Bonjour à tous !
En ces tous derniers jours de l'année, le vent du sud nous a fait quelques frasques à Agorreta.
Quelques plaques envolées, rien d'inquiétant, une ou autre toiture un peu échevelée. L'ordinaire, dans ces vieux bâtiments quelque peu délabrés.
Là, nous sommes revenus au calme. La pluie est annoncée, paraît-il. Elle sera bienvenue. La sécheresse incongrue en cette saison n'est pas une trop bonne affaire.
Un petit saut dans le temps et hop ! retour Chemin des Crêtes, en ce bel été 2003, aride et chaud, souvenez-vous...
Oronos, évoqué dans les derniers articles, fût l'un des volets de ce triptyque rural. Non des moindres !
Notre grand tout fou nous fit passer par tous les échelons émotionnels, du rire étonné à la colère noire.
Nous nous étions presque attachés à ce grand escogriffe, à force de côtoyer ses folies douces, et moins douces.
La mairie d'Urrugne nous offrit elle aussi l'occasion d'échanges variés et enrichissants. Nous apprîmes beaucoup en cette période. Nous fîmes des rencontres imprévues et intéressantes, dans les hautes salles vétustes de cette mairie si typique de notre belle contrée.
J'y reviendrai, vous pensez bien.
Pour aujourd'hui, par souci d'un semblant de méthode, après Oronos, j'ai envie de vous détailler un peu la troisième entité de notre tragi-comédie des Crêtes : les voisins.
Nous les englobions dans une même bulle. La même source du même genre d'ennuis.
Pourtant, ils étaient bien différents les uns des autres.
Ils se cachaient volontiers derrière les boucliers officiels, mairie ou police nationale.
Ils n'aimaient pas avoir directement affaire à nous. Les quelques réunions organisées par les services municipaux les voyaient se regrouper frileusement autour des représentants de l'autorité légale.
Ils devaient nous prendre pour des délinquants, des sauvages, ignorants de toute règle. A ne pas trop approcher, comme les bêtes fauves.
Seigneur, nous, braves paysans inquiétés du premier recommandé reçu, affolés de la moindre convocation en mairie. Nous, démunis face à une adversité si imprévisible.
En réalité, ils nous semblaient tout-puissants, alliés des décideurs. Et nous devions leur paraître inquiétants.
Des peurs face à face, des méfiances et des soupçons. Rien de bon...
Nous traversâmes la maison, de larges pièces claires et vides, après une immense porte en fer forgé ovale. Cette même porte vola en éclat, un matin, soufflée par une explosion de bombe artisanale. D'autres que nous devaient avoir maille à partir avec ces M...
La propriété est ceinte de murs épais, "gardiennée" par vidéo-surveillance. Comme ses voisines.
Ces gens-là ne vivent pas bien tranquilles, dirait-on.
Tout de même, Mme et Mr M. nous reçûmes, en délégation, mes deux frères et moi, par un clair dimanche après-midi.
Je voulais établir un contact direct. Ma première approche épistolaire avec Mme et Mr de C n'avait pas été concluante. Ils n'avaient pas donné de suite à mon appel. J'essayai donc Mme et Mr M. en deuxième approche.
Je fus agréablement surprise de la cordialité de leur accueil.
Ils nous firent asseoir au bord de la piscine, et nous proposèrent à boire. Ça ressemblait presque à une visite amicale.
Très vite pourtant, Mr M. sembla vouloir nous faire dire que notre activité n'était pas agricole, mais commerciale. Tiens donc ! Il insistait, réclamant des détails, s'informant de tarifs, de réglementations. Je sentais le vieux matou aux moustaches dressées.
En première démarche, les voisins s'étaient par mairie interposée inquiétés de savoir si nous n'avions pas de projets de construction, sur notre parcelle CA 70.
Eux-mêmes avaient obtenu des autorisations, là où beaucoup d'autres avant se les étaient vues refusées. Curieux, mais, bon...
Ils se retrouvaient sur la Crête, entre eux, entre gens de bonne compagnie. Ils ne voulaient pas partager le privilège de ce magnifique panorama. Un peu féodal, comme système, non ? Mais tellement courant dans nos verdoyants pâturages...
Ensuite, les nuisances réelles occasionnées par le gros chantier espagnol les avaient fait sortir de leurs gonds. Cette réaction, nous l'admettions, et reconnaissions le bien-fondé de leurs récriminations d'alors.
Depuis, les rotations de camions venant apporter de la terre chez nous s'étaient faites beaucoup plus diluées. Il y avait bien plus de poids-lourds empruntant le Chemin des Crêtes en direction de la décharge municipale de Labourénia, en bout de voie.
Les nuisances au voisinage n'était pas plus aiguës par le fait de notre activité, que par celle de la mairie. Elles l'étaient même plutôt moins, malheureusement pour l'avancée de notre projet.
Les villas des voisins sont en retrait de la route, et pour la plupart ceintes de façon à atténuer les bruits de circulation. Les jardins sont du côté opposé à la voie. Il faut vouloir voir passer du camion, en se postant au bord du chemin, comme le faisait très régulièrement l'acharné Mr R.
Les revendications de nuisance se justifiaient mal.
Cependant, les voisins s'intéressaient à nous, à ce que nous faisions, aux possibles bénéfices que nous en tirions. Ils se demandaient si nous ne faisions pas un petit commerce profitable, là, sous leurs yeux.
Et si, peut-être, il n'y avait pas moyen d'en tirer avantage pour eux-mêmes.
Là, c'est mon imagination perfide qui parle, évidemment. Vous l'aurez reconnue, la rouée mauvaise...
Jamais les voisins, n'ont, aussi clairement qu'Oronos, manifesté l'intention de ramasser quelques billets au passage. Non, jamais ! Tout au plus Mr de C. s'est-il enquit du prix du terrain agricole, de notre éventuelle intention de vendre... Comme ça, manière d'entretenir la conversation entre voisins, sans penser plus loin. Le bougre !
Je n'avais pas d'éléments de réponse satisfaisants à leur apporter. Que mon frère terrassier se fasse rémunérer pour son travail, que les entrepreneurs impliqués trouvent entre eux des arrangements financiers, je n'en avais cure.
Moi, je voulais une parcelle cultivable. Je n'avais sûrement pas les moyens de prendre en charge le financement des travaux nécessaires à cet objectif.
J'avais cette opportunité de concilier mon projet et mes capacités à le mener à bien. Je n'allais pas la laisser passer !
Nous étions avec mes deux frères une entité diffuse, une hydre à plusieurs têtes. L'un propriétaire, l'autre exploitant, le troisième maître d'oeuvre. Personne ne s'y retrouvait trop bien. Les amalgames se multipliaient. Nous ne faisions pas grand chose pour éclaircir la situation, honte à nous !
C'était amusant, ces changements de pieds, ces volte-faces. Une petite danse arythmique et surprenante, pour tous nos interlocuteurs, un peu perdus au milieu d'autant de Legorburus...
Mme et Mr B. crurent avoir rassemblé les pièces du puzzle en un tableau plus facile à cerner.
Ils firent le rapprochement entre mon activité salariée d'alors, au sein d'un grand groupe céréalier, à l'époque, et un de leurs amis, justement à la tête de l'une des principales filiales de ce groupe.
Cet ami, pour eux, l'un de nos grands patrons, pour moi, se fendit même d'un coup de fil sur mon lieu de travail, pour me parler de mes problèmes de voisinage, Chemin des Crêtes.
Il se fit proprement recevoir, comme de juste ! Je lui rétorquai qu'au magasin, je me devais de prendre en compte ses directives. Et je le faisais. Chemin des Crêtes, j'étais chez moi. Et ni lui ni personne ne viendrait m'y faire autre loi que celles applicables à tous, y compris à ses amis.
Et toc, j'étais toute fière de ne pas avoir plié devant la grande autorité... Je fus mutée, à 80 kilomètres de chez moi, dans le mois qui suivit. Sans lien de cause à effet, évidemment, là encore !
Comme les gens deviennent teigneux, quand ils se heurtent à leurs faiblesses inavouées.
Bah, je fais pareil, et vous aussi, sans doute, non ?
Allez, je vous laisse ici pour aujourd'hui.
Je vous parlerai encore de ces braves gens. Ils méritent que l'on s'y attarde, un peu, mais pas plus.
A bientôt !
Depuis, les rotations de camions venant apporter de la terre chez nous s'étaient faites beaucoup plus diluées. Il y avait bien plus de poids-lourds empruntant le Chemin des Crêtes en direction de la décharge municipale de Labourénia, en bout de voie.
Les nuisances au voisinage n'était pas plus aiguës par le fait de notre activité, que par celle de la mairie. Elles l'étaient même plutôt moins, malheureusement pour l'avancée de notre projet.
Les villas des voisins sont en retrait de la route, et pour la plupart ceintes de façon à atténuer les bruits de circulation. Les jardins sont du côté opposé à la voie. Il faut vouloir voir passer du camion, en se postant au bord du chemin, comme le faisait très régulièrement l'acharné Mr R.
Les revendications de nuisance se justifiaient mal.
Cependant, les voisins s'intéressaient à nous, à ce que nous faisions, aux possibles bénéfices que nous en tirions. Ils se demandaient si nous ne faisions pas un petit commerce profitable, là, sous leurs yeux.
Et si, peut-être, il n'y avait pas moyen d'en tirer avantage pour eux-mêmes.
Là, c'est mon imagination perfide qui parle, évidemment. Vous l'aurez reconnue, la rouée mauvaise...
Jamais les voisins, n'ont, aussi clairement qu'Oronos, manifesté l'intention de ramasser quelques billets au passage. Non, jamais ! Tout au plus Mr de C. s'est-il enquit du prix du terrain agricole, de notre éventuelle intention de vendre... Comme ça, manière d'entretenir la conversation entre voisins, sans penser plus loin. Le bougre !
Je n'avais pas d'éléments de réponse satisfaisants à leur apporter. Que mon frère terrassier se fasse rémunérer pour son travail, que les entrepreneurs impliqués trouvent entre eux des arrangements financiers, je n'en avais cure.
Moi, je voulais une parcelle cultivable. Je n'avais sûrement pas les moyens de prendre en charge le financement des travaux nécessaires à cet objectif.
J'avais cette opportunité de concilier mon projet et mes capacités à le mener à bien. Je n'allais pas la laisser passer !
Nous étions avec mes deux frères une entité diffuse, une hydre à plusieurs têtes. L'un propriétaire, l'autre exploitant, le troisième maître d'oeuvre. Personne ne s'y retrouvait trop bien. Les amalgames se multipliaient. Nous ne faisions pas grand chose pour éclaircir la situation, honte à nous !
C'était amusant, ces changements de pieds, ces volte-faces. Une petite danse arythmique et surprenante, pour tous nos interlocuteurs, un peu perdus au milieu d'autant de Legorburus...
Mme et Mr B. crurent avoir rassemblé les pièces du puzzle en un tableau plus facile à cerner.
Ils firent le rapprochement entre mon activité salariée d'alors, au sein d'un grand groupe céréalier, à l'époque, et un de leurs amis, justement à la tête de l'une des principales filiales de ce groupe.
Cet ami, pour eux, l'un de nos grands patrons, pour moi, se fendit même d'un coup de fil sur mon lieu de travail, pour me parler de mes problèmes de voisinage, Chemin des Crêtes.
Il se fit proprement recevoir, comme de juste ! Je lui rétorquai qu'au magasin, je me devais de prendre en compte ses directives. Et je le faisais. Chemin des Crêtes, j'étais chez moi. Et ni lui ni personne ne viendrait m'y faire autre loi que celles applicables à tous, y compris à ses amis.
Et toc, j'étais toute fière de ne pas avoir plié devant la grande autorité... Je fus mutée, à 80 kilomètres de chez moi, dans le mois qui suivit. Sans lien de cause à effet, évidemment, là encore !
Comme les gens deviennent teigneux, quand ils se heurtent à leurs faiblesses inavouées.
Bah, je fais pareil, et vous aussi, sans doute, non ?
Allez, je vous laisse ici pour aujourd'hui.
Je vous parlerai encore de ces braves gens. Ils méritent que l'on s'y attarde, un peu, mais pas plus.
A bientôt !