mercredi 29 janvier 2020

27 janvier




Lundi 27 janvier 2020 18h20

Rituellement, nous revenons avec Olivier de notre promenade dans les bois de Rivière.
Il y avait chantier, dans la forêt.
A l'aller, une immense pile de branchages s'alignait le long du chemin boueux :





Des saisissement, la main nous en a tremblé, au moment de prendre ce cliché.
C'est un peu flou, c'est vrai, mais on se rend quand même compte : plus de 3 mètres de haut, sur une bonne trentaine de long, avec une largeur de plus de 2 mètres. Sans être très calée en stérages, deux petites centaines de cubes.
Avec mon grand mari, nous nous sommes enfoncés dans la forêt. L'après-midi était calme, nuageuse, sans bruit.
A un moment, un vrombissement sourd est parvenu jusqu'à nous. Au début, avec mes oreilles défaillantes, j'ai cru que c'était le passage d'un train. Nous étions un peu loins de la voie ferrée tout de même.
Olivier m'a expliqué que c'était le chantier de broyage, qui avait commencé.
Rivière est une commune avec une grande superficie boisée de feuillus, principalement des chênes.
C'est aussi une des rares communes de la basse Landes à exploiter sa forêt, pour le bois et ses dérivés.
Chaque année, des coupes sont programmées. Les services forestiers sélectionnent les arbres à abattre. Le ressemis est naturel. On anticipe un peu, on raccourcit les siècles. Les chênes qui seraient devenus plusieurs fois centenaires tombent sous les dents des tronçonneuses, et sont débités en planches, pour les scieries ou les papeteries.

Les tout jeunes plants germés à leurs pieds s'épanouissent alors, dans cette brutale trouée de la canopée. On accélère le rythme, en conservant quand-même l'esprit. Un compromis, quoi.
Les entreprises forestières n'ont pas de temps à perdre. Elles prélèvent les gros billons droits. Les branches, même grosses, les bois tordus, les ramilles, sont laissées au sol.
Chaque année, la commune prépare des lots de bois, et les habitants de Rivière peuvent s'inscrire sur une liste, pour bénéficier d'un lot à tout petit prix, tiré au sort.
Certains lots, de belles branches, des troncs à peine noueux, entassés en bord d'un chemin carrossable, sont une belle affaire pour leur bénéficiaire.
D'autres, perdus au fin fond de la forêt, difficiles d'accès, le sont moins.
C'est le principe même du tirage au sort, où l'on ne peut pas savoir à l'avance !

Ceux qui se désistent, faute de pouvoir aller récupérer le bois trop difficile à atteindre, sautent leur tour, et descendent en fin de liste, pour les années suivantes.
Un système éprouvé, et parfaitement rodé.

Les années passant, les candidats se font rares. Tirer le bois, le tronçonner, le charger, le fendre, le ranger, tout ça se fait pour le particulier de main d'homme, et l'homme, on le sait, sans la machine, se fatigue.
De plus en plus de lots seraient restés sur le carreau, s'embroussaillant, et empêchant une bonne exploitation forestière.
C'est la raison de ces piles immenses de bois de rebut.
Elles s'élèvent le long des chemins. En attendant le broyage. Ce résidus transformé en copeaux se recycle en paillis, ou en granulés de bois, pour le chauffage.
Ainsi, l'homme fatigué continue de se chauffer au bois, même s'il le paie au prix fort.
Tout a un prix, la paresse aussi !

Nous devisions ainsi avec Olivier sur ces considérations désolées, le manque de courage de nos jeunes générations, leur propension à vouloir le confort sans s'en donner la peine, et toute cette litanie mauvaise des vieux incapables de faire maintenant par eux-mêmes, et jaloux d'une jeunesse perdue.
Rien que de très classique. 
On ne nous abat pas, nous, dès que notre ombre se porte sur les plus jeunes. Elle s'amenuise toute seule assez vite ! Et les jeunes plants font leur vie, à leur manière, qui n'est plus la nôtre. Ainsi-soit-t-il....

Chemin faisant, nous étions revenus à notre point de départ.
Notre promenade avait duré à peine plus de deux heures.

Et là, là où il y avait l'immense pile de bois, plus rien ! 

Tout avait disparu, avalé et recraché en copeaux par la grosse machine verte, aux bras écartés comme une sauterelle géante désarticulée :







Une machine énorme, plus haute que le grand camion benne, bien plantée sur ses grosses roues crantées, et stabilisée par des bras fermement ancrés au sol, comme le sont les grues.
Cette bête des temps modernes avale 100 M3 à l'heure. Elle remplit la benne de la semie en 20 mns. 
Toutes ces données techniques nous ont été fournies pas le chauffeur du monstrueux engin, justement fier de sa mécanique.
Il s'en retournait avant la nuit. 

- Avec ça, se rengorgeait-il, je roule à 80 Km/H !
  Quand on me voit débouler, je peux vous dire qu'on s'écarte !

L'homme semblait bien gentil. C'est à espérer ! Sans ça, au volant de sa sauterelle géante, il risquerait de faire un sacré ravage...
Les choses sont souvent bien faites, qui laissent aux gentils les outils dont les méchants se serviraient mal.

Après avoir devisé un moment, nous sommes ressortis de la forêt.


Dans la barthe plane, nous avons croisé deux chevaux ahuris comme nous de cet ouvrage si vite expédié. Tournant vers nous leurs grosses têtes aux oreilles dressées, ils nous ont dit :

 - Tu le crois, toi, ça ?!









Même la corneille, en haut des ramilles du chêne, en restait muette de saisissement, figée dans les lueurs dorées du couchant.






Un bien joli lundi à Rivière, après un très agréable dimanche entre amis à Bidache.


vendredi 24 janvier 2020

23 janvier



Jeudi 23 janvier 19h30

C'était donc aujourd'hui le grand jour de cette fameuse réunion d'expertise.

Tout hier, pour me détendre, et me préparer à affronter le plus sereinement possible la partie adverse, je me suis concentrée sur de petits bienfaits.

J'ai revisité mes peintures rupestres. Elles peuvent faire sourire, gentiment ou pas.
Moi, elles m'apaisent et m'amusent. Elles me font grand bien, et ne me coûtent rien.
Du plaisir avant, pendant, et encore après : que du bonheur, à peu de frais !




J'ai planté des fleurs dans mon petit potager mignonnet :





J'ai longuement contemplé mes belles petites, couchées dans le paillage frais, rassasiées.
Je leur ai vigoureusement gratté le flanc, secoué la gorge, et caressé l'entre-cornes. Elles ne demandaient rien de plus, et leurs regards voluptueusement  contentés me faisaient un baume efficace.







Ma Buru-Haundi surtout, était toute tranquille après deux jours où je la sentais tracassée.



Depuis dimanche, elle tirait sur sa chaîne, se reculait, poussant Graziosita contre le muret.
Elle humait l'angle du sien, inquiète, comme si quelque chose d'alarmant pouvait lui venir de ce côté.
J'ai cru au début que quelqu'un, un visiteur du samedi, me l'avait effarouchée en voulant l'approcher sans s'être civilement présenté. Ma Buru-Haundi est une grosse bêtasse plutôt placide, pas trop sensitive. Tout de même, déplacée là depuis la mort de ma regrettée Bigoudi (paix à son âme, et grande peine encore dans la mienne), pas encore bien faite à son nouvel habitat, elle est un peu en alerte, comme on l'est en territoire inconnu. Toute grosse bête qu'elle soit, elle conserve quelques terminaisons neuronales branchées sur son environnement proche.



Je lui ai fait triple ration de caresses, pour atténuer le traumatisme naissant. Je lui ai parlé, expliqué que les gens ne sont pas toujours délicats, qu'il en est quelques uns de pas bien fûtés, qui trouvent très inspiré de claquer un bon gros mufle tendu gentiment vers eux.
Ca aurait du l'apaiser. Mais non. Elle persistait dans son attitude de retrait.



Mardi matin, je l'ai trouvée particulièrement chiffonnée, d'une nuit blanche. Agitée, fatiguée sur ses pattes, comme si elle ne s'était pas couchée. Même sa ration de son et de luzerne ne suffisait pas à concentrer son attention. Elles restait sur ses gardes, à l'affut, guettant toujours par dessus le muret.
J'ai inspecté l'auge derrière ce muret. Dans le temps, il y avait là une paire de vaches. Maintenant, l'emplacement sert à stocker le bois, quelques planches de rebus et autres résidus, qu'on garde, comme ça, des fois que, sans rien en faire de plus qu'y accumuler de la poussière. Et tenter un ou autre vieux rat, venu aux jours froids se réchauffer là.
J'ai pensé à cette possibilité. Je sais bien combien un tel animal peut faire de bruit, la nuit, quand il se fait une niche à son goût, dans un tas de vieilleries.



Ma Buru-Haundi avait toutes les raisons d'être inquiète, surtout si l'animal à la longue queue écailleuse lui était passé devant le museau !
Je n'avais pas le temps de m'attaquer à ce déblaiement, mardi matin. Le soir, je rentrerais tard, après 20 heures. Je ne voulais pas non plus une autre nuit sans repos pour ma Buru-Haundi.
J'ai mandaté Antton, maintenant co-éleveur de mes vaches, pour tirer l'affaire au clair.



Au soir, mon auge était vide, impeccablement nettoyée.
A cette heure là, mes frères s'en sont retournés dans leurs pénates respectives.
Mon père était bien là, lui. Mais il dormait à poings fermés. Je n'ai pas voulu le réveiller, pour lui demander ce qu'avait révélé l'auge.
Déjà, je notais ma Buru Haundi bien placide, confortablement calée contre la murette, la panse rebondie et la mine toute quiète.
Ca paraissait de bon augure.
Mercredi matin, hier, j'ai eu le fin mot de l'histoire.
Dans l'auge à bazar, il y avait bien un rat, de belle taille, engourdi du poison que j'avais distribué dimanche.
Il se mourrait là, après s'y être sûrement démené.
J'avais mon explication. Et Buru-Haundi avait retrouvé sa quiétude. Tout allait bien, de ce côté là, au moins.

Réconfortée par ce bon début de journée, j'ai pu ensuite vaquer agréablement, pour me distraire de cette menace judiciaire, planant sur mon horizon proche, comme le rapace cruel plane en ombre tournante dans le ciel.

Je me suis accrochée à une petite entreprise un peu audacieuse, certes, mais que je pensais à ma portée de bricoleuse premier niveau.
Un petit ouvrage électrique me hélait, suffisamment ardu pour me donner cette sensation de "smooth" si gratifiante.
Il s'agissait d'éclairer la niche vitrée de mon buffet. J'y avais présenté quelques pierres, deux coquillages, un rondin de bois délavé, mon petit éléphant fétiche, et une ou autre paillettes et verroteries. D'après moi, une œuvre magnifique de finesse et de créativité. Pour un œil moins complaisant, et plus averti, un fatras hétéroclite et navrant.  
J'avais là de quoi occuper plusieurs heures de ma journée d'attente d'avant la tempête.
Matière agréable à me distraire de cette tracasserie lancinante.
Ce fût hasardeux, déconcertant, par moments, de coupler une lampe tactile à un cordon traditionnel. Fastidieux, de dénuder des fils un peu courts, pris dans un système compliqué que j'ai allègrement détourné. Agaçant, de s'échiner à glisser laborieusement les brins de cuivre récalcitrants dans le petit domino récepteur, dans un espace aussi restreint et malcommode.
Ma manœuvre de diversion risquait de tourner à l'épreuve de force, où mes nerfs déjà en chauffe finiraient de s'incendier.
Finalement, après un pic où tout a failli basculer, y compris notre installation éléctrique, j'y suis arrivée ! La sobre lampe tactile aux lignes si pures s'allume et s'éteint à la demande, derrière la vitrine, irradiant des reflets envoûtants sur mes petits trésors.







Je lévitais, transportée par une satisfaction pleine et profonde.
Les augures m'étaient favorables. Une bonne nuit de sommeil là derrière, et je serai pour le lendemain, aujourd'hui, au mieux de ma forme.

La nuit fût moyenne. Je me représentais tour à tour brillante et victorieuse, telle ma lampe illuminée, ou alors terne et piteusement muette, comme mon bois mort tout gris de trop de pluie. Je m'exhortais à parier sur le premier scenario, quand le second s'invitait dans la danse en diablotin sardonique. 

Ce matin, je m'acquittais des soins quotidiens aux bêtes et gens.
J'étais "convoquée" à 9 heures, chez Cousinou.
J'avais quand-même bien déjeuné, n'étant pas sûre de pouvoir compter sur une coquet panier de croissants chauds aimablement offerts par la revêche cousinette.
Qu'importe !

A l'aube, à l'heure où blanchit la campagne, je partis.
Deux minutes après, j'étais rendue. Je me plaçai, protocolairement, rangeant Grand Modus, mon fidèle destrier, dans la cour déserte.
Je repérai le grand Cousinou Babillou. Et son démultiplié petit cousinou. Ils étaient en force, les bougres ! Quand je me trouvais bien seule, pauvrinette…
 Avec l'expert judiciaire qui m'avait convoqué en leur nom, qui ne tarderait sans doute pas à arriver, nous serions à 3 contre 1. Combat très inégal, je ne partais pas gagnante...
Ah, non, c'est vrai, moi aussi, j'en avais un, d'expert, mandaté pour m'assister par la compagnie d'assurance, celle-là même qui me faisait convoquer. Un peu difficile à suivre, comme mécanique, mais bon. Celui-ci non plus n'était pas encore là.

Puisque nous étions entre nous, puisqu'une petite pluie me tombait dessus, je demandais poliment à Cousinou l'autorisation d'aller visiter son étable.
Nous parcourûmes gentiment la file de grosses et grandes bêtes. Je n'aime pas trop ces fades blondasses. Mais il me faut reconnaître que celles du cousinou sont hautes et larges, comme il l'est lui-même.
Je me sentais toute petite, là dedans. Un peu dans mon élément quand-même, dans la chaleur bovine et les effluves de purin.

Du mouvement dans la cour tira Cousinou dehors, je l'y suivis. L'"expert" du camp adverse était là. Un jeune homme bien planté, au beau visage ouvert.
Après les présentations, s'en suivirent des échanges un peu tendus, des explications et des historiques  confus.
Pour mon avantage, j'étais seule, et mon discours cohérent.
Mes "confrontants", eux, à deux, ne devaient pas s'être trop bien entendus, avant la bataille. Ils avançaient en légions désordonnées. Leurs tactiques respectives les dispersaient, quand elles ne les opposaient pas carrément. Le vieux voulait qu'on enlève ce béton, là, en haut, quand le jeune en tenait pour faire éclater celui-ci, en bas. On ne savait plus où donner de la tête, et leur jeune expert y perdait son latin, et, très vite, sa patience.

J'avais l'avantage d'être seule. Mon "expert" n'était toujours pas arrivé !
Enfin,  mon assistant mandaté se matérialisa. Long jeune homme à lunettes et manteau long frileusement serré contre lui, il était là, aussi animé qu'un spectre éteint. De lui, je n'ai entendu que son bonjour murmuré, puis, son au revoir chaleureux. Je ne lui en veux pas. Je prenais trop de place avec mes babils et mes mouvements incessants pour lui laisser la sienne.

Le premier "expert", lui, avait une toute autre présence. Sentant la débandade dans son camp, ne comprenant d'ailleurs pas la présence du démultiplié, la trouvant surtout dérangeante et inefficace à la résolution du litige, il m'écouta, les yeux dans le vague, pour essayer de s'élever au dessus de ce débat houleux, et en écumer les scories brouillonnes. Il n'était pas sans travail !

Il parvint pourtant à démêler tout ça :
Puisque je m'y étais engagée, puisque j'en avais manifestement et sans mal la possibilité, je canaliserais le petit ruisselet d'eau vive et gaie.
Pour le cousinou et son démultiplié, ils laisseraient mon béton s'ourler grassement et en paix, puisqu'ils n'auraient plus cet affreux dérangement de mon  filet d'eau, dans un champ en forme d'entonnoir géant, où il en coulait déjà beaucoup, sans doute. Ce petit mien était la goutte de trop...

Nous nous retrouvâmes autour de la grande table ronde de la cuisine, ici.
Les "experts" tapotèrent longuement sur leurs claviers, s'appliquant à la prose, sourcils froncés.
Cousinou, son démultiplié et moi-même, nous attendions, silencieux. 
Le protocole d'accord fut rédigé, lu, approuvé, et, solennellement,  signé.

Le chapitre était clos. Pour cette fois. 
Dans nos campagnes, les querelles de voisinages s'ébattent de territoires plus vastes. Et de sujets bien divers.
Nous verrons, quelle sera la prochaine tête de récif, affleurant hors des eaux écumantes, quand les hauts fonds sous-marins ourdissent sans bruits leurs complots là dessous.

Ma molécule en cette période est rudement mise  l'épreuve.
Toutes ces tracasseries, contrariétés et émotions fortes me sont thérapeutiquement très déconseillées.
Vivante parmi les vivants, je ne peux pas m'y soustraire.
Cette bonne vieille molécule atténue bien ma fougue et mon impétuosité. Elle ternit ma verve vite acide. 
Bah, de là où il y en avait trop, il en reste encore bien assez, allez !

Il en faut tout de même pour tenir la dragée haute à ces pharaons qui croient régner sur leurs sept provinces, et y imposer leurs lois.
Ils rêvent d'un domaine étendu bien à plat devant eux, du levant et jusqu'au couchant, aussi loin que mène le galop d'un cheval emballé durant toute une journée, à perte de vue et de raison.



Pour cette fois encore, pharaon a rabattu ses plumes de paon.

Chacun ses rêves et ses fantasmes.
Moi, je n'ai pas "20 bonhommes à gérer". Non, moi, je n'ai que moi. Et je trouve que c'est déjà bien assez !
Je n'ai que mes modestes joies et mes petits projets.
Encore que, à bien y penser, Agorreta 2122, ça n'est pas rien non plus, comme grande utopie !
Nous sommes tous plus ou moins faits du même bois, semblerait...
.

Comme morale de cette petite fable, je dirais :

Quand chapon et pharaon
se prennent pour Napoléon,
ils finissent par l'avoir dans le fion...







mercredi 15 janvier 2020

12 au 15 janvier




Dimanche 12 janvier 2020  5H



J'ai parfaitement bien dormi cette nuit.
Depuis mi-novembre, entre les veilles pour mon père et celles pour Bigoudi, j'étais en alarme. Tout mon métabolisme alerté s'est mobilisé, et demande maintenant réparation.

Puisque mon père va mieux, puisque Bigoudi est morte, je peux maintenant prendre du repos. Pas trop non plus !
Mon cervelet est ainsi fait qu'il lui faut toujours un train d'affaires.
Quand les choses se calment trop, il tourne en rond, et ne donne rien de bon.

Dieu merci, le sort prévenant a mis sur ma route le grand Cousinou.
Très obligeamment, mon parent et voisin vient me porter du grain à moudre. De moulin, lui, il n'en a pas, même si je lui proposais l'eau pour le faire tourner.

C'est donc de nouveau cette histoire d'eau qui revient, pas sur le tapis, mais dans la prairie.

Petit historique en rappel des faits :

Chronique du 2 Août 2019 :


L'objet de la polémique, cette fois, c'est ce petit béton rondelet, joliment ourlé au pied du pilier de la clôture en limite avec le Cousinou.
Les images sont de ce matin, après l'averse drue d'hier :








Vue rapprochée en gros plan




Vue d'ensemble




Ce béton, souvenons-nous, coulé à profusion par des professionnels du câble enterré, qui devait passer par ici, et était finalement passé par là, par chez moi.












Ce béton nous préserve de la boue gluante, en principe. Nous pouvons maintenant faire le tour complet de la ferme, en pantoufles : que du bonheur !

Ce béton de la discorde, comme le remarque si justement le sagace Cousinou, ne se livre pas par mètres cubes, "gratis".
Non, en règle générale, le béton, les toupies de béton, ça se paye, et assez cher.
Ce projet dans l'air du temps depuis longtemps d'aménager un accès dans le champ, et de bétonner cette sortie d'étable, attendait justement le déblocage d'une ligne de budget.

Là, grâce, et je dois ici l'en remercier, à cette tête de pioche de Cousinou, qui avait refusé le passage "chez lui !" de ce câble, au prétexte d'un document non signé bien en amont, je ne sais quoi, je ne sais qu'est-ce, j'ai pu profiter des largesses d'un directeur d'agence de BTP suffisamment énervé par ce refus, et pris par le temps, pour me dédommager largement de lui avoir permis de mener son projet à terme, malgré ce fâcheux aléa. Il m'a offert son béton et ses hommes. Alléluia !!

Il est comme ça, le Cousinou. Il peut dire oui, et pas oui-oui. Ca fait non, comme dans certaine règle arithmétique dont je serais bien incapable de me souvenir.

Tout ce petit historique pour en revenir à l'affaire d'eau du jour.

Le jeudi 18 juillet au matin, Cousinou s'en vint à la ferme.
Venait-il prendre des nouvelles de son vieil oncle de 91 ans ? Le saluer et le féliciter de sa bonne forme retrouvée ?
Que nenni !
Non, non, non !!
Non, il venait le houspiller, sans tambour ni trompettes, en bottes hautes et verbe à l'avenant :
nous devions faire quelque chose avec ce béton, il déviait l'eau de "main d'homme", et cette eau allait dans son champ.
Bien.
Si nous ne faisions rien, il ferait venir un huissier, nous assignerait au tribunal, et nous perdrions…
Re-bien.
Il s'en retourna comme il était venu.

Le dimanche 21 au petit matin, je m'en vais le trouver dans le pré où il fauchait son maigre regain.
Il consentit à interrompre son ouvrage, et descendit même très urbainement de son tracteur.

Voisine arrangeante et cousine soucieuse de la bonne entente familiale, je lui proposai de faire les quelques mètres qui nous séparaient du lieu de l'outrage, pour voir ensemble le meilleur moyen d'y remédier.
Non, non, non, me dit-il, (là, ça devait bien faire non), pas besoin d'aller examiner de près, ça se voyait, "à vue d'œil". Après le "main d'homme" qui semblait lui avoir beaucoup plu, nous en étions à "vue d'œil". Je me demandais si ça n'était pas une manière de jeu, où il fallait remonter toutes les parties de l'anatomie humaine. Je me préparais avec tête de cochon, ou, alors, de mûle, et, pourquoi pas, bonnet d'âne ? ha non, bonnet d'âne, ça n'aurait pas fait l'affaire, c'est vrai.

C'est trop tard, maintenant ! continua-t-il. Je fais intervenir l'assurance, quelqu'un va venir. Je ne veux pas d'eau dans mon champ, ni de gravier non plus !

Nous en étions à un jour ouvrable après sa sommation menaçante. Nous étions à l'avant-veille de cette journée caniculaire record, où les 40° Celsius auraient asséché toute velléité torrentielle. Se prémunir  en urgence absolue contre un risque d'inondation à Agorreta me semblait cocasse. Enfin !
Après l'huissier et la cour de justice, nous en revenions à la plus modeste assurance. D'accord.
Je le laissai là sur ces entrefaites, et m'en retournai, attendre, ce "quelqu'un", qui devait venir, en ombre noire planant sur mes jours quiets.

Lui garantir qu'il n'aurait pas d'eau dans son champ, je n'étais pas sûre de pouvoir le faire, ni qu'aucun assureur le puisse davantage. Là, il fallait monter plus haut, et demander carrément au Bon Dieu et à tous ses saints de nous prêter main forte. (Tiens, en voilà une autre, de main).

Au passage, l'étymologie basque de "Legorburu", notre patronyme commun, ramène à une gravière, c'est à dire une carrière de gravier.
Le caillou, le gravier, la tête de pierre, et de pioche, ça devrait nous connaître.

Des cailloux, d'ailleurs, il y en a, dans le coin, dans ce même champ, tiens :





Ils font d'ailleurs controverse, ceux-là aussi. Dans l'autre sens : Cousinou tient à les garder, ceux-là…

Quand je lui fis remarquer que ce chemin, non, chemin, il n'aime pas, cet accès, donc, était aussi fait de "main d'homme', et que, visiblement, il déviait aussi l'eau,  et en ma défaveur, Cousinou argua que l'ouvrage avait été réalisé par son père, le mien, et leur père, soit notre grand-père.

- Alors, va chercher Aïtatxi, lui dis-je. A six pieds sous terre.

Il ne releva pas.

Mercredi en fin de matinée, en effet, "quelqu'un", vint.
Un médiateur d'assurance, très aimable, poli et propre sur lui.
Accompagné de mon grand Cousinou, dont le salut fut plutôt bref, mais, bon…
 Nous nous penchâmes tous les trois sur l'objet du délit.
Une ou autre herbe aplatie, de la terre, deux petites pierres.
Sur le gazon ras du Golf de Fontarrabie, et encore, ça aurait pu faire désordre, c'est vrai.









Là, en pied de cette clôture branlante, perdus dans le fatras de ces chardons croisés de rutabagas sauvages,  dans cette zone laissée à l'abandon, une ou autre herbe un peu aplatie, de la terre, et deux petites pierres…
L'expert allongea une lippe dubitative.
Cousinou en tenait pour un outrage à venir.
Je promis de prendre toutes les mesures conservatoires dans mes possibilités, pour préserver de l'inondation ou d'une avalanche de pierres, cette contrée si protégée.
Au vu de la configuration du terrain, mes meilleures intentions resteraient sans trop d'effet. Mais bon.

Le médiateur bien urbain agréa ma proposition, et s'en fut sur le chemin.
Il m'avertit d'un prochain courrier récapitulant notre entrevue. Me demanda de lui répondre dans le même sens.
A moi, me demander d'écrire !
Je lui promis, encore une fois.
La chronique d'aujourd'hui sera mon brouillon.
J'espère que cet homme venu tout exprès depuis Pau, au prix de primes d'assurance toujours augmentées, trouvera ma prose à son goût, lui.
Pour les autres, qu'ils se souviennent, combien ils l'appréciaient, eux aussi, avant, quand c'était pour défendre leurs causes.
Comme le disait ma regrettée mère : il était bienn bonn, avannt !

Je sens bien le petit vélo emballé dans ma tête.
C'est sûr, pour d'autres, avec leurs trottinettes, ils mugissent comme une ensileuse en service, et se traînent à peu près aussi vite. Peu de risque qu'ils chavirent sur les chaos.

Ma chronique se fait plus explicite, s'ébrouant des métaphores ou allégories brumeuses.
Puisque la rupture est consommée, buvons notre verre jusqu'à la lie !

Le temps a passé.
Et oui, tout passe.
Pendant qu'on attend… le déluge !
L'eau qui roule et emporte les pierres, sans leur laisser le temps d'amasser de la mousse..

Fin du premier épisode.

Le temps passe, l'été se passe.
Dans le champ de Cousinou, tout va bien. Rien ne s'éboule, ne s'affaisse, ne se zèbre en ornières sous les coulées de pierre.

Arrivent Novembre et ses pluies diluviennes.

L'eau nous tombe en trombes.
Dans le champ de Cousinou, des filets serpentent, en effet, depuis le piquet d'angle, oui, mais ailleurs tout autant, et bien plus.










Ici par exemple, en pied de cette butte faite elle aussi de main d'homme. Enfin, non pas de sa main. Cet homme là travaille plutôt sur des machines, bien assis sur son postérieur solide.
Le seul travail, pas trop ardu, lui est plaisir savoureux. Dit-il.
Quand pour ses satellites en proche orbite le fruit juteux leur en suffit largement.

Le champ en bordure et les piquets noyés sont aussi à Cousinou. Le piquet bois n'aime pas être plongé dans l'eau. Il n'est pas plant de riz. Il s'y pourrit. 
Il y aurait là plus à s'en inquiéter qu'ailleurs.

Mais non, pas du tout ! Là, Cousinou voit ça d'un très bon œil.
C'est que mon grand cousinou le tout fou et l'homme assis sont cousins, et oui...
Et s'entendent maintenant comme larrons en foire.

A un moment, pourtant, ils se montraient les dents, et le frérot l'aîné, le grand travailleur assis, traitait son parent maintenant bien-aimé de "grand pppourrrri !"

Là, c'est de l'histoire ancienne, contemporaine de ce chemin, non...accès ! à goudronner, et du j'ai dit "oui, mais pas oui, oui". 

J'explique, pour les non avertis :

Il s'agissait de stabiliser le chemin d'accès vers nos maisons. 





Ce fameux "chemin", est dans les faits une servitude, grevant la parcelle du voisin, maintenant cousinou. Il y était implanté bien avant lui. Il traverse en son plein milieu une grande prairie. Cousinou n'a jamais connu son champ "unifié". Mais c'est son grand rêve, le combat de sa vie.

Je le comprends tout à fait, j'ai même dans l'idée de partager son objectif, et de bonnes raisons de penser y arriver. Plus tard.

Le goudronner, ce serait ouvrir la voie à tous les égarés qui se perdent sur le chemin de Pausoa. De les mener tout droit dans la cour de la ferme, où les chiens se mettraient aux abois. Beaucoup de bruit, de dérangement; sans compter la mise en œuvre coûteuse, surtout si, comme prévu, c'était le grand travailleur assis qui s'y était mis. Celui-ci, en facturation, il est comme dans sa tête, il enfle et gonfle les zéros !
Il était donc alors question d'empierrer le chemin, et de goudronner par là dessus.

Le cousin approché par l'aîné d'ici avait dit oui, dans un premier mouvement.
Au moment de commencer les travaux, à un intervalle de temps suffisant pour qu'on conditionne le grand Cousinou comme il faut, ne voilà-t-il pas qu'il se précipite depuis sa maison, et donne l'ordre cinglant de tout arrêter, de ne pas toucher à une seule de "ses" pierres. (D'autres que celles de maintenant, attention).
Nous sommes tout dépités, un peu effarés de cette brusque volte-face.
Interrogé sur les raisons de son revirement déconcertant, Cousinou explique, le plus sérieusement du monde :

- j'avais dit oui,... mais pas oui, oui.

Tiens donc, ça se fait aussi, ça !
-x- ça fait plus, en arithmétique, c'est vrai. 

Les travaux furent arrêtés. Les satellites pensants du Cousinou contentés. Le chemin resta de pierres. Et nous, pas de marbre, tonnant contre ce grand Cousinou tout fou.


C'était dans les années 90. 
La préhistoire, pour ces deux hommes à la mémoire défaillante. Oui, parce-qu'en plus d'être passablement tarés, dans la famille, nous sommes aussi atteints chroniquement d'Alzheimer.
Bien.

La brouille entre les deux cousins dura plus de deux décennies. Nous sommes un peu rancuniers, dans la famille.
Dernièrement ces deux là se rabibochèrent, au gré d'alliances fluctuantes.

Retour à aujourd'hui et à nos histoires d'eau :

Pour les images, poids des mots et choc des photos :


Chronique du 13 novembre 2019 :


J'ai fait un petit tour des alentours, et constaté :













De l'eau, ici aussi, beaucoup et partout, comme à Rivière lundi.

De l'eau, de l'eau qui court en filet mignonnet, 

de l'eau, de l'eau qui stagne et cerne ces pauvres piquets lacustres,

de l'eau, toujours, alentie en lac au bout d'un ruisseau au long cours,


de l'eau, tombée du ciel sur les hommes et leurs terres,

là où la main de l'homme n'est pas toujours heureuse...






 début 2020.

Je reçois un courrier en recommandé.
Tiens, me dis-je, quelqu'un veut-il ainsi s'assurer que je reçoive bien ses bons voeux ? Un anxieux, sans doute.

Je me fourvoyais : Cousinou me faisait convoquer à une "réunion d'expertise". Tiens donc !
Jamais depuis fin juillet je n'avais eu de ses nouvelles, ni bonnes, ni mauvaises.
J'avais bien vu à cette occasion combien il était hérissé, préférant à une entrevue amicale, ce joli dimanche où il fauchait son maigre regain, aller quérir en urgence un agent assureur venu tout exprès depuis Pau.
L'échine ne lui était pas retombée, sans doute.

Mon grand Cousinou est sûrement un gentil garçon.
Malheureusement, lui comme moi, nous n'avons pas la lumière à tous les étages. 
Dans ce grand bâtiment, long et large, il y a beaucoup de pièces vides. Elles ne résonnent que de ce qu'on veut bien y mettre.

Je me rends bien compte que mon arrogance et mes péroraisons ne sont pas de bien jolis meubles.
Tout de même, je ne vais pas tendre la joue, pour recevoir la seconde claque chrétienne.
Non, je vais me servir de mes mots, de mes petites flèches piquantes, m'y amuser. 
Cribler l'adversaire, et lui faire tourner le museau, comme on le fait d'un bon coup de bâton sur le mufle à de jeunes génisses  gourmandes.
D'ailleurs, ce grand couillounou de cousinou, il me fait bien penser à ma belle Buru-Haundi, avec sa bonne grosse tête d'ahurie :

Je l'aime beaucoup aussi, ma grande bêtasse.
Mais elle ne deviendra jamais un avion de chasse, c'est sûr.

Et puis, mes mots acides ou gentillets, c'est quand même mieux à distribuer qu'une volée de plombs, non ?


"Porqué no haces tù un metro otxenta ? demandait Jésus au frérot l'aîné, il y a bien longtemps.
Celui-là aussi, avait allongé un museau à la Buru-Haundi. Ils ne sont pas cousins pour rien, ces deux-là.
Moi, non plus, je ne fais pas "un metro otxenta". Non, moi, je suis petite, et teigneuse, un peu comme la naine Neska-Motx.


Mes ironies grinçantes, le sport cérébral familial par excellence, sont une méthode de défense. Que je me sente attaquée, sans l'être vraiment, peut-être. 
Là, quand-même ?


Mes mots peuvent faire mouche mais restent plutôt inoffensifs.
On peut même en apprécier la musique et y enrichir son vocabulaire, pourquoi pas ?
Je fais bien des exercices pour étirer ma colonne vertébrale grippée. Dans le camp adverse, ils peuvent aussi faire travailler leurs méninges gourdes.




Je vais essayer de ne pas m'emballer dans les excès d'une joute effrénée. 
Il me faut raison garder tout de même, et considérer les faits, objectivement, si cela se peut, quand on est ainsi impliqué dans une classique querelle de voisinage, aggravée d'un historique mouvementé dans une famille un tant soit peu sanguine.


Le 31 juillet, Cousinou redoutait les pierres et les cailloux. 
Il n'en a pas eu.
En Novembre, il a peur de l'eau.
Novembre a été historiquement pluvieux, cette année il est vrai. Et le grand garçon peut-être vite effarouché ? Je ne sais !
Après les cailloux, après l'eau, que lui viendra-t-il, du vent ? Nous verrons bien, chaque chose en son temps.

Je me rendrai donc à cette "réunion d'expertise", où nous allons débattre, au jour à peine levé, autour d'un piquet de clôture ourlé de béton rondelet.
Certaines affaires autrement plus compliquées se traitent aisément et sans intermédiaires.
Celle-ci, non.
Bon.

Pour arriver à dévier un ruisselet d'eau claire, nous allons remonter loin, au câble enterré, à un cadastre erronné, où, là encore, le grand travailleur assis, il y a 50 ans déjà, avait mesuré comme il compte : mal.
Ooohh, pas grand chose : sur une longueur de 80 mètres, il avait pris 20 mètres de trop ! L'incorrigible glouton, déjà... 

La grande maison est trop à droite, ou le terrain trop à gauche, je ne sais plus...
50 ans après, avec les lourdeurs et lenteurs d'une administration occupée à toute autre chose, la rectification pourrait paraître compromise.
Et bien, non, là, ça va. Il faut attendre et patienter, bien-sûr, mais les choses vont leur train sans problèmes.

On aurait pu mettre cette regrettable erreur sur le compte de la jeunesse d'alors, et de l' inexpérience.
Tout de même, maintenant, encore, ce grand expert du génie civil n'a toujours pas l'œil. Il pose des buses, monumentales, et trouve le moyen de les disposer 3 bons mètres en avant de là où elles devraient être. Résultat, l'eau creuse des ornières profondes au pied d'un pauvre troène aux racines bientôt déshabillées.









Sans doute grand travailleur assis s'est-il trompé de référence, quand il a commandé ses fournitures au marchand de matériaux. La buse est trop courte, et sa gueule trop grande.

Pour ces choses là, quand on ne sait pas, il vaut mieux prendre attache avec de vrais professionnels. Et il en est.
Mon gentil ingénieur d'ETPM m'assiste dans la partie technique de ce litige en eau.
Lui sait que l'eau, ça se canalise, facilement, et qu'on en dévie le cours sans dommage, quand on sait faire. Je le suivrai dans ces recommandations, et m'en porterai bien.
Si cette affaire n'est que d'eau, elle n'ira pas bien loin, l'eau, juste là où elle le doit.

Nos experts s'en viendront faire un tour sur la côte.
Un bon artisan remédiera à ma faute.
Et l'affaire sera réglée… peut-être !

Je doute. Je vois peut-être le mal là où il n'est pas. Je vois peut-être derrière ce grand Cousinou une ombre sournoise imaginaire. Peut-être... L'avenir parlera !

J'ai ma thèse :

Cette petite histoire de "détournement de l'écoulement des eaux de ruissellement", (comme c'est chantant !), pas mineure pour Cousinou, manifestement, est le paravent transparent de toute une trame arrière. 
Comme dans la tragédie grecque, les transpositions floutent les réalités cachées. Au point qu'une chatte n'y retrouverait pas ses petits.
J'aime les allégories et les métaphores, je ne vais pas m'en plaindre.
J'aime décrypter les choses, disséquer les faits, défaire les noeuds serrés pour remonter le fil de l'histoire.
Tel le saumon canadien bondissant pour remonter le courant, je m'y fatigue, aussi, ou m'y lasse, ça dépend.

Dans ces querelles de basse-cour, où la volaille caquète et gonfle du jabot, j'ai perdu quelques plumes. Je me méfie  de mon goût pour ces batailles. Elles peuvent paraître amusantes, le sont souvent, mais finissent par attiser les méchancetés mordantes, là où tout le monde se trouverait mieux d'apaiser les conflits naissants et de vivre enfin en paix.

Ceci pour la minute morale chrétienne.

Ici, nous sommes plutôt des païens, sans foi ni loi.
Je n'ai pas choisi l'endroit, ni le moment où l'on m'a faite. 
Je vais essayer d'incurver la spirale vers un horizon plus large, où l'air est plus doux.
Si j'en suis capable.
Pas encore, dirait-on, pas cette fois, du moins.

Derrière ce bourrelet de béton, il y a la vexation du câble enterré malgré l'opposition des cousinous couillounous pas couillus réunis.

Il y a ce désir profond d'avoir "un petit quelque chose d'Agorreta", romantiquement, et de demander pour soi une grande moitié bon-poids, à la louche, quand on est 5 à contenter. En étant tout à fait persuadé d'obtenir ainsi un partage de famille équitable.

Il y a toute une intrigue, un écheveau des passions humaines classiques.
De ces passions et de ces intrigues nouées et dénouées dans notre culture, notre littérature, nos racines, nos gènes.

Je relis en ce moment ce "Vendredi ou la vie sauvage" de Michel Tournier.
Une de ces oeuvres scolaires que l'on nous enseigne quand on est bien trop jeunes et naïfs pour en saisir le sens caché derrière l'histoire tendue devant.
Que l'on nous enseigne au moins pour nous donner l'envie d'y revenir plus tard, quand l'expérience de la vie nous aura ouvert les antennes, et donné les outils pour en saisir la "substantifique moëlle".
 Comprendre les mécanismes de l'humaine nature demande un apprentissage assidu.
Il demande l'humilité de ne pas revendiquer une science impossible à acquérir.

Il faut remonter à l'origine du monde, à la côtelette d'Adam ou au big bang atomique.
La côtelette devait être félée, ou on a mélangé de la cendre noire dans la poussière blanche des débuts du monde.
Le bien et le mal se chevauchent, se cherchent, se fuient.
Impossible de s'échapper de cette cavalcade assourdissante.

Je me cramponne, j'essaie de tenir bon.
J'aime le coup de fouet au sang de cette ruée. J'ai peur de la chute brutale.
Ma bipolarité demande ces vertiges, au risque de s'y perdre tout à fait.
Elle demande la force des passions qui consument, elle fait dangereusement grésiller mes circuits éléctriques au risque d'en  faire fondre les meilleurs fusibles.
Ma nature est ainsi faite. Elle ressemble à l'autre, la nature autour de nous, avec ses excès, ses douceurs et ses tempêtes ravageuses.

Pour qui m'affronte, c'est à ses risques et périls, et aux miens.
Je peux être la louve aux dents acérées, comme le piteux épagneul penaud.
Comme mon type de bipolarité mêle les deux phases en séquences désordonnées, bien difficile de parier sur l'une ou l'autre.
Tenter sa chance, prendre le risque.
Vivre, quoi.

Ma méchanceté est une blessure qui mord.
Elle me rend affûtée en attaques défensives et tactiques.
C'est une bonne arme et ce peut être un bouclier efficace.
C'est un avantage, parfois.
Ce n'est jamais une chance.


Je sais bien que mes mots n'aideront pas à rétablir l"amour et paix".
Ca me fait du bien de faire gicler tout ce venin, comme un vilain crapaud crache le sien à la face de qui le dérange.

Notre basse-cour fraternelle et joyeuse d'Agorreta a pris un sérieux coup de plomb dans l'aile.
Je regrette ce temps là, ce temps d'antan, et le regretterai longtemps.
Je regrette aussi mes 20 ans, et ne les aurai plus jamais...
Je m'y fais.

Boris a bien raison. 
Quand ça me pince, les mots écrits me sont un bon exhutoire.
Je reraconte l'histoire, les histoires, et j'en raconte.

Pour cette affaire d'eau, je ne sais pas encore qui se retrouvera chocolat.
Celui qui croyait tout casser, ou celle qui croyait courageusement monter au front, quand elle ferraillait derrière son clavier.

Je veillis et me fatigue à ces mesquineries.
Je veillis et essaie de ne pas m'aigrir.
De ne pas devenir une vieille figue désséchée.
Ca n'est pas gagné !

Au moins, je suis contente de ce que la vie m'a donné, et de ce que j'en ai fait.
Je n'ai ni l'envie ni le besoin de demander davantage.
Je reste dans mon périmètre, mais j'en défends les limites si l'on vient m'y chercher des poux sur la tête.
Je ne vais pas user mes forces à aller au delà. Je laisse à mes cousinous réunis la soif des batailles et le goût des grands espaces à conquérir. Moi, le mien, d'espace, me va et me suffit, si on m'y laisse en paix.

Pour le reste, je maintiens mes préférences bucoliques et champêtres.


Mercredi 15 janvier 16h








Je maintiens mon goût pour la paix trouvée à regarder brouter deux biquettes et la jolie June.
Je maintiens le bienfait d'une promenade dans la douceur d'une après-midi ennuagée de janvier.

 Pour être tout à fait honnête, je maintiens aussi l'ennui de ces platitudes trop sucrées et un peu fades.
Il y faut de l'épice forte et du mouvement pétillant.
Grâces en soient rendues à mes cousinous réunis, ils me maintiennent sur le pont et s'échinent à chercher mes brèches. Ils n'y trouveront que des failles, comme celle d'Agorreta, qui restera béante, dirait-on, au centre d'un chantier jamais terminé.
Chacun devra rester de son côté, et les vaches seront bien gardées.

La vie n'est pas un long fleuve tranquille, par ici.
Elle cahote et crachote comme mon ruisselet d'eau vive.

Le petit ruisselet, je le canaliserai.
Je garderai mon joli bourrelet.
Cousinou ne viendra pas pleurer à la sécheresse estivale, quand ses vaches dépitées de n'avoir qu'une paille maigre à brouter, tireront la langue vers mon pré tout verdi de bonne eau bien déviée.
Dans cette petite bataille, il y aurait deux victoires, et pas de perdants. Comme si c'était possible...


Pour épilogue de ce petit conte de campagne, je vais attendre la fameuse réunion.
Et voir ainsi de la fable la meilleure morale à tirer.