent de la corne contre l'abreuvoir. Je vais descendre les panser. Elles sont à peine incommodées par la chaleur. Bien plus par les nuées de mouches. L'étable se vide des hirondelles. Hier au soir, je n'en avais qu'une petite dizaine.

L'été se termine.


Mercredi 13 septembre 2023  10h


J'ai rarement l'occasion d'une halte dans la matinée. La logistique me requiert.

Là, une petite heure me tend ses bras, avant de préparer le déjeuner des familles.

Je reprends la rétrospective de la semaine :


Dimanche 10 septembre 2023  17h.


Je reviens de ma promenade. J'étais seule, aujourd'hui. Les chiens n'ont pas suivi : les premiers tirs de fusil atterrent Txief, Bullou est souffrante d'une griffure de chat dans la joue, je dirais, et Lola flemmarde de sa vieille carcasse engourdie certains jours. 

Ma Bullou a du croiser dans la nuit de vendredi à samedi le chat typé minet, avec sa tête bicolore aux tâches noires et blanches parfaitement symétriques. Le petit fauve se glisse ici par l'étable, au soir, monte, aplati dans l'escalier, pour happer furtivement les croquettes à disposition des chiens. Je l'ai surpris une ou deux fois en revenant du potager à la nuit tombée. Il a filé sans demander son reste. 

J'imagine que Bullou l'a surpris aussi, en sortant dans l'obscurité. Les deux bêtes ont du avoir maille à partir : j'ai remarqué une petite larme dans l'œil de Bullou, heureusement sans plus de mal. Une griffe crochue a du érafler la commissure de sa babine. Elle ne peut pas trop l'ouvrir, et jappe de douleur dès qu'elle essaie de bailler. Elle ne se nourrit que d'un peu de fromage blanc battu, seule texture qu'elle arrive à laper dans l'entrebâillement étroit de ses mâchoires. 

Je n'ai rien vu, puisqu'elle hurle dès que j'essaie de pousser les investigations dans l'intérieur de sa gueule. Elle n'est pas fiévreuse, et ne paraît pas souffrante, en dehors d'un laps de temps de quelques heures après le moindre tiraillement, où elle se tapit dans un coin, comme à l'article de la mort. Ensuite, elle repart comme si de rien n'était, oubliant ses douleurs, guillerette comme jamais. Difficile à suivre, cette petite chienne si émotive... Je surveille.

J'ai profité de la campagne tranquille, où je n'ai croisé qu'une seule promeneuse dolente. Dans les parages du champ des Junes, sur le chemin ombragé des noisetiers penchés, un faisan marchait. Quand il m'a vue, il a précipité son pas. Je me suis étonnée qu'il n'aille pas se cacher dans les fourrés tout proches, comme l'aurait fait n'importe quel animal un peu sauvage. Celui-ci, il était moins dégourdi qu'une poule domestiquée échappée de son poulailler ! 

Au passage, je ne vois pas l'intérêt pour le chasseur de tirer une volaille sur un chemin, à découvert. La traque, l'affût, toutes ces sensations soi-disant uniques du chasseur en chasse, je ne les conçois sûrement pas dans ces conditions. Autant tirer dans la volière fermée d'où ce simulacre de gibier est sorti la veille.

Je me suis fait la réflexion en ayant tout loisir d'observer ce faisan, que celui que je fantasme, venant le soir picorer autour des carolins, n'est sans doute qu'une vulgaire tourterelle, grasse et ordinaire. Même si mon mépris ne se justifie pas, honte à moi !

Tourterelle grasse de grains picorés autour des poulaillers, des miettes de pain distribuées dans les villes, ou faisans élevés en cage, sont à la faune sauvage ce que le sucre raffiné est à la canne : un lointain cousinage dénaturé.


Lundi 11 septembre 2023


Le matin boursouffle des bouillons de nuages en crème fouetté dans un ciel pâle. L'ambiance est résolument automnale. Les hirondelles sont parties, en majorité. Reste dans la porcherie-remise la dernière famille.

Hier soir, les fêtes de Fontarrabie ont interrompu leurs canonnades, quand un violent orage annoncé d'éclairs silencieux nous a fondu dessus en chevauchant la crête du Jaïzkibel. Des hordes sombres ont déversé une eau rageuse. Ma porcherie ne fuit plus. Les dernières averses conséquentes ruissellent par les chemins et dans les rigoles, et mon plafond reste sec. Je scrute, méfiante encore. J'y croirai tout à fait à la sortie d'hiver.


Triste anniversaire de la folie des hommes conditionnés par une idéologie délirante.

Moi, je fais encore des rêves de bravoure. Ma scène est plus intimiste. Je me suis toujours fantasmée courageuse, héroïne de situations dangereuses. Dont je me tire bien, ou pas. Plutôt pas, d'ailleurs,  puisque je me débats souvent dans une fuite peu glorieuse. Dans ma jeunesse, évidemment, j'infiltrais là dedans une romance sentimentale. Là, tout ça est complètement neutralisé, figé dans un passé dont le souvenir m'attendrit, sans m'émouvoir.


18H

L'orage est en approche. Le vent se lève et fait trembler le feuillage du carolin. Je suis à la sortie de l'étable. Je contemple un fond de paysage agréable, entre bosquets sombres des conifères et plus clairs des feuillus. La mer là derrière surligne sa barre métallique. 

TtonytaPetra lambinent dans la cour, rassasiées, brossées, toute belles. A un moment, je vois Ttony happer un arbuste de l'autre côté de la clôture. En principe inaccessible, et dont pourtant elle tire les ramilles. Je n'ai pas l'occasion de m'étonner longtemps  : le piton d'accroche des fils ronce s'arrache du mur, et l'ensemble se détend, flageolant piteusement. Mince ! Ma barrière a lâché ! Je me souviens bien de la fixation de ces pitons. L'enduit du mur est en mauvais état, à cet endroit. Nous avions navigué un moment, cherchant dans l'étroit espace disponible une support sain. Sans le trouver, à priori.

Je rafistole avec les moyens du bord. La platine d'arrêt de la porte métallique paraît solidement fixée. Je tire là derrière mes fils, je les accroche les uns autour des autres. L'effet est désastreux, mais au moins il retend la clôture. Je m'amuse davantage à reclouer des crampillons sur les piquets. La tension est ainsi répartie. Je surveillerai, évidemment, pas trop sûre de mon travail.

Les premières gouttes de pluie s'écrasent sur le béton.


Mercredi 13 septembre 2023.


Jour anniversaire de la naissance de mon père. Paix à son âme.

Je ne sais pas si c'est en rapport : je me suis réveillée ce matin avec une pensée légère. Je me suis fait la remarque réjouissante que toutes mes ardeurs et mes élans passés, toutes les glissades vers un marasme latent, toutes mes pointes de presque sérénité, contiendront facilement dans une petite urne modeste.

Bizarrement, cette pensée morbide ne m'a nullement plombée. Au contraire, elle m'a tiédie d'un réconfort incongru.


Retour à 11h

Avec toutes ces réflexions profondes, l'heure a tourné. Je vais m'occuper en cuisine, puisque, en attendant l'urne, je dois habiter le présent.



Jeudi 21 septembre 2023  15h40


La pluie a déposé un rideau d'eau en suspension dans l'air, depuis le milieu de la matinée. Là, la lumière revient. J'irai promener tout à l'heure, après ma rétrospective hebdomadaire, plus ou moins.


Vendredi 15 septembre 2023


Nous avions rencard avec notre Raquel des Andes, ce matin. Nous avons profité du "voyage" pour faire une visite guidée chez Lafitte, en famille. Je leur parle de mes petits chantiers en cours. Une illustration sur le terrain sera plus explicite.

Nous avons dolemment arpenté les allées de la jardinerie, en trio. Les collègues amusés nous ont salués, nous avons échangé quelques civilités avec les uns et les autres. Je faisais le guide, sans m'attarder trop. Mes frères ont observé, intéressés mais sans plus. "C'est grand", a dit l'un. "Il n'y a rien de droit, ici !" a remarqué l'autre. En effet. Derrière la façade étroite, le bâtiment entoure la pépinière, tout en longueur. Et, en effet aussi, les rajouts successifs, le terrain remblayé à la va-vite, produisent un effet désarmant de coins, de recoins, et de faux niveaux déstabilisants.

Nos marquages au sol, à l'orange passable, déroutent de leurs sinuosités amateures. L'effet est incontestablement inabouti. Je reprendrai sur l'automne.

Mes ouvrages de la période n'ont pas suscité grande admiration. Nous avons la veille commencé le remplissage en béton de nos futurs socles de maintien. Là, l'opération suivait son cours.

Les frérots ont noté une ambiance générale agréable, très détendue, presque trop. Nous sommes au creux de l'activité, et un léger relâchement se ferait vite sentir. L'inventaire proche ne mobilise pas les troupes : il n'y a que moi que ça mette en effervescence !


Samedi 16 septembre 2023


Je me suis fait une tonne de béton. Il faisait un peu chaud dans l'après-midi, je commençais à sentir le poids dans la pelle. J'avais plus ou moins programmé le remplissage de 12 pots, en tenant compte de la cadence du matin. Les heures passant, la fatigue aidant, j'ai eu bien du mal à finir le dixième, dans la dernière demi-heure.

Nonobstant, je suis contente de mon travail : la veille, treize pots ont été remplis, avec le relais de plusieurs équipes masculines. L'honneur est sauf. Je suis en congés pour une semaine à partir de ce soir. Je ne verrai pas l'effet rendu avant la semaine suivante. 

Antoine m'a fait remarquer, lors de l'un de ses passages de contrôle "petit caporal", en réception, que mon béton était très "liquide". Et prédit un séchage aux calendes grecques, l'animal ! Avec les platines périlleusement maintenues par des tuteurs fragiles posés en travers des pots, il ne donnait pas cher de l'ensemble. Vexée de son absence d'adhésion, je lui ai proposé de s'assoir dans un de pots, et de voir ce qu'il en serait pour le lendemain. J'aurais donné cher pour le voir tenter de se relever de là, tel le poussin juvénile incapable de se défaire de sa moitié de coquille accrochée à son cul. C'était une façon de parler, bien-sûr, je ne compte pas couler ce garçon en son fondement dans le béton ! 

Rentrée ici, le whisky-sangria du samedi m'a immédiatement enlevée vers un état second des plus agréables. Je voyais le monde paisible, les gens charmants, l'avenir tout à fait séduisant. A la nuit maintenant tôt tombée, j'ai avancé sur le chemin, contemplant euphoriquement les lumières piquetées dans la baie. Comme c'était "jeuli !". A ce stade, tout l'était, même la silhouette passablement massive de mon tas de fumier. 

Pour parachever ma détente musculaire, j'ai esquissé quelques étirements au poteau d'angle de la clôture, toujours face à ma baie féérique.

J'étais au meilleur de l'enivrement : à son tout début, juste après la phase décontractée, et avant celle trop décalée de la réalité. Je flirtais tout de même vers le niveau haut, et me promis d'être plus parcimonieuse dans ma dose alcoolisée à l'avenir.

Je tiens à ne pas me laisser entraîner dans la spirale insidieuse où le même effet demande un taux de plus en plus élevé. Gare, gare !


Lundi 18 septembre 2023


Je suis à fond dans la peinture de mes bois. Le "durcisseur" adjoint à la peinture exige une utilisation dans les 24 heures. Au prix du pot, autant dire que je vais l'employer dans le délai imparti, quitte à y passer la nuit. Je badigeonne avec application.  La fourniture est de très bonne qualité, le travail se fait facilement, avec un rendu impeccable. 

Mon seul doute vient de la couleur, un peu sombre peut-être. Un petit côté terne, pas trop assorti avec mon camaïeu de verts sur les murs. Le gris-vert élégant de l'échantillon cartonné, appoint parfait des tons autour, virerait kaki pas trop heureux dans cet ensemble.

Le vent du sud en rafales fait rapidement sécher tout ça. La teinte prend en profondeur, accentue l'ombre, mais s'harmonise mieux avec le reste. J'attends la stabilisation de la couleur, sur plusieurs heures encore. Après tout, les effets convenus, les associations attendues, ce n'est pas ma tasse de thé, on le sait. 

Libérons-nous des carcans esthétiques admis, et osons, osons l'audace des expérimentations inédites, osons la disharmonie, osons le laid, s'il le faut ! Je me suis pas mal embêtée sur la rampe d'escalier en son retour sur la mezzanine, à louvoyer entre les barreaux croisés. Que ce soit joli ou pas, ça restera comme ça ! Je ne vais pas dépareiller le tout en repeignant les parties faciles. J'introniserai ce vert en beau, envers et contre tous, s'il le faut !

Dans l'étable où je ne suis descendue que tard en soirée, à la fin de mon chantier du jour,  il ne reste plus qu'une seule hirondelle. Les derniers petits sont partis, celle-ci fait voiture balai.

TtonytaPetra commencent à s'agiter en chaleurs.


Mardi  19 septembre 2023


Emportée par mon élan, j'ai repeint tous les bois. Je n'avais pas prévu de reprendre les lambris, une ou autre porte, et certains tours de placards. L'intention de départ était de pallier l'écaillement du gris appliqué sans fixateur sur des bois vernis. A savoir les rambardes de la chambre en haut, la balustrade de l'escalier, les deux poteaux et la panne de la pièce principale. La seule, d'ailleurs, principale et annexe à la fois. Le reste tenait bien, travaillé dans les règles de l'art par votre serviteur. 

Mon vert kaki gagne au séchage complet. Là, je retrouve la promesse de l'échantillon. Séduite, je décide de l'étaler partout, pour ne pas m'éparpiller en touches différentes. Finalement, ce deuxième jour prévu plus léger se densifie de la multiplicité des reprises à faire. Mais le résultat est là : je sais maintenant l'effet terminé, je ne me laisse plus dépiter par les variations intermédiaires. Je peins, je peins, tout ce qui me vient à portée. Les surfaces se répondent en un chant chromatique parfait. Je contemple, satisfaite complètement.






Ma vieille commode aux tiroirs disloqués ne sera pas épargnée. Elle a subi quelques estafilades disgracieuses. Qu'à cela ne tienne !

Je me la joue facile, me contente de remaquiller les surfaces planes. Ca, c'est du travail comme j'aime, vite fait, rendu immédiat, effet assuré !

D'après moi, la quintessence du bon goût...



Mercredi 20 septembre 2023


La dernière hirondelle est partie.

Dans la porcherie-remise, je trouve des crottes. A l'examen, j'identifie un hérisson. J'ai vu les mêmes traces dans la cour-jardin. Je me demande si ce n'est pas lui, plutôt que le chat, que Bullou a croisé l'autre nuit. Il doit venir manger les croquettes dans la gamelle des chiens. En voulant le mordre, elle a pu se blesser la gueule à ses épines acérées. Je vais laisser un peu de nourriture, en bas. J'aime bien l'idée d'avoir un hérisson dans ma remise. Il y en avait un dans le garage de la Clio. Un aussi dans le hangar, qui sortait ses petits à la fin du printemps. Peut-être le même ? 

Cette petite faune vit sa vie autour de moi. Hirondelles, chauve-souris, maintenant hérisson, je reconstitue mon cheptel. Rats et souris suivent partout, sans être les bienvenus. On ne choisit pas tout...

Dans les indésirables, j'ai aussi débusqué dans les aines de Ttony une petite colonie de gales. J'en avais repérées quelques unes sur l'arrière de son pis, à l'endroit où les replis de peau sont d'une suavité de velours. Je traite avec une pommade à la texture d'argile, agglomérat de souffre et d'huiles essentielles. Les sales acariens s'asphyxient, et se décrochent, morts. Là, l'attaque est plus étendue, en croûte épaisse. L'offensive est de masse. Ma réplique le sera tout autant. En plus de l'application de la pommade, je vais quérir le houx protecteur. Il se peut qu'en séchant, il dégage des effluves répulsives. Ou alors, c'est encore une de ces croyances infondées. Ou pas. 

Il convient d'attacher au dessus de l'animal infesté un rameau de houx, alors, en baies, ou pas, selon les uns ou les autres. Le lieu de prélèvement fait aussi débat : commune voisine sans traverser de cours d'eau, ou dans la même commune, l'histoire ne dit pas cours d'eau ou non.  Un peu d'aléatoire ne nuit pas, j'espère. Pour ma part, je cueille le houx près du châtaignier de la fougeraie : commune voisine, donc, sans cours d'eau. Chacun son chemin de vie dans le fatras des légendes et traditions ancestrales.

J'ai eu ce matin une autre surprise désagréable. Décidemment...

En regardant distraitement par la fenêtre, vers le pré où paissent TtonytaPetra, j'ai remarqué dans le fond une tige blanche, affalée dans l'herbe. Aïe!!! Mes tubes protecteurs de châtaignes auraient-ils chu ? Ou, plutôt, les génisses désœuvrées les auraient-elles arrachés ? Quid des châtaigniers là dessous ?

Derechef et sans barguigner, je me suis précipitée sur zone. Là, j'ai du constater : deux châtaigniers à terre, les tubes catapultés un peu plus loin, tout ce petit monde gisant lamentablement. L'un des plants était cisaillé, à une vingtaine de centimètres du sol. A l'examen, il n'était pas en grande forme, avec son aubier sec. Le second avait carrément rompu au collet. Celui-ci, je l'avais déjà répertorié mort. C'est une consolation : les plants sains n'ont pas été touchés. Ceux-ci devaient déjà tanguer de leur finitude. 

J'ai prévu la reprise de mon bosquet pour fin octobre ou novembre. Ce serait dommage que, d'ici là, il n'y ait plus rien à reprendre...


Jeudi 21 septembre 2023


Je suis allée en expédition quête de houx ce matin, avant la pluie. Finalement, Petra a aussi quelques pointes de galles. Le bouquet d'hier pend au dessus de Ttony. Il m'en fallait un pour Petra. Je me suis équipée d'un ébrancheur télescopique, pour pouvoir cueillir des branches avec des baies. Celles d'hier étaient juste en fleurs, seules accessibles sans outil. Là aussi, le stade végétatif est approximatif. Je pare au plus large spectre.

Quand TtonytaPetra rentreront, elles auront au dessus de leur dos les deux bouquets en gris-gris. En complément, je vais nettoyer le maximum de croûtes neutralisées dans le souffre en pommade. Réappliquer sur la peau nettoyée. Ca va nous faire pour quelques jours un rituel supplémentaire. Les bêtes aiment ça, soulagées de leurs démangeaisons. Et moi, j'aime soigner. 

Ca m'a toujours plu. Hommes, bêtes, ou plantes. Avec plus ou moins de succès : je me souviens encore d'une pauvre poule à la patte gangrénée, que j'avais d'après moi très bien soignée, et dont le membre noir de pourriture tomba un beau matin, au pied de ce même poirier en face de moi, laissant ma poule sauve, mais plus du tout ingambe.

Je vais attacher les deux génisses pour les soins. J'attache déjà Ttony, pour qu'elle ne monopolise pas le râtelier, en empêchant Petra de manger. La miel est devenue implacablement dominante. La brune fait allégeance, soumise, résignée. Je compense, en entravant la première, ou en distribuant à l'autre le foin et la luzerne plus loin, à la barrière. Petra gagne ainsi ma préférence, et ma compassion. 

Les forts n'ont nul besoin de réconfort, quand les faibles qui la requièrent humblement s'attirent l'attachement  de ceux qui ont connu la même condition vulnérable. Ainsi soit-il.

La sororité n'existe donc pas plus que la fraternité. Ces deux là s'entendent pourtant très bien. Ca n'empêche, l'une doit prendre le dessus sur l'autre. La relation harmonieuse et respectueuse d'égal à égal n'existe pas, chez la bête, pas plus que chez l'homme. Tout est toujours lutte et combat pour le pouvoir et la suprématie.

Liberté, égalité, fraternité, belle devise et  leurre profond...


Dimanche 1 octobre 2023  16h


L'automne couche l'ombre du carolin loin dans la prairie. La lumière oblique cisèle moins les reliefs. Les plans se confondent en un horizon plus diffus. 

Retour de semaine :


Vendredi 22 septembre 2023


Ma virée bibliothèque m'a offert l'occasion d'une balade urbaine dans le cœur de cité. J'ai parcouru les rues autour de Belcenia et de l'église, sans presse, en touriste de ma propre ville. 

Ensuite, histoire de faire marcher les chiens, j'ai prévu un détour par la montagne. Sur le front de mer, une large barre gris acier assombrissait l'atmosphère. L'eau là dessous était métallique, en lignes immobiles. C'était magnifique.

En principe, le mauvais temps par chez nous s'évacue sur la mer. La menace obscure sur l'océan ne me paraissait nullement inquiétante. Nous nous dirigeâmes vers les hauteurs. Je me promettais un panorama fantastique, avec ce ciel d'airain sur les paysages brun-verts. Je garais la voiture sur le haut du chemin. C'était en effet très spectaculaire. Je descendis. Les chiens ne paraissaient guère enthousiastes. Ils me suivirent quand-même.

En descendant la sente, je resserrai autour de moi ma veste : une pluie fine s'était finalement décidée à tomber. "C'est une queue de traîne" me dis-je. "Ca va s'arrêter". Les chiens se tenaient au plus près de mes jambes, moins optimistes, sans doute, eux.

Quand d'ordinaire donc, la pluie fuit sur la mer, là, inhabituellement, elle revint vers moi. Je trouvais abri sous un chêne large, près de mes hautes colonnes de pins. Les chiens autour de moi s'assirent. Le feuillage nous protégeait. La pluie fine s'était constituée en hordes plus drues, et têtues. Je contemplais les volumes des bosquets gris sur fond sombre du bois devant moi, les masses de nuages noirs dans le ciel. Comme c'était beau ! J'étais proche d'un état de sérénité. Cela me dura un bon moment.

Un peu plus tard, la pluie redoublait. Les lances fines devinrent brutales. Le feuillage commençait à goutter. J'hésitais à repartir. L'averse se calmerait sans doute. Le temps passait. Je n'étais pas spécialement pressée. Mais les augures ne s'annonçaient guère favorables. 

Les chiens me regardaient, piteux. A un moment, je me décidai : resserrant encore les pans de ma veste autour de moi, je me mis en route. Le chemin n'était pas bien long. J'arrivai tout de même rincée, les bottes emplies d'eau froide, le short plaqué sur les cuisses en une étreinte désagréable. Les chiens couraient dans mes pieds, gênant la marche. C'était très inconfortable, et pourtant, je me sentais euphorique. Une crise de rire me secoua, incongrue, irrépressible.

Nous arrivâmes enfin au port, à Grand Modus, au sec, trempés jusqu'aux os. Sur la montée d'Orio, je vis un homme plaqué contre un mur de garage, à l'abri de son avant-toit étroit. Il avait posé à ses pieds un cabas. Le sac entrouvrait sa gueule juste à l'aplomb de la gouttière. Il arrondissait déjà un ventre mou bien pesant. Je ne donnais pas cher de son chargement, et m'amusais "incharitablement" de la déconfiture de mon réfugié.

L'épisode de la course sous l'averse me rappela une scène de mon "été à huis-clos". Une œuvre majeure qui ne trouva pas d'éditeur. Mon talent a toujours été incompris...

Là, je m'imaginais bien plus jeune, 25 ans. C'était un moment à vivre, anticipé en prémonition précise. A quelques décennies près.

En ce temps là, il n'y avait pas de "blog". C'est dommage, j'aurais pu prouver ma thèse de redondances temporelles. Là, comme je suis toute acquise à moi-même, je n'ai pas grand monde de plus à convaincre.


Samedi 23 septembre 2023


Avec Olivier nous avons retravaillé mon bosquet de châtaigniers. Nous avons avancé notre programmation. Les génisses joueuses m'inquiétaient trop. Je n'ai pas voulu risquer l'hécatombe, le spectacle affreux de mes plants renversés comme des quilles au jeu. Les plus petits sujets ont été arrachés, avec un maximum de motte. Je les ai replantés, et abondamment arrosés, pour optimiser les reprises.

L'ensemble a maintenant bien meilleure allure. Les châtaigniers rescapés se dressent, bien emmaillotés dans les tubes, solidement maintenus par des tuteurs d'acacia. Leur houppier s'évase, modeste encore, en devenir. De la maison, je peux les voir. La prairie n'est plus encombrée de silhouettes confuses. L'ensemble est net, et prometteur.

Je suis tout à fait satisfaite de notre journée.


Dimanche 24 septembre 2023


Journée retrouvailles avec les amis. Une halte aux myrtilles, où Hélène a fait un gros travail de débroussaillage. Un repas un peu huppé pour moi, avec une nuée de mouches en complet décalage. Retour par Bidache, où le vieux Norfolk m'a mordillé l'épaule, pendant que je caressais ses naseaux soyeux.


Jeudi 28 septembre 2023


Retour d'inventaire. Tout s'est bien passé, après deux jours de préparation intensive. Une grosse vente m'a retardée mercredi. Mais bon, priorité aux priorités.

Ici, pendant la balade du soir autour du potager, les chiens s'encollent des graines de chiendent gluantes. Les petits médaillons s'accrochent à tout ce qui passe, bien décidés à disséminer au plus large.

Sous le buffet, ici, un grillon perdu cherche une échappée à grandes rotations d'antennes. Je le prends et le dépose sur l'herbe, au bout du balcon.


Samedi 30 septembre 2023


J'ai oublié de changer l'heure du réveil de jeudi matin. La sonnerie m'a tirée du lit à 5h30, une heure avant l'heure habituelle de mes jours travaillés.

J'en ai profité pour terminer quelques retouches de peinture.

J'ai bien aimé cette ambiance nocturne, cette impression d'avoir le monde tout à soi, quand autour rien ne bouge dans la nuit tranquille. Ca m'a rappelé le bon vieux temps. Sans m'en donner le regret.

Derrière le carolin, la lune pleine arrondit un halo à peine brumeux.

L'après-midi chaude nous a trouvés dans la cour de la réception, à hisser de gros sujets dans le fourgon, en prévision de la livraison de lundi matin. Ma grosse vente de mercredi. Je me suis amusée à ce Tetrix. Il faisait bien chaud, mes collègues ont un peu renâclé, mais ont prêté main forte efficace. 

Revenue ici au soir, je me suis détendue de cette saine fatigue, dans l'air encore tiède mais moins étouffant.


Retour à ce dimanche 1er octobre.


Une grosse machine mugit sa puissance. La récolte de maïs laisse les cannes à broyer. Quand, avant, le ramassage manuel se faisait dans les rires, au seul son cadencé des épis tombés dans les corbeilles, maintenant, il se fait dans un bruit infernal. Le paysan moderne chope plus facilement des cals aux fesses, assis sur ses engins surdimensionnés, que dans la paume des mains, à manier l'outil...

Je garde le goût de ces choses de la terre. Je m'intéresse. J'ai trouvé la cueillette hâtive. D'un échantillon prélevé, j'ai examiné le grain : pas de point noir physiologique signe de pleine maturité. Le grain ne moisira sans doute pas, mais la valeur nutritionnelle n'y sera pas ... 

Le paysan n'observe plus, il programme, nez au vent, irrespectueux des rythmes naturels et des cycles de maturation. Il n'étudie pas dans son champ, il regarde la météo sur Internet, et son agenda, la disponibilité des machines. Le reste se pliera. Ou pas.




L'amidon n'amidonne pas. La vache s'acidose. La viande stocke les toxines et le lait s'appauvrit en protéines. En bout de chaîne, humains consommateurs, payons le prix de nos présomptions à dompter les éléments. Honte et malheur à nous !

Ca aussi, ça me rappelle le bon vieux temps. Celui de mes études appliquées.

Toujours sans regrets. Je suis passée au pur agrément. C'est bien plus léger.

Les enjeux agricoles sont plus maintenant dans la constitution des dossiers de demande d'aides financières que dans les champs. C'est bien dommage...


Lundi 2 Octobre 2023


La soirée d'hier était idéale, avec une pointe de fraîcheur après le jour chaud.

La nuit a viré tout ça en un vent du sud au souffle désagréable. J'ai condensé mes sorties ce matin. Là, parfaitement et naturellement climatisée dans la maison, je vais m'employer à découper une ou autre citrouille pour mes soupes d'hiver. Elles ont finalement suffisamment raciné, mes petites graines livrées à la croûte herbeuse. Plusieurs jolis fruits arrondissent leur orange flamboyant en bout de potager. Je ressortirai tout à l'heure, pour faire la tournée de mes bacs dans la cour.



Dimanche 8 octobre 2023  16h40


La chaleur s'allège déjà des ombres longues. La récolte du maïs ramène à ma vue l'anse de la baie laiteuse d'une brume diaphane.


Retour à vendredi :

J'ai passé la plus grande partie de ma journée à repenser ma décoration intérieure. Après la peinture des boiseries, je me suis aperçue que les couleurs plus chaudes s'alourdissaient des trop nombreuses images sur les murs. J'ai repris tout ça, décroché tous les tableaux. Les pans nus se rendaient vulnérables de toute cette virginité.

J'ai remis quelques tableaux, bien moins, et majoritairement plus petits. Ma production artistique pour la plupart. Là encore, des œuvres majeures pour le moment ignorées des profanes. Les rares bibelots autorisés jusque là ont pris congé sur l'étagère d'un placard dédié. Un jour, plus tard, lors de ma prochaine phase, ils seront sans doute réhabilités. 

J'ai aussi mis à l'étude les éclairages. Il me manque quelques connaissances techniques. Je me suis contentée d'harmoniser les puissances des différents points lumineux. Jusque là, certains s'éclipsaient de la suprématie d'un autre. Là, il me semble que chacun parle, et que sa voix est mieux entendue. 

J'ai encore fait un bond dans le temps de plus de trente ans. Je me suis revue, quand j'avais emménagé dans le vieil appartement d'à côté. J'avais entre autres suspendu un couvre-lit aux nuances mordorées et bleues au dessus du canapé, lui aussi bleu et or, dans des tons plus mats. Depuis le pas de porte, j'admirai cette association théâtrale, séduite complètement. 

Durant ma semaine travaillée à Tyrosse, je repensais à mon intérieur douillet et chamarré. J'avais hâte d'y être à nouveau. Là aussi, les points d'éclairage étaient d'après moi savamment disposés. L'impression était très cosy. A l'époque, c'est sûrement ce dont j'avais besoin. 

Je n'ai paraît-il pas grand goût en matière de décoration. Disent les méchantes langues. Quand je revendique que le bon goût est affaire d'appréciation, plutôt de plaisir, très personnelle. On ne me suit pas, sur ce coup là. Qu'importe ! J'ai l'usage maintenant de cheminer seule mon train. Néanmoins, ces réagencements de mon espace de vie correspondent bien à quelque chose. Quelque chose qui me fait du bien. Alors, je n'hésite pas, et laisse aller mon inspiration sans calculs.

Tout ça est peut-être parti du retour de notre promenade sur l'arrière du Jaïzkibel, avec Meriem, mercredi. Paysages somptueux de roches et de criques de galets. Rencontre d'une belle Ines tragédienne avec son maquillage d'actrice. Emouvante, aussi.

 Meriem m'a demandé mon avis sur un point de décoration intérieure. A moi ! Quand, flattée de la confiance imméritée qu'elle me portait, je regardai le pan de mur vide au dessus du canapé, elle a argué que la seule housse colorée suffirait. C'est là que je me suis dit qu'en effet, trop charger nuisait. Le fil était prêt à s'enchâsser dans l'aiguille. Mon prochain repos serait intérieur, et le fut, pour un résultat ma foi estimable. A mon gré.


Samedi 7 octobre 2023.


Nous nous sommes énormément amusés avec J.Michel à construire un parc à vélos. je ne sais quelle mesure fiscale incite les entreprises à acquérir des vélos électriques. Nous en avons prévue une petite dizaine. A garer à l'abri. La réception sera ainsi dédiée pour partie à cet effet. Un aménagement de bric et de broc, avec palettes et planches de récupération, nous a tenus au frais, quand dehors il faisait un peu chaud. L'ouvrage n'était pas à hier soir terminé. Je verrai mardi où on en est.

En rentrant, j'ai vu dans le ciel des avions jouer des chorégraphies virevoltantes. Leurs traînes en fumée s'écharpaient derrière eux.

Au soir, mon soir détente totale de fin de semaine, quand je suis montée vers le potager dans la nuit, mon regard a été attiré par une ligne en pointillés clignotants qui avançait au milieu des étoiles. Comme c'était étrange ! Les séquences de mouvements se saccadaient comme le fait le petit cercle de points lumineux dans les feux de travaux, pour faire patienter les voitures en attente. Sauf que le cercle rouge était ligne blanche.

Je ne suis pas très sûre de ce que j'ai vu. Le phénomène était à mon aplomb. Avec Ménière et la limitation de mon amplitude cervicale, j'aurais du me coucher pour l'observer. La rosée du soir n'y incitait pas. Le temps que j'avance pour avoir un angle de vision plus confortable, il n'y avait plus ni trait ni ligne pointillée. Seule, la voûte étoilée, splendide, profonde, immuable, me répondait. Je ne m'interrogeai pas plus avant. Un effet d'optique, peut-être. Ou autre chose, indéterminé. 

Ce matin, le lever du jour était pur d'une lumière parfaite. J'ai admiré le paysage, en vidant ma brouette à fumier. Ma pile est haute, maintenant, lourde et belle. Elle sera évacuée sur le haut dans la semaine, puisque le tracteur idoine nous est revenu d'atelier. 

J'ai regardé en contrebas mes jeunes châtaigniers. En faisant un bond dans le temps en avant d'une vingtaine d'années, la vision en est enchanteresse. Puisque je suis dans les sauts temporels, ces temps-ci, autant faire des projections optimistes.

Cette semaine à venir, nous avons programmé une opération emménagement, chez Céline, à Saint-Pée. Olivier nous prêtera main forte.

Cette petite est très "turbulée", comme dit joliment Beñat, entre perturbé et turbulence.

Elle ne sait pas si elle va rester chez nous, ou pas. D'un moment à l'autre, elle est décidée, fermement, et puis non, on verra. J'ai du mal à suivre. Je me contente de ne pas trop m'attacher. Je faisais pareil avec les petits veaux mâles. Je ne les baptisais jamais, puisqu'ils étaient voués à disparaître de mon horizon à très court terme. Pourtant, elle est bien attachante, notre Céline, avec ses "Nom de Dddieu !" et ses "besitos". Voyons si un rapprochement géographique l'apaise et nous la rend.

Je vais arrêter là. Appeler Hélène. Prendre des nouvelles de mes amies. M'assoir au soleil sur le banc enguirlandé de verdure. Abreuver ensuite mes bacs, au moment où la brume tombe comme un voile léger, quand sur le Jaïzkibel l'or cisèle la crête.

Savourer le soir d'un beau dimanche d'automne, en posant la paume de la main sur les pierres encore chaudes. Et puis rentrer dans la maison, contempler mon nouveau décor, familier déjà. Rassurant toujours.



Lundi 9 octobre 2023  15h16


Une manière de dolence me flotte autour. Une envie de relecture aussi, de passages plutôt tristes. Je vais commencer par une remontée chronologique plus proche, histoire déjà de vérifier l'orthographe. J'aurais peut-être ainsi le sentiment d'avoir assouvi mon désir, et celui d'avoir échappé à une pente glissante. 

Le soleil or pâle me hèle aussi. Là, l'appel est bienfaisant. Je vais très vite me laisser couler dans cette belle lumière.

 

Mercredi 25 octobre 2023  17h14


Le grand calme gris d'automne  baigne dans un silence bienfaisant.

Je rentre de ma virée de promenade. Les paysages perdent en couleur et en profondeur. Seules, les montagnes foncent en violet plus profond.

J'ai marché dans le petit bois rafraîchi des dernières pluies. Dans le bas, près du vieux chêne, un chêne plus jeune a chu. En remontant, j'ai ramassé deux bouquets de gui tombés à terre. Sous le châtaignier, les ronces épiphytes en lianes grêles touchent les crocus tirés en tiges frêles. Pour sortir de là dessous, il va me falloir une machette, très bientôt.

Nous sommes rentrés tout "émollis". J'ai fait un arrêt près de mes framboisiers. J'ai remonté les branches affaissées. Quelques fruits mûris à point s'écrasaient entre mes doigts. C'était juteux, riche en sucre et en parfum. Les fraisiers autour élargissent un tapis dru. Il va falloir le contenir. Dans la planche en friche, j'ai épandu ce matin le fumier par dessus le paillis de copeaux et de foin. Tout ça pourrit gentiment depuis cet été. Je vais tenter la plantation la semaine prochaine, si le sillon se fait suffisamment profond.

Une petite journée charcuterie s'annonce aussi, sans doute, puisque je serai à la maison. Les préparatifs pré-hiver.

Je retourne à mon tour d'horizon de la quinzaine.


Lundi 9 octobre 2023  18h


Les damiers ras, roux, gris, grèges, dessinent en mosaïques les paysages. Tout paraît propre, net. Les prairies sont fauchées, les maïs récoltés. Les terres s'apprêtent au repos d'hiver.

Mes dolences se sont diluées dans cette tranquillité bien ordonnée.


Mercredi 11 Octobre 2023.


Mon tas de fumier a été remonté.







L'après-midi m'a trouvée en plein déménagement. Je suis en refonte de mon intérieur.

Après les peintures, l'éclairage, les tableaux aux murs, j'ai butté sur le canapé. Je l'ai toujours trouvé surdimensionné dans la pièce. J'ai pourtant essayé de me l'apprivoiser, de le regarder aimablement. 

Son confort m'a plu : pendant près d'une année, nous l'avons avec Txief pratiqué régulièrement. Ce petit morveux s'étirait près de moi de tout son long, pas si long il est vrai, dès que je m'y asseyais. Il a regardé tout dépité l'ascension de son couchage, téléporté au dessus par la rambarde de la chambre. J'ai arrêté le curseur sur un moyen terme, entre le dégager proprement, et le recaser ailleurs, là où sa vue m'offenserait moins. Dans la chambre, il est encore assez monumental. Mais bon, l'espace ouvert sur le vide le supporte mieux. Jusqu'à la prochaine.


Vendredi 13 octobre 2023


Nous avons avec Olivier passé la journée dans le futur appartement de Céline. Le montage de quelques meubles de cuisine nous a requis. Ca a été l'occasion d'une petite virée dans la ville de Saint-Pée, son église, son parc et son centre animé de plusieurs troquets sympathiques.


Samedi 14 octobre 2023


Cette fois, cap toute sur l'éclairage. Toutes les lampes disponibles dans la maison, en service ou remisées, ont été alignées sur la grande table. La collerette de l'une proposée sur le pied de l'autre, certains assemblages ont parfaitement collé. Nous avons trouvé une disposition tout à fait satisfaisante, propre à animer le coin détente un peu froid, avec un seul fauteuil de jardin seulet sous la lampe sur pied. Un plaid, la lampe douce, une sellette en bois, c'était déjà tout autre chose. Une dernière réserve me venait de ladite sellette. Un peu étrange, dans cet endroit. A voir.


Lundi 16 octobre 2023


La sellette est repartie dans la remise d'où elle avait été à peine tirée.

En lieu et place, j'ai installé une magnifique table ronde, en métal, achetée à la jardinerie hier, au dessus en mosaïque colorée. Entre les oranges rosés corail, les pointes vert soutenu, mon abat jour ocre et son pied en fer forgé, l'ensemble se fond en une harmonie subtile. D'après moi... J'ai remplacé le fauteuil de jardin dur par celui de mon père, réhabilité après un exil de plusieurs mois. Chez moi, les choses vont ainsi et reviennent.


Mercredi 18 octobre 2023


Un souffle du sud chiffonne les plantes durement. Mes choux sont culs par dessus têtes, lamentables dans leurs jupes retroussées. Un pied de piment a été arraché, flétri pour le soir. Je l'ai arrosé abondamment. On verra comment il s'en sort.

Mon monde n'est bousculé que par le vent en colère, parfois.

Quand la menace fond n'importe où, n'importe quand, le temps d'un éclair de lumière sur une lame meurtrière. J'ai honte de mon contentement égoïste.


Vendredi 20 octobre 2023


Je prends l'usage de ma balade biblio-urbaine. Les chiens restent dans la voiture. Je flâne par les rues. J'ai aujourd'hui longé la Bidassoa. Le vent poussait les rides d'eau grises sous le ciel plombé. J'ai été étonnée de la taille des plantes sur la berge. Tout paraît anormalement grandi, les arbustes en arbres et les vivaces herbacées en massifs opulents. Les limons fertiles de la Bidassoa filtrent dans la terre proche. La végétation puise là dedans et bondit.

Maintenant, TtonytaPetra couchent dedans la nuit. C'est l'ambiance hivernale. Celle des soirées longues, dans un intérieur douillet. Comme je me le suis soigneusement préparé.


Retour mercredi 25 octobre 2023  18h



Mes notes sont plus superficielles maintenant. Le temps coule en un flot que je n'essaie plus de marquer. Des moments, des jours, tout comme celui-ci, semblables mais jamais pareils, se fondent en une continuité sans repère.

Je m'y laisse porter, sans effort ni crainte. Du moins c'est ainsi que je me le décris, comme on se forge une image mentale d'un avenir que l'on espère.

Quand le monde tremble et hurle sous les assauts, quand ses grondements me parviennent, même éloignés, j'ai besoin de croire que le mien perdurera, comme il est.

J'ai besoin de me leurrer, peut-être. Parce-que de toute façon, la folie des hommes les leurre tout autant. Eux dans leur violence et moi dans mon aveuglement, nous habitons l'illusoire. Tout peut voler en éclats en l'espace d'une seconde. Tout nous paraît pourtant acquis pour une presque éternité. Quand rien ne dure, et rien n'est sûr. 

Quand de nos erreurs nous n'apprenons rien, nous engouffrant de nouveau dans les brèches tendues des gouffres noirs.


Lundi 30 Octobre 2023  18h30


Le changement d'heure nous fait les soirées longues. J'écris maintenant plutôt ici, sous la lampe "blanc chaud". Les lumières piquètent la baie, tremblotent leurs reflets allongés sur l'eau plane.

J'ai eu une journée idyllique : menues activités domestiques, jardinage au soleil revenu. J'ai bêché mon carré enfumé. Faute de meilleur outil, j'ai utilisé le croc : "lau hortzekoa" littéralement le quatre dents. 

Je suis en ce moment en pleine étude de ma langue natale. Mon filleul y consacre une soirée en semaine, et nous faisons les exercices le vendredi en fin d'après-midi. Je découvre étonnée les constructions grammaticales que j'ai de tout temps à jamais joliment hachées. Décortiquer leur forme correcte les sort d'une gangue où j'envase dans mon langage courant tous les compléments d'objets directs ou indirects, les sujets, ces fameux "nor nori nork" en gros "quoi à qui qui". 

Ca fait belle lurette que j'ai oublié mes cours de grammaire française, déjà. Ceux en basque, je ne les ai jamais eus. Les variations entre le basque espagnol "eguraldekoa" et le français "iparraldekoa" déstabiliserait un peu. Plus de douceur au sud, plus de "d" mouillés, de "z" susurrés, quand les puristes d'ici roulent des "r" gargarisés en presque grognements et sifflent leurs "z" avec sécheresse. Les "di" singuliers pour les "dizkit" pluriels sonnent très affectueux. Jusque là, mes "zait" ou "zaizki" indifféremment utilisés rendaient plus germaniques. Décidemment, cette nouvelle lubie me tient. Le goût d'apprendre, et d'apprendre ce qui me constitue aussi sûrement que les volutes entrelacées de mes gènes.

Au final, nous nous concentrons sur une voie, gardant l'autre à vue, des fois qu'un interlocuteur égaré par là nous survienne. C'est bien amusant. Ce ne sera pas la première fois que je suis mise par hasard sur des rails, et que je me passionne pour ce que les initiateurs regardent d'un œil plus détaché.

A la jardinerie, les tapis de chrysanthèmes s'appauvrissent en couleurs. Le jaune et le blanc dominent. Peu de mauves, pratiquement plus de rouilles. J'aimais bien ces grosses têtes en tournesols fermés, aux tons chauds. J'ai eu l'impression hier que les planches ne se mitaient pas beaucoup. Un mol réassort suffisait à les garder pleines. Nous verrons bien jeudi ce que ça a donné. J'entrecoupe ma semaine de congés pour rafraîchir mon certificat de conduite du chariot élévateur. 

Ma semaine sera essentiellement jardinière, si le temps ne se fait pas exécrable. Mon substrat léger, bien décomposé, se travaille facilement, même mouillé. Je lui confierai demain les pois, fèves, oignons, échalottes et aulx. J'ai hâte de voir tout ça pointer en carrés approximatifs. Je vise cette année une récolte plus ambitieuse, puisque j'ai davantage de place. Je pense arracher les plants de piments et de tomates. Les derniers fruits se racornissent sans mûrir. Ils auront duré jusqu'à Toussaint, quand, ces dernières années, ils périclitaient déjà après le 15 Août. Les choux progressent en larges corolles généreuses. Pas encore de tête dans ces berceaux. L'effet est joli. C'est déjà ça.

Là encore, l'expérience dilettante d'une permaculture à la mode m'a portée plus loin que son instigatrice. Ainsi suis-je faite que je m'emballe, et m'accroche.

Une qui est pourtant lamentablement laissée de côté, c'est ma pote bipole. Je l'avais plus ou moins programmée pour cette année. Soit je vais réduire ça à un rapide survol sur une seule chronique bâclée, soit ce sera pour l'année prochaine, si ce n'est celle d'après. Je m'exonère facilement maintenant des exigences d'un calendrier que je ne me fixe même plus. Je laisse aller, je me laisse porter. C'est bien, aussi.

L'eau de la baie se perd dans le noir. Je vais fermer les volets.


Mercredi 1er novembre 2023  18h10


Les débuts de soirée sont déjà de nuit. C'est le moment des pauses écriture. 

J'ai comme prévu œuvré tout hier dans mon potager. J'ai du élargir ma planche bêchée. J'ai intercalé des allées de circulation, cette année. Puisque les carrés sont plus grands, elles marquent une géométrie équilibrée. Il faisait bon, tellement beau. J'ai savouré cette journée avec gourmandise, et elle m'a déposée sur la berge du soir en grand contentement.

Ce matin, j'ai d'abord vérifié la bonne tenue de mon ramage des pois en fourches de saules. Un peu de vent a soufflé dans la nuit. Rien n'a bougé, le coin est sans doute assez protégé. Cette nuit paraît-il sera tempétueuse. Je ne suis pas là demain. Je verrai bien vendredi où en sont mes branchages.

J'ai récolté le poireau et la carotte. Les laisser en terre les durcit. Mes futures soupes seront parfumées. Les poireaux développent dans mon substrat un chevelu racinaire grêle, allongé, en recherche de terre plus franche. La permaculture leur convient  moyennement. J'espère que mes bêchages amélioreront tout ça.

Restent quelques grappes de tomates en place, et le pied de piment rescapé. Je pense cueillir les dernières tomates vertes, pour les faire mûrir à l'intérieur. J'en ai prélevées quelques unes, pour faire le test. J'attends les choux, toujours renfermés sur un cœur hypothétique.

J'ai dans un coin de mon paysage mental le début d'un projet de ma pote bipole. Je reprendrais la trame du Ménière. C'est comme le gris, ça va avec tout.

Cette fin de semaine, peut-être, si rien de mieux ne me vient. Je sens poindre le carcan de la chose que je m'impose. Fi, fi, fi ! Ne te laisse pas reprendre, ma fille...

Hélène déjeune avec nous dimanche. Nos bavardages me réussissent toujours. Deux semaines de travail, et je suis encore en "vacaaances". Là, peut-être ma bipole ? Ou pas. Un peu de charcuterie, aussi.

Mes projets sont navrants de petitesse et de banalité, n'est-ce pas ? Et bien, ce sont les miens, et ils suffisent à me tirer vers un avant souriant.

Tiens, un souffle venteux agite les branches du carolin à moitié dénudées. Je crains le vent, et les prévisions pour cette nuit m'alarment un peu. Les médaillons des feuilles arrachées recouvriront mes carrés déshabillés. 

TtonytaPetra se couchent. J'entends d'ici, les cornes de Ttony butter contre l'abreuvoir. Je les laisserai dedans, demain matin. Antton les sortira si le temps n'est pas trop mauvais.


Jeudi 2 Novembre 2023


Journée studieuse à la jardinerie. Nous avons planché sur un questionnaire long comme le bras, puis manœuvré sous la pluie dans la cour bien encombrée d'un chargement de terreaux arrivés le matin. Tout le monde s'en est honorablement sorti.


Vendredi 3 novembre 2023


La Toussaint bousculée de mauvais temps rallonge ses intempéries sur la fin de semaine. J'ai profité de l'ambiance feutrée de la vieille ferme, pour un de ces cours de basque maintenant déjà rituels. Là dedans, à l'abri des murs épais, on se sent tout à fait bien protégé des bourrasques.


Samedi 4 Novembre 2023


Finalement, le vent a été par ici raisonnable. Des bouffées bien senties  ont sifflé sur les toits. Rien n'a bougé. Je commence à prendre confiance dans ce bout de bâtisse, après tout de même trente années d'habitation, et le double d'usage en grenier. Je suis bien en proue, ici, mais la colère des tempêtes semble passer au dessus. Que cela nous dure !

A mon réveil après la sieste, j'ai été surprise de trouver le ciel bleu ensoleillé derrière les baies. J'ai immédiatement décrété la sortie, entre jardin et cimetière. Les chrysanthèmes tiennent bon, bien arrimés entre les plaques. Les caveaux nus sont de plus en plus nombreux, muets d'un délaissement inexorable.


Dimanche 5 Novembre 2023


Encore une journée entre soleil et pluies," axerian esposak" : les noces du renard. J'ai arrêté de me demander en quoi les noces du renard seraient entre averses et éclaircies. Je me contente d'admirer les arcs-en-ciel. Je n'aime pas ces ambiances incertaines, où d'une heure à l'autre la journée change du tout au tout. Ca bouscule mon besoin de stabilité.

Heureusement, nous avions mieux à faire que de déplorer les caprices météorologiques. Nous avons bavardé, ri, commenté des sujets divers et variés, en toute méconnaissance. Miss Too Much et Hélène ont profité d'une bonne tranche de rire, tout autant que du déjeuner ma foi pas trop mal réussi. La conversation s'est faite ensuite plus intime, quand mes frères sont partis. Un joli dimanche entre amies.


Lundi 6 Novembre 2023  18h


Des trombes de pluie diluviennes s'abattent sur notre monde. L'eau court comme un troupeau de brebis sur l'herbe aplatie. Les nappes s'élargissent dans le bas, incapables d'absorber tout ce flux.

Il a fait pourtant très beau jusqu'en fin d'après-midi. 

Mes deux compères étaient en goguette. J'ai jardiné paisiblement, sans contrainte horaire. J'ai terminé le nettoyage, repris quelques tailles, rajouté un peu de copeau ici et là. Les framboisiers affaissés des derniers vents ont été redressés, et mieux tuteurés.

Il suffira d'épandre le fumier sur la seconde moitié. Je bêcherai au fur et à mesure de mes après-midis dilettantes. La terre sera ensuite au travail de décomposition, de revitalisation, en humus riche et gras. Je ne reviens toujours pas de cette facilité, de cet engouement de la matière à refaire du vivant. Le rouge-gorge me suit à petits sauts. Il se goberge des vers aux méandres en saccades. Tout ça grouille et respire l'activité souterraine. Mon sentiment de participer à un processus si essentiel me comble comme comble la tâche juste.

J'ai commencé l'élagage du poirier, doucement. Je veux rééquilibrer sa charge maintenant trop déportée. Une branche plus grosse demande l'engin mécanique et son bras humain. Au prochain créneau de beau temps.

En promenant dans le sous-bois, j'ai trouvé un très long acacia couché en travers des ronciers. Sa souche renversée ne s'échevelait que de courtes racines, en une motte ridiculement petite en proportion de la longueur du tronc. La poussée en futaie l'aura obligé à se tirer du col, sans pouvoir s'ancrer suffisamment. Je me suis étonnée tout de même de le voir  ainsi arraché, lui seul, au milieu d'un groupe d'autres tout aussi dégingandés. Le sort malheureux l'a élu, et ses contemporains ont senti le souffle leur passer juste à côté.

Je suis rentrée juste avant la bourrasque violente de pluie. Ici, ça sent le linge propre, ça sent le chaud, ça sent l'abri.

Je vais descendre panser TtonytaPetra. Elles ont fait comme moi : profiter à plein de la magnifique journée en extérieur. Là, la nuit rajoute à l'impression de confort. Dans l'étable, on n'entend pas la pluie, ou à peine. La porcherie-remise reste sèche au plafond. L'humidité suinte tout de même à travers les murs enterrés. Une caverne, une vraie, comme profondément creusée dans la roche.

La maison a pris l'air, j'ai remis tout au propre et à jour. Je peux retourner travailler.


Mercredi 15 Novembre 2023


La laitance en brume sur la baie s'irise de roses alanguis.

J'ai été regarder les versants roux de novembre. Déjà, les coulées fraîches en nappes se lovent dans les chemins creux. Le sous-bois s'assombrit tôt. Les gouttes humides emperlent l'herbe rase, là où le soleil n'est pas venu lécher les talus.

Ma petite troupe m'a suivie. Les chiennes ont aimé renifler les pistes fraîches sous la souche de l'arbre couché. J'ai regardé le soleil cligner derrière les branchages sombres.

Cette promenade champêtre m'a bien apaisée, après les temps longs au téléphone, entre attente en musiquette énervante, et conversations déconcertantes. Nous sommes repartis en bataille, encore une fois, pour cette servitude qui n'en est pas. Bah ! Toujours un petit train d'affaires...


Revisitation de la semaine :


Mercredi 8 Novembre 2023


J'ai épandu le dernier carré de fumier dans le potager. Ensuite, avec le mien filleul, nous avons fait quelques plantations. Les massifs de plantes sauvées de la benne demandent réhabilitations régulières. D'autres rescapées viennent prendre la place de celles qui ont fini de mourir là. Il faisait bon, paisible, très agréable.


Vendredi 10 Novembre 2023


Une journée de déluge. Je suis à peine sortie. Notre étape culturelle basque en bas, quelques menus nettoyages dans l'étable où TtonytaPetra sont restées à l'abri, m'ont très bien occupée. J'ai raccourci la chaîne de Ttony : elle s'avançait trop du col chez Petra, molestant celle-ci de ses cornes déjà longues.  Elle a tiré un peu, mécontente, puis, brave fille, s'est résignée. Elles se sont longuement léchouillées, l'une et l'autre repues.

Je suis restée un moment à les regarder. La lumière se coule sur les flancs longs, en ondes puissantes. Ces masses musculeuses parlent de force tranquille. Les cornes cognent l'abreuvoir ou le râtelier, en cadence, au rythme lent d'une rumination méditative. A quoi songent les vaches quand elles ont la panse pleine ? A rien, sans doute. Nous avons oublié comment faire. C'est sûrement dommage.


Samedi 11 Novembre 2023


La journée fut encore pluvieuse. J'ai travaillé sur l'ordinateur, à la jardinerie. Ces trop longues séances me fourbissent. Je suis sortie aux éclaircies, retrouver mes collègues. La journée ne fut pas très laborieuse. Ma nomenclature mieux triée a quand-même bien progressé.


Dimanche 12 Novembre 2023


La course Béhobie San Sébastian pulse ses basses sourdes en rythmiques saccadées où les refrains se chevauchent. C'est une cavalcade désordonnée. Je n'en sais pas plus de la course.

Hormis ce bruit de fond bien présent, c'est le grand calme d'un dimanche matin de paix dans un monde où la violence explose, si ce n'est ici, là.

Mes bulbes potagères pointent hardiment. Le pois marque déjà son rang. La fève se hausse du dos. Les fortes pluies ne les ont même pas jaunis, aérés dans le paillage léger.


Dimanche 12 Novembre 2023 20h


A mon retour de la jardinerie, j'ai trouvé près de la baie deux toute petites coccinelles. Je les ai ramassées. Elles m'ont parues en mauvaise posture, se retournant sur le dos en agitant leurs pattes noires. A l'abri sur la paillasse, bien installées sur du papier gaufré, je les ai redressées.







TtonytaPetra et Lola ne s'émeuvent pas du tout du drame qui semble se jouer là.


Lundi 13 Novembre 2023








Mes paysages d'automne sont parfaits d'une lumière caressante. Il fait plus de 20° !

Un léger souffle bien amical va nous sécher toute cette humidité plaquée en auréoles sur les murs et les plafonds.

Je vais tailler mes arbustes. Les coccinelles sont mortes.


Mardi 21 Novembre 2023


Il fait un temps de chien. TtonytaPetra sont à l'étable, bien à l'abri.







- Hé ! me demande Ttony, tu vas pas nous mettre dehors par ce vent à décorner Petra, pas vrai ?








Les chiens ne sont pas plus motivés pour sortir. Ce sera donc une journée intérieur toute. La grande porte de l'étable est bien fermée, parfaitement calée. Elle ne bouge pas sous les souffles venteux. J'ai tiré la lucarne de la porcherie-remise. J'oublie presque maintenant de vérifier au plafond qu'il n'y a plus d'entrées d'eau. Je peux raisonnablement penser que notre système d'étanchéité maison est enfin performant. 

Bien installée à la grande table, le mauvais temps furieux derrière les vitres, couvée dans une chaleur douce et un parfum de vanille diffusé délicatement, (merci ma nièce), je m'apprête à notre administratif du moment : le chemin qui n'en n'est pas un. Ces petites affaires, mine de rien, sont passablement chronophages. Par des journées pluvieuses comme aujourd'hui, je ne sacrifie pas mes activités favorites en extérieur à la cause. Heureusement. Sinon, renoncer à ces moments agréables me rendrait grincheuse.

Là, nous entamons une étape cathartique :




Je vais encore passer pour la teigneuse de service. Tant pis !

J'ai toujours aimé ces petits dossiers bien ordonnés, exhumés du fond du placard après des années d'archivage. J'ai, comme disait Pasqua, mes "petits papiers". Pour moi, des cahiers aux intercalaires transparents, où je classe soigneusement les "pièces", maîtresses, et annexes. Certains thèmes se chevauchent d'un cahier à l'autre. Nos petites affaires s'ébattent dans un périmètre restreint, et les intervenants et circonstances se mêlent et s'entremêlent au gré des grandes et petites histoires d'Agorreta. Je compulse ainsi des dossiers croisés. J'y retrouve avec émotion nos turpitudes anciennes. C'est que tout ça remonte parfois à trois ou quatre décennies !

A ma manière, je suis une sorte de conservatrice de l'histoire familiale et locale.

Là comme ailleurs, je me lance à corps perdu dans la bataille. Je compile, recherche, analyse. Tous ces échanges épistolaires m'émeuvent. A tant d'années de distance, je retrouve ce goût des phrases, des mots. J'avais juste à l'époque moins le sens de ce qui était adapté à la situation, et de ce qui ne l'était pas. Mes envolées lyriques pouvaient être déplacées dans le froid contexte d'un problème purement administratif.

Je m'essaie maintenant à plus de sobriété. J'élimine de mon élan naturel les tournures trop littéraires, les phrases alambiquées, les mots trop sophistiqués. Le résultat en est une prose plate, concise, un poil tristounette. Mais bon : les gens avec qui j'échange en ces occasions ne sont pas forcément là pour s'amuser. Quoi que...

Nous attendons la semaine prochaine, pour voir où toute cette grande affaire de chemin qui n'en est pas nous mène. J'ai moins le goût maintenant d'exposer. Je n'évoque le sujet qu'à demi-mot, quand avant j'étalais tout ça à l'envi. C'était amusant, mais aussi contre-productif, dans la recherche d'apaisement collectif. A croire, que cette recherche n'était pas la mienne !

Je retrouverai l'épisode. Dans mon placard, un petit cahier dédié prend de la joue. Mes courriers mieux habillés seront plus ternes que ces chroniques où je déchaînais ma verve supposée. La mémoire palliera. Les conversations familiales feront le reste. Chacun réécrira l'histoire à sa façon. Mes chroniques supposées  fidèles ne faisaient pas beaucoup mieux.

Après ce petit travail de plusieurs heures tout de même, je me suis furtivement glissée dans la seule plage d'accalmie de l'après-midi. Le vent était tombé, un fond de douceur nappait l'atmosphère comme un baume.

J'ai été par les champs et les sentes, respirer à pleins poumons mes paysages de Novembre. Les ramilles des saules dénudés se bleutent devant les ors brunis et les verts grisés des bosquet encore feuillus. Les tapis de feuilles chatoient entre jaune mat, brun plus ou moins foncé de pluie, et vert encore des feuilles juste emportées par le vent du matin.

Un gros saule arraché ouvre une brèche dans la haie déjà mitée censée sécuriser le périmètre de la décharge : un camion chargé  d'uranium en barres y entrerait sans difficulté.

Je rentre, une bruine s'intensifie déjà. La horde nuageuse bascule par dessus les Trois-Couronnes. Je descends à l'étable. TtonytaPetra se lèvent mollement. Là dessous, on entend à peine le vent de nouveau forci.

Je remonte ici. Il est temps déjà de fermer les volets sur la nuit.


Jeudi 23 Novembre 2023  10h25


J'ai terminé mon petit tour logistique. La soupe mitonne à côté. Le frais me retranche plus souvent ici. 

Le ciel encore pommelé de gros nuages clairs promet l'éclaircie. J'irai dehors, terminer la taille des arbustes au dessus de la murette. J'ai commencé hier. Je me suis interrompue pour me consacrer à l'aménagement du bac dans la cour de la ferme. Nous avons familialement œuvré avec grand plaisir et belle efficacité. Le résultat nous plaît. C'est l'essentiel. Une harmonie pierre et terre, où mes plantes de réforme rescapées des grains mauvais en bout de balcon vont pouvoir se restaurer et embellir. Pour le prochain printemps, tout ce petit monde devrait avoir appris à se connaître, et retrouvé belle allure.

Tiens, un pompier gaillard se présente. Et se lamente de ce fameux chemin affreux affreux. Il donne des conseils de remise en état, l'innocent. Ce qu'il faut faire, nous le savons bien ! C'est comment pouvoir le faire qui nous chagrine. A suivre.

Je prends garde de ne pas me laisser happer. Les réveils au tout petit matin, quand ce n'est pas au beau milieu de la nuit, avec une idée pertinente pour défendre la cause, ne me réussiront pas longtemps. Je dois impérativement passer le relais, si l'affaire doit perdurer. Pas facile pour une nature égocentro-monothéiste comme la mienne. Il le faut, je le dois. Deux écueils majeurs dans la formulation, et, subséquemment, la mentalisation, d'après mon pilier délicat dont je n'ai plus de nouvelles.

Il est temps pour ma collation du matin. Ensuite, bien couverte, j'irai dans le frimas travailler mon jardin. Ma porte de salut cérébrale.


Dimanche 26 Novembre 2023  17h


Le soir embrume la baie. Il nous est venu un bien beau dimanche. Après la promenade  de la plage hier à la tombée de la nuit, nous avons ce matin avec Olivier longé la Bidassoa. L'air marin délie le neurone.

Là, je peaufine mon "dossier" chemin qui n'en est pas. On se demande autour de moi si je n'aime pas les conflits, voire, si je ne les attise pas, histoire de m'y amuser un peu. J'ai réfléchi à la question : non, je n'aime pas particulièrement les conflits. Mais oui, la petite tension inhérente me plaît. J'ai le goût des petites batailles. Les grandes me font bien trop peur.  

Je n'ai pas l'impression de semer la discorde. Je suis au contraire souvent une négociatrice de la paix. Plus ou moins opérante, je dois dire...

Ma personnalité un tantinet agressive, mon attitude fiérote, peuvent en effet passer pour une morgue évidemment agaçante. Je me suis beaucoup amendée. Ma réputation n'a pas encore suivi cette évolution ma foi récente. Je paie un passif long et mouvementé. Tout en reconnaissant qu'au fond de moi, tout au fond, je trouve que ça valait le coup. Que ça le vaut encore, à petites échéances raisonnables.

Un rouge-gorge au poitrail gonflé sautille sur la rambarde, mouvement vif sur l'immobilité du paysage derrière. TtonytaPetra ruminent en bas leur satiété. Les chiens soupirent, ronflotent doucement. Un dimanche soir de paix. Lundi est un autre jour.


Lundi 27 Novembre 2023  17h20


Et lundi advint.

Je reviens d'une virée ouatée de pluie persistante. Je voulais m'aérer la lymphe. C'est fait. J'avais laissé les chiens dans la voiture, pour qu'ils ne se trempent pas. Là, j'ai mis mon pantalon mouillé à sécher, et je m'apprête à une soirée tout confort.

Nous avons ce matin fermé le chapitre de quarante années de gueguerre autour de ce chemin qui n'en est pas. Chacun y a mis une certaine bonne volonté, à défaut d'une bonne volonté certaine. Les quant-à-soi muselés grognaient en sourdine, mais nous avons tous contenu le plus gros. Quelques échanges un peu tendus, quelques piques détournées par la médiatrice magistrale. .

Allez, le chapitre est clos. Quelques travaux de reprise, quand la pluie se sera arrêtée, et nous n'en parlerons plus. Ou alors, comme d'une de ces évocations familiales où chacun ramène au jour ce qui l'arrange et le flatte. Comme ça l'honneur est sauf pour tout le monde.

Nous ne sommes ni pires ni meilleurs que la plupart, allez...



Mercredi 29 Novembre 2023  17h50


Le violine du flanc du Jaïzkibel a tiré sa révérence. Le vert de la prairie lutte encore. La nuit tombe.

Un souffle chaud a adouci l'ambiance. J'ai ouvert grand la maison. C'était une percée inattendue  : il ne fallait pas la manquer.

Je me trouve presque vacante de mes petites batailles si facilement bouclées. Mes flambées tracassières doivent retomber. Je dois revenir à un quotidien où mon tempérament aplatira les "hérissures" des derniers jours. Mes oreilles commençaient à siffler plus aigu. Ma nuque se raidissait. Je relâche progressivement, comme on arrête une course par des pas ralentis. 

Je sais que là est ma faille : dans ces emballements où mes ardeurs amollies se fatiguent. Je sais que là aussi est ma force : ce que je prends à bras le corps, je le mène au bout, autant que je le peux. Et, pour le moment, à condition de ne pas embrasser trop large, je le peux pas trop mal...


Vendredi 1er décembre 2023 18h


Je reviens de ma balade. J'ai marché sur les tapis épais des feuilles mouillées. Entre bruns profonds des frondes de fougères affaissées, roux-grège des bosquets aux ramilles grises devant les fonds violet sombre, j'ai inspiré longuement l'air vif.

En revenant par ici, j'ai regardé la barre blanche sur le ciel gris tirée d'un bout à l'autre de l'horizon, entre mer et ciel, comme un trait de feutre parfait. Un moment après, toute la mer s'est argentée, avant d'être avalée par l'obscurité.


Lundi 4 décembre 2023. 16h


Un souffle froid agite les parages. TtonytaPetra sont déjà rentrées dans l'étable. J'ai refermé le grand vantail. Le vent et sa colère resteront au dehors. 

Le vilain abcès qui gonflait la joue de Bullou a fini par crever, samedi dans la nuit. La pauvrette s'est affolée de sentir le fiel couler. Je l'ai rassurée, nettoyée. Nous nous sommes rendormies soulagées, elle et moi, même combat.

   


Samedi 9 décembre 2023  17h



Une douceur surprenante s'est coulée dans l'air. J'ai fait le tour de mes paysages :








Comme souvent, les images rendent très mal l'effet visuel. Elles aplatissent et laissent au bord, quand, en vécu, les flancs ondulent, accueillent, dans une profondeur qui vous aspire. Les derniers ors rutilent sur les châtaigniers encore en feuilles. Mon monde tient là.

Cette semaine, Petra m'a donné du souci. Jeudi matin, je la vois tourner sa langue dans sa bouche, et bien plus de 7 fois. (Si on dit bouche. Mufle, c'est extérieur, et gueule, c'est carnassier). C'était comme si elle avait attrapé une bouchée aigre, à recracher. Je m'approche, lui retire en effet un amas gluant de salive. Elle se retourne vers le râtelier, et le même manège recommence. J'ai l'impression qu'elle tire les brins avec précaution, comme si ça lui était douloureux. Elle tire la langue loin, clape et roule. Secoue la tête, fait tinter la chaîne. A côté, Ttony ne remarque rien, et continue de manger, imperturbable.

J'observe un moment, essaie de passer mes doigts sur les mâchoires dures. Pour lui examiner la bouche (?), il faudrait lui tirer la langue avec un linge, et avoir un éclairage direct. Là, je n'ai rien, personne, et pas trop de temps avant de partir pour la jardinerie.  Petra allait très bien hier soir. Elle a mangé tout à fait normalement. Là, elle ne manque pas d'appétit. Elle a juste une gêne douloureuse à la mastication.

J'ai entendu parler de cette fièvre hémorragique (MHE) chez les bovins. Le département en est un foyer purulent. J'ai reçu il y a peu une plaquette de plusieurs pages, glacée, envoyée par les services vétérinaires. Je ne me souviens pas y avoir trouvé les premiers symptômes de la maladie. Les contraintes sanitaires, les répercussions économiques, oui, les alertes mises en place, aussi. Je n'ai pas trouvé les premiers signes, non. Ou alors, j'ai parcouru le document trop rapidement. 

Au passage, je me suis étonnée que la maladie soit déclarée non contagieuse, et qu'elle induise pourtant un arrêt immédiat des mouvements entre élevages dans un rayon de 150kms. Autant dire que les Pyrénées Atlantiques doivent être figées dans un immobilisme complet. Seraient-ce les larves de moucheron que l'on veut ainsi isoler ? Sans doute, je ne sais. 

Lors d'une de mes visites à la "grainetière" locale, j'en avait appris un peu plus. Les bêtes commenceraient par avoir des aphtes dans la bouche. Elles en baveraient, au sens propre, leurs naseaux s'empliraient de mucus. Elles auraient très vite de la difficulté à se nourrir, seraient douloureuses, affaiblies. Le processus pourrait aller jusqu'à la mort de la vache. Dans le voisinage, Fine y aurait succombé.

Avec mon mini-cheptel à deux têtes, je me croyais bêtement préservée. C'était idiot, puisque la mouchette volette partout, et pique aussi bien là où il n'y en a que deux, que là où il y en a cinquante.

Je commençai à faire le rapprochement entre toutes ces informations croisées. Un gros malaise planait dans mon étable jusque là si quiète. Je décidai d'appeler le vétérinaire, dès que la clinique ouvrirait. Nous avons perdu la grande Kattrin, repartie en Teutonie. Là, ce sont les joyeuses Alaiak d'Espelette qui me viennent en visite.

J'appelai Antton, mon satellite élevage, à la rescousse, pour qu'il puisse réceptionner le ou la professionnelle. TtonytaPetra resteraient à l'attache, en prévision de la consultation. Le vétérinaire vint à 11H. Préleva du sang pour analyse, administra un anti quelque chose. Petra regimba paraît-il. 

Antton me tint par téléphone au courant de l'évolution de ma malade. Pour le soir, elle mangeait déjà mieux, ne bavait plus, me dit-il. Il me proposa même de l'écouter manger, tendant l'appareil vers la bête au râtelier. Evidemment, je n'entendais rien, mais ne demandais pas mieux que de le croire sur parole. 

Quand je rentrais de la jardinerie, TtonytaPetra étaient gentiment couchées dans un paillage vaporeux. Toute belles, toute tranquilles. Je m'approchais pour leur frictionner le front, et le cou. Petra semblait en effet bien mieux. Je ne la vis pas ruminer, mais Ttony ne le faisait pas non plus. Elles avaient mangé plus tôt. Je les laissais à leur repos, et montais goûter le mien.

Hier, j'ai gardé TtonytaPetra dedans. Toutes les pluies des jours derniers ont rendu le champ boueux. Elles seraient aussi bien là, et je pourrais mieux surveiller Petra. Elle ne donnait plus de signe alarmant. Quelques sorties de langue seulement, à peine notables. La vache se cure ainsi le naseau, qu'elle a suffisamment large et rond pour y introduire une masse musculaire conséquente. Tout rentrait dans l'ordre, et mon début de panique s'assagissait.

Aujourd'hui, le temps clément a trouvé les génisses dans le champ. Tout va bien. Elles vaquent, vont et viennent, royales.

J'attends le résultat de l'analyse sanguine. Petra est rassurante. Si la mouchette a piqué, la vitalité de ma belle brune a neutralisé son poison. J'attends quand-même, toujours en veille quand il s'agit de ces vérifications sanitaires.


Lundi 11 décembre 2023  9h20


J'attends un coup de fil du Tangram Agricole. Un petit remous me l'a mis en première ligne d'horizon. Il ne faudrait pas que mon Perdreau se soit faisandé au passage.

18h

C'est pire encore que ce que j'imaginais ! Le marché de l'immobilier d'entreprise s'effondre : télétravail post-covid, je ne sais quoi ne sais qu'est-ce, et ma timide percée boursière est une catastrophe. Je ne sais pas ce qui m'a pris de me laisser séduire par le chant du perdreau. Je ne peux m'en prendre qu'à moi-même. 

Sur le long terme, peut-être, par un de ces retours de mode ? Le télétravail s'organisera autrement que dans dans les résidences d'habitation, sans doute. Les gens auront besoin de rétablir une bulle intime étanche, où le travail ne les poursuivra pas. Ils reviendront du toujours connectés, maison-entreprise même sphère. Il faudra alors imaginer de nouvelles structures, centralisées en péri-urbain, où les bureaux se concentreront pour de nombreuses firmes. Ce sera du travail téléporté, à distance de l'entreprise, plus près des lieux d'habitation, mais en périphérie tout de même. Le monde du travail de bureau se concentrera, comme l'a fait le monde du travail industriel. Il y aura besoin d'immeubles de bureaux, de nouveaux espaces dédiés. Le marché de l'immobilier d'entreprise, en berne totale aujourd'hui, retrouvera des couleurs flamboyantes, et ma petite épargne ouvrière, un peu de rose aux joues. 

Ceci est ma projection, et mon vœu ardent.

Le bon de la chose, c'est que je m'affranchis de mes angoisses "thésaurieuses". J'ai joué, je m'apprête à l'idée de perdre. L'enjeu est conséquent, malheureusement. Il n'est pas vital, loin de là. Plaie d'argent n'est pas mortelle.

Je verrai en début d'année 2024 si je reste dans le bouillon, ou si je me retire frileusement, resserrant au plus près de moi mes hardes rescapées.

Puisque mon palier économique s'est affaissé, je considère tout autrement quelques dépenses impromptues. Là comme ailleurs, tout se relativise.

Puisse cette sagesse nouvelle m'accompagner longtemps...

J'ai bien fait d'aller par le bois dans la montagne. Un énorme merisier s'est allongé là aussi, coupant la piste de son tronc cerclé d'anneaux clairs. Les châtaigniers nombreux émaillent de touches dorées le sous-bois gris et brun. Le silence là-bas apaise. 

J'ai croisé une troupe de musiciens avec leurs instruments en bandoulière. Curieuse équipée dans cet endroit. Lola est restée en arrière sur le chemin. J'ai du aller la rechercher. Sans doute une guitare dans son fourreau sur l'épaule d'un des garçons lui a-t-elle semblé être un fusil.  Nous nous sommes très urbainement salués. Ceux-là se foutent sûrement royalement du marché de l'immobilier d'entreprise...


Mercredi 13 décembre 2023  18h50


La tempête mugit au dehors. Une tablée animée vient de se retirer. J'entends mieux les souffles en colère. Je n'aime pas le vent. Ma position en proue de ferme m'y expose. Rien ne paraît bouger, tout est bien calé. Je surveille quand-même, autant que mes pauvres oreilles le puissent !

J'ai reçu le résultat de l'analyse sanguine de Petra. Elle est bien malade. En bonne forme quand-même. Elle devrait s'en tirer sans dommages. Là aussi, je surveille quand-même. Je suis décidemment très aux aguets, en cette fin d'année. Mes recherches sur la finance me réconfortent. Je devrais pouvoir m'en tirer pas trop mal. Le débat est remis au début d'année prochaine, avec mon perdreau peut-être penaud.

Le vent se calme. Je me souviens du 13 décembre 2019, je crois, où la tempête avait hurlé toute la journée. L'électricité avait été coupée. J'avais prévu de faire de la charcuterie. Nous avions du attendre la fin d'après-midi, que le courant soit revenu, pour nous y mettre fissa-fissa, avec Antton et Beñat. C'est dans ces jours-là aussi, je crois, que j'étais au petit matin intervenue sur la cheminée, ici, pour la chapeauter d'un sac poubelle : une petite cataracte de suie grasse pleurait le long du mur, à l'intérieur. Là, rien ne bouge ni ne fuit. Le confort total.

Tiens, la bourrasque reprend. Je n'en serai pas quitte si facilement.


Vendredi 15 décembre 2023  18h48


Je m'apprête à la soirée. Tout est en ordre.

J'ai été tout à l'heure "en ville", choisir mes prochaines séances de lecture. J'ai encore marché le long de la Bissaoa, en remontant par Belcenia. J'ai retrouvé cette végétation étonnante. Des mûriers séculaires, à la très large ramure maintenant libre, au dessus de troncs boursouflés des premières tailles de formation. Des lauriers au bois gris, montés en arbres, accrochés à des strates de pierre en surplomb. L'eau gouttait de ces marches, comme dans une grotte. 

J'ai moyennement aimé traverser la passerelle sur l'eau. Au retour, j'ai d'ailleurs bifurqué vers le port de Caneta. J'ai retrouvé les vieux pans de murs colonisés de fougères, l'angle de la cour de récréation de mon école primaire. J'ai salué la petite fille d'alors, en me souvenant qu'elle imaginait un futur assez fidèle à mon présent, en regardant, comme je l'ai fait là, les contreforts médiévaux de Fontarrabie. Ca m'a plu.

Le livre bien calé sur le plateau de cette table ronde, je dîne ainsi en solitaire. Un luxe. Ensuite, c'est au coucher que je fais une autre longue séance, bien calée sur les oreillers remontés, Bullou et Txief à portée de caresses. Lola reste en bas. Elle monte dans la nuit, vérifier que je suis bien là, et redescend ensuite.

Je retrouve cette gourmandise à attendre avec impatience de pouvoir retrouver une histoire, des personnages. Ca me fait l'effet d'un voyage agréable, où je reprends à ma dernière étape, en séquences libres.

Côté télévision, je fais aussi en hiver quelques pauses dans mon fauteuil grand confort, hérité du paternel, qui ne l'a d'ailleurs jamais trop usé. Mes soirées ces temps-ci sont toutes "Astrid et Raphaëlle". Je revisite toute la série. Ces deux personnages aussi me sonnent bien, et je les retrouve avec plaisir.

Dans la semaine, j'ai fait une incartade du côté d'un "La vache", évidemment trop tentant pour moi. Un Algérien traverse la Méditerranée et la France, pour présenter Jacqueline, sa Tarentaise, au Salon de l'Agriculture. Un "La vache et le prisonnier" moderne. 

Tout y est mis en œuvre pour la paix entre les peuples, et entre les classes. L'Algérien est musulman, un gentil musulman sympathique à souhait. Son beau-frère parisien, plus "racaille", est aussi un grand-cœur. Entre les deux, un comte désargenté prend fait et cause pour Fatha, l'éleveur pèlerin. Tout ce petit monde évolue gentiment, dans un monde à peine éraflé de quelques remous. 

En montant me coucher, j'étais en effet toute alanguie d'une fraternité consolidée. Ca ne m'a pas duré.

Au moins, ce genre de fiction, s'il n'est pas le reflet d'une réalité bien plus mordante, laisse-t-il un goût d'un possible plus chantant. "Si tous les gars du monde, voulaient bien se donner la main". C'est vrai, on peut toujours rêver...



Lundi 18 décembre 2023  18h30


Je viens de fermer la maison sur la nuit. Tout le monde est dedans, à l'abri du froid vif. Le ciel s'est bien éclairci depuis samedi, et la masse d'air plus sèche est aussi plus froide. Le soleil revenu fait du bien.

J'ai profité de ces augures mieux appropriées pour faire quelques retouches enduits et peinture, côté mauvais temps, sur le mur extérieur. Je peaufine, je peaufine.

Ensuite, une promenade revigorante m'a offert ces flancs où les dernières tempêtes ont emporté dans leurs souffles puissants les dernières lumières des bosquets et des taillis. Les touches d'or se sont éteintes des feuilles arrachées. Les tapis de feuilles craquent d'un brun mat. Les ramures grises des arbres dénudés griffent un ciel pâle. 

Les rais du soleil couchant plongent loin en oblique. La lumière se hisse, rattrapée par la nuit tombante.

Je m'apprête à ma soirée idéale.


Mercredi 20 décembre 2023  18h30


Je me promettais une longue séance écriture, tout à l'heure. Au lieu de quoi, j'ai patiné lamentablement pour me trouver un rendez-vous de radiologie pour ces dépistages organisés. Tout ça paraît simple, pourtant, mais se complique à la première fourche mal négociée. Enfin, j'y suis. Je n'ai plus qu'à localiser l'objectif.

Le mauvais temps est revenu en force. J'ai eu deux heures de sursis en extérieur, où j'ai fait le plein de bonnes sensations. Réserve sérieusement mise à mal par mes tâtonnements maladroits. Qu'importe, j'y suis arrivée. 

Je fais un rapide retour arrière sur les mêmes périodes des années précédentes. J'écrivais beaucoup plus, alors. J'ai toujours autant de plaisir à me relire. Je retrouve précisément les moments d'alors. Je retrouve mes mots et leur musiquette agréable. Je ne voudrais pas devenir trop laconique en ces pages. Ecrire me réussit. 

Là, tout le monde est en intérieur, position repos complet. C'est le mieux à faire, quand le vent souffle froid dehors. Je me souviens du livre de Jeanne Benameur "Les profanes". J'avais beaucoup aimé. Ca finissait du genre "Et maintenant, le vent peut souffler". C'est un peu ça, pour moi, là.


Vendredi 22 Décembre 2023  


Les derniers vents ont sérieusement fait pencher mes schinus. J'ai tenté une opération redressement, entre rafales et averses. Moyen, très moyen.


Dimanche 24 Décembre 2023

Je suis à Rivière. Une brume dense estompe les silhouettes des arbres hauts. Une ambiance "Gorilles dans la brume". J'ai voulu partager ça par le biais de ma toute nouvelle intronisation "Vatsap". A la faveur de je ne sais quelle manœuvre, mon petit téléphone portable antédiluvien s'est vu neutralisé en communication. C'est ennuyeux, pour un téléphone. 

Olivier m'a équipée plus moderne, Jean-Michel m'a connectée à notre groupe Lafitte. Bon. Poussée au flanc, je me suis laissée faire, sans enthousiasme, à peine curieuse. Au final, c'est assez sympathique, puisque j'ai mis tout ça à distance. C'est prévu dans la machinerie. Bien.


Lundi 25 Décembre 2023.


A mon retour du Grand Nord, j'ai eu la satisfaction de voir mes schinus redressés. Antton avait œuvré, bien plus efficacement que moi vendredi. Les voilà ressouchés, mes grands échevelés.


Mercredi  27 Décembre 2023


A là jardinerie, nous faisons des orgies de talos. Je vais devoir reprendre une discipline alimentaire plus raisonnable. Sinon, ma mécanique va regimber, et mon Ménière assoupi reprendre du service.

Il fait incroyablement doux, beau, pur et sain. J'ai fait un tour dans mon potager sinistré par toutes ces pluies dernières. Il s'accroche, vaillant mais bien fatigué. Je reprendrai en début d'année, dès que le temps aura séché la croûte.


Jeudi 28 décembre 2023


Je me suis régalée, dans ma pépinière désertée d'une clientèle occupée ailleurs. J'ai repris des jauges, mis les camélias fleuris et les mimosas boutonnés à l'abri, sous la pergola. Je me suis fait une petite présentation de feuillages et bois d'hiver. Spectatrice très orientée de moi-même, je me suis congratulée. A la lumière des lampadaires, au soir, c'est particulièrement joli. D'après moi, toujours.

Céline est partie pour d'autres horizons. Je sais où la retrouver.

La nouvelle recrue promet. Je l'observe. Etonnée de tant de perfection. Ca existerait donc ?


Vendredi 29 décembre 2023


Marcel nous est venu. 84 ans, et plus maquignon que jamais. Il a goûté avec nous. Est reparti, avec en tête l'image de TtonytaPetra et leur poids potentiel. "Bah ! Je t'enlève ces deux là, et je t'en porte deux toutes mignonnes !" Le bougre.


Dimanche 31 Décembre 2023


Dernier jour d'une année à la rétrospective égoïstement agréable. Pour le monde, c'est différent. Je l'habite en ermite frileuse.

Je vais travailler cette après-midi. Ma matinée en est écourtée. J'ai eu le temps tout de même d'improviser une protection sous l'auge et l'abreuvoir, dans l'étable. Cet ouvrage a été moins bien réalisé que ceux de l'ancienne étable. Là bas, l'auge était pleine dans son support. Le foin ne pouvait pas glisser dessous. Subséquemment, les vaches n'avaient pas à passer leurs têtes cornées sous les abreuvoirs, pour aller rechercher les brins qu'elles avaient dédaignés au départ, au moment de trop grande abondance. Ici, j'entends trop souvent le choc des cornes contre la fonte. J'espère ma parade efficace. Je verrai ça tout à l'heure ou ce soir, quand j'aurais rentré mes belles.

Je termine l'année satisfaite. Mes affaires sont à jour, en ordre. Mon monde en paix, autant qu'il peut l'être.